A: Portrait du Père
Charbel
I- Présentation
"Il était pur de cœur, d’une conversation agréable et accessible; clair
dans ses paroles, sans aucune confusion; franc";
"distingué par sa docilité, plus docile qu’un agneau, plus mince qu’une âme qui
coule dans le corps. Je l’ai fréquenté, conversé avec lui; je l’ai connu un
abîme de vertus, fertile en qualités".
"Il était svelte, au dos droit, aux doigts longs"
"et minces",
"sérieux au cou et à la bouche proportionnés",
"au nez long et mince, aux cheveux long, selon la tradition des ermites",
"frêle de corps et mince",
"aux avant-bras maigres comme une pouce, au visage"
"rond"
"et mince comme une cuillère",
"mais dégagé"
"et illuminé, marqué par la gravité divine; il attirait tous les cœurs à lui",
"au front ridé",
"signalé par la gaieté, la docilité et la sérénité du cœur";
"son visage reflétait la dévotion et l’amour de Dieu en même temps, en
particulier pendant la prière. Une lumière céleste illuminait son visage, car le
Seigneur est devenu sa force, sa richesse et sa joie permanente";
"son visage était blême",
"d’un brun clair",
"bruni",
"par la chaleur du soleil";
"à force de l’ascétisme et des veilles, il est devenu cadavérique (peau et os)",
mais "il marchait comme les perdrix",
"même durant sa vieillesse. Il était ardent dans toutes ses besognes";
"à la barbe courte, rare",
"moyenne",
"de couleur initiale blondasse, sillonnée de poils blancs au milieu et aux
tempes",
"rarement qu’il la lavait, elle lui descendait tressée".
"Au début de ma connaissance avec lui, il aurait à-peu-près une
trentaine d’années;
il n’était pas du tout grisonnant, sa chevelure, dans sa majorité à-peu-près a
conservé la couleur noire, jusqu’à son décès".
"Il se faisait toujours jeune; dans son visage,
aucun cheveu blanc ne paraissait".
"Sa taille, de l’épaule jusqu’au bas des pieds, mesurait 149 cm",
"et de la tête jusqu’aux pieds 160cm".
II- Récits et événements
1- Blême
"Dans ma première visite à l’ermitage, j’ai convoqué les ermites; Père
Charbel entra et s’assit en face de moi, les yeux baissés, les mains croisées
sur ses genoux; il ne levait pas les yeux pour nous regarder, moi et le frère
qui m’accompagnait, il ne parlait pas, ne nous posait aucune question; aux
nôtres,
il répondait brièvement et docilement. 6 ans après, vint ma deuxième visite, il était comme dans
la première fois, dans son comportement, son attitude, sa manière de s’assoir et
de parler; je n’ai remarqué aucun changement, sauf sa mine blême. Si son
interlocuteur ne venait pas à remarquer le clignotement des yeux, il croirait
qu’il était mort";
"son corps fondait tellement dans l’amour de Dieu comme une bougie qu’il est
devenu chétif, fragile et blême; son teint, à force de travailler à la chaleur
du soleil, a beaucoup bruni".
2- Son horaire
"Quand la cloche sonnait très tôt
le matin pour le réveil, je venais à l’Église avec les moines pour la messe. Je
voyais Père Charbel agenouillé tout droit près de la porte, derrière tout le
monde; il demeurait dans cette attitude, son livre à la main, l’autre sur sa
poitrine et son visage vers la terre; après quoi, il allait au champ muni d’une
corde et d’une pioche, jusqu’au coucher du soleil; chemin faisant au travail, il
tenait son chapelet et le récitait sans regarder ni à droite ni à gauche, sans
parler avec personne. Parfois quand j’allais au champ pour me promener et me
dégourdir à cause de l’ennui du travail à la cordonnerie, je voyais Père Charbel
qui travaillait au champ, parfois à piocher sans lever la tête, y appliquait
toute sa force tellement que la sueur jaillissait de son front à tremper son
habit; d’autres fois, il construisait des murs de cloison qui entouraient les
terrains: il portait les pierres, coupait herbe comme préparation à la semence.
Midi sonnant, il se retirait dans un endroit caché, s’agenouillait sur les
cailloux, bras étendus pour prier; après cette pause, il reprenait son boulot,
toujours dans le silence parfait. Autour de lui, ne s’entendaient que les sons
des coups de sa pioche se heurtant aux pierres, ou bien l’écho des pierres qu’il
soulevait pour la construction des murs de cloison où qu’il jetait sur les tas
des pierres; le silence était son intime et son compagnon. Le soir, il
rassemblait de l’herbe et des bûches pour en faire un gros fardeau qu’il portait
sur son dos et rentrait au couvent courbé sous son poids, chapelet à la main
pour le réciter. Durant toute ma résidence au couvent, je ne le voyais pas à
table parce que les dimanches, je m’absentais du couvent; et en cours de la
semaine je n’entrais pas aux réfectoires des moines. Les jours où il neigeait et
pleuvait, ainsi qu’aux dimanches et jours des fêtes en été, il ne sortait de
l’Église que pour sa cellule".
3- Ce que je voyais de mes propres
yeux
"Il mangeait une seule fois le jour, selon la discipline des ermites. Le
soir, à l’heure du manger, son compagnon l’appelait; il venait bras croisés,
tête baissée, regard dirigé vers la terre, son capuchon lui arrivait jusqu’aux
yeux; se tenant debout. Son compagnon l’ordonnait de s’asseoir et il s’assayait
après avoir prié; assis par terre, pieds posés l’un sur l’autre, ramassant l’ourlet de son habit en dessous des
pieds pour les cacher, mais toujours bras croisés, dans la même attitude
susdite, attendant que son compagnon lui dise: "mange". Alors, il mettait son
assiette d’argile devant lui, faisant le signe de la croix minutieusement et
avec recueillement comme s’il était à l’Église; puis commençait à manger,
silencieux, tranquille et décent. Il ne demandait jamais plus, ne disait pas que
ceci était trop salé, que cela manquait du sel, et que cela n’était pas
salé ou
sans saveur, il s’appliquait à l’évangile: "mangez de ce qu’on vous donne". Il
ne regardait ni autour de lui ni à ce que son compagnon mangeait. Son repas
comprenait des légumes et de la céréale, cuisinées avec l’huile, et parfois avec
du beurre. Après le manger, l’un de ses deux compagnons l’ordonnait à faire la
vaisselle, alors il se levait énergiquement, d’un seul coup sans s’appuyer,
priait et exécutait l’ordre. J’ai oui dire qu’il buvait l’eau de la vaisselle,
ce que je n’ai pas vu cela, car il ne se mortifiait pas pour se laisser voir,
mais il veillait à ce que cela fût en cacher; c’est pourquoi, on manœuvrait pour
ravir en un clin d’œil un geste de sa part… et s’il arrivait que quelque chose
tombait de l’assiette d’un compagnon ou quelques miettes se trouvaient par
terre, il profitait de l’inattention de son compagnon pour les ramasser et les
manger trempées dans de la poussière; et
si son compagnon oubliait de l’appeler à manger, il ne se plaignait ni ne
réclamait son repas, tout comme la marmite qui ne demande pas d’être remplie
d’ingrédients du plat, si l’on oublie de les y mettre, il en est ainsi du Père
Charbel. Je ne l’ai jamais entendu personnellement, ni par un tiers qu’il avait
de préférence pour un mets, ou être dégoutté d’un autre, ou parler du manger".
4- L’accueil des
visiteurs
"J’ai connu Père Charbel durant l’été de 1897 alors que j’avais 24 ans.
En ce temps-là, on allait, chaque été, voir des amis dans des endroits de la
haute montagne en l’absence des grands hôtels, des voitures et des routes
asphaltées; d’où comme moyen de transport, on se servait des chevaux et des
ânes. Cette année-là, mon ami, Chikri Beik Arqach est rentré de Paris, après
avoir obtenu un diplôme d’études supérieures en droit. Avec lui, j’ai décidé
d’aller en excursion à Mayrouba chez le dignitaire, Bechara Al-Khazen… puis nous
nous sommes dirigés vers Al-Aakoura et Al-Laqlouq, en traversant la montagne;
étant déjà proches d’un ermitage, nous y sommes allés pour y voir un ermite,
déjà célèbre pour sa vertu et sa sainteté dans la région. Nous sommes descendus
à Ouwaïny… et de là nous nous sommes dirigés vers l’ermitage des Saints. Pierre
et Paul. Nous nous sommes arrêtés pour nous reposer sous un chaîne où des gens
étaient
venus, il y a quelques jours, s’y ombrageaient, pour avoir la bénédiction de
l’ermite. Pendant que notre conducteur nous préparait le repas, un moine, de
grande taille, et maigre, vint du champ, tenant une faucille et une charge
d’herbe en mains. Il nous salua, tête baissée; nous lui demandâmes
l’autorisation de nous reposer et manger; il nous l’a permis, bon accueillant
et content; puis il se donna à nous servir, nous offrant de l’eau et du
raisin sans nous tenir compagnie. Nous l’invitâmes à manger, mais il s’excusa
avec délicatesse et décence, balbutiant: "Merci, j’ai déjà mangé au
couvent". De sa conversation avec Choukri Beik, je me rappelle le suivant:
"C’est Dieu qui nous a crées, c’est lui qui prend soin de nous; Dieu est
l’omnipotent, nous vivons bien sans mérite de notre part; que Dieu vous
accompagne". Lorsque nous avons décrit prolixement la beauté des paysages
étendus à perte de vue; de la montagne jusqu’à la mer, l’ermite répondit:
"c’est un don de Dieu au Libanais; ce site est un don céleste pour y
glorifier son Saint Nom; tout ce
que nous possédons est à lui". Il n’a pas accepté de recevoir de nous ni
cadeau ni présent. L’ermite écoutait le discours de Mr. Arqach sur les œuvres
des ermites et des dévots en France, Charbel répondit: "La France est la
fille aînée de l’Église". A ce moment-là, la cloche du couvent de Saint
Maron sonna, annonçant l’Angélus; je lui demandai de faire la prière de
l’annonciation qu’il recita, suivie de la litanie de la Vierge et le culte de
la vénération de Marie; recueillis et agenouillés, nous répétions la prière
après lui: il chantait à voix basse, sa tête enveloppée par son capuchon, penché
vers la terre, ses yeux fermés, comme s’il était un ange transporté par l’Esprit
vers le ciel… au moment de notre départ, l’ermite s’est mis debout avec
modestie et délicatesse sans pareil, aux regards dirigés au-delà du cosmos, aux
mains croisées sur
sa poitrine, bredouillant les mots "Que Dieu vous accompagne". Je me
rappelle que Chikri ne cessait de parler de l’ermite disant: "Ces dévots ermites
sur les cimes des montagnes constituent le secret du Liban dans leur pureté et
bonté".
5- Charbel se comportait avec
simplicité
"Un jour, je l’accompagnais alors qu’il portait sur son dos des
arbrisseaux épineux pour en faire une haie à entourer la vigne; il vit par terre
une tout petite enveloppe de bloque de papiers des cigarettes, qui porte l’image d’un
chevalier; après quelques pas, il retourna et revient la ramasser; dès qu’il
arriva à l’ermitage, il déposa l’enveloppe à côté d’autres images et s’est
agenouilla pour prier. Je lui dis: "Qu’est-ce que tu fais?" Il me répondit: "C’est Saint
Georges, et je le prie devant son
image". Je lui répondis en riant: "C’est l’enveloppe de papiers de
cigarettes". Il me l’a remis pour la jeter".
B: Charbel,
l’apôtre (Mc 4,18; Mt 10)
I- Présentation
1- Les funérailles
"Quand on lui adressait un faire part de décès des villages",
"voisins, il participait au
funérailles bien volontiers pour exécuter l’ordre de l’obéissance";
"arrivé sur le lieu, il se dirigeait directement à l’Église, tandis que le
supérieur accompagné des moines passaient tout d’abord à la maison des parents
du décès pour escorter le cercueil à l’Église",
"une fois la prière funéraire terminée, il retournait vite à l’ermitage sans
manger… et si on lui offrait d’argent, il le mettait dans sa poignée sans rien
regarder et la présentait au supérieur".
2-Les messes
"Si le supérieur l’ordonnait à célébrer la messe aux fermiers-associés,
les dimanches et les jours des fêtes, il obéissait et retournait au couvent sans
parler avec personne".
3- Ministères (Ac 26,17-18)
"Père Charbel n’était ni curé de paroisse ni missionnaire; mais chaque
fois que l’occasion se présentait pour servir les âmes, il y répondait avec
réjouissance. Parfois il confessait ceux qui le lui demandait de ses confrères,
les moines, les prêtres, des hommes selon ce que m’ont raconté quelques uns. Ses
directives étaient qualifiées d’utiles et d’extrêmement salvifiques. Quand on
l’appelait à visiter les malades et les attristés, il faisait de son mieux pour
consoler les parents et les inviter à s’abandonner à la
volonté de Dieu",
"en priant pour eux et pour leurs malades",
"priant également pour les bienfaiteurs et les pécheurs, les portant tous dans
ses messes. Il ne préchait pas, mais il prodiguait ses conseils et ses
directives à qui le lui demandait".
II- Récits et événements
1- Joie et allégresse
"Un jour, l’ermite, le Père Makarios m’appela; en ce temps-là j’étais
encore laïc, résidant à Al-Ouwaini, près de l’ermitage. Quand j’y suis
arrivé, je vis un homme de Bqaakafra, le frère du Père Charbel, accompagné de sa
femme, venus pour visiter et baptiser leur enfant. Père Charbel s’est entretenu
seulement pendant trois minutes avec son frère, refusant systématiquement de
communiquer avec sa belle-sœur, pourtant, la dernière était tout contente malgré
le refus de l’ermite de la voir; c’est que tous les parents du Père Charbel
ainsi que sa famille qui était une famille Sainte et cherchait la sainteté à son
exemple. L’enfant de qui je fus le parrain, fut baptisé par le Père Makarios en
l’absence du Père Charbel. Après une longue période, sa belle-sœur est revenue
en visite à l’ermitage; en passant par la route de Al-Ouwaïni, elle m’a vu alors
j’étais
devenu prêtre, et me dit: "votre filleul qui est décédé, me disait avant sa
mort, "amène-moi chez mon oncle, le Père Charbel, pour le voir". Je me suis
attristé et j’ai pleuré; alors, elle me dit : "Bienheureux lui, il est au
ciel". Elle le dit sans une seule larme".
2- Il a refusé de
baptiser
"Une fois, ma mère a porté mon frère Boutrous pour le faire baptiser par
son oncle, l’ermite, Charbel. Il n’a pas voulu la recevoir, lui adressant
quelques mots par derrière la porte fermée sans qu’elle pût le voir; il a aussi
refusé de baptiser l’enfant qui a reçu son baptême des mains de l’autre ermite,
compagnon du Père Charbel. D’ailleurs, il n’a pas permis à ma mère, et
à sa
cousine germaine, d’entrer à l’Église pour participer à sa messe; plutôt, elle
l’a suivie à partir d’une lucarne, pratiquée dans la porte fermée de l’Église".
3- Baptisez-les (Mt 28,19)
"Je soussigné, le Père Charbel de Bqaakafra, avoir baptisé
Mikhaël, fils de Rouphaël Rizqallah Al-Chababi, le 8 Décembre 1873".
"Boutros, fils de Challita, de Bqaakafra, de qui le parrain est Mikaël
Al -Khoury de Chakhnaya, a reçu le Saint baptême de mes mains, le 7 Septembre
1887. Fait par le Père Charbel, l’ermite".
4- Guérissez les malades (Mt 10,8)
"Une fois, le patriarche Boulos Massaad donna un ordre qu’on envoyât le
Père Charbel aller à Ftouh Kesserwan"
"à Ghadress"
"pour prier et bénir les fils malades du dignitaire, Salloum Al-Dahdah; ce
dernier avaient 5 garçons dont 3 sont morts d’une tuberculose et les 2
survivants en étaient
atteints. Leur Père a sollicité le supérieur de lui envoyer le Père Charbel pour
passer chez lui un certain temps afin de prier pour ses enfants et les guérir.
Il y est allé, accompagné du Père Youssef Al-Kfouri et du frère Boutros de
Mechmech"
"et Abdallah Youssef Aoun"
"ils ont demeuré environ un mois chez le dignitaire susdit; dès son arrivée,
Père Charbel a demandé qu’on évacuât les femmes de la maison pour y rester. Il
n’a quitté la demeure du dignitaire sus-mentionné qu’après la guérison des deux
malades"
"au bout d’un mois environ. Après son retour à l’ermitage, je me suis présenté
chez lui pour lui demander exprès: "comment ça va? Qu’avez-vous
trouvé en
route?" Il me répondit: "Je suis allé d’ici jusque là-bas et je suis revenu
de là jusqu’ici".
5- De se convertir à Dieu (At 20,21)
"Une année, et à l’occasion de la semaine Sainte, le Père Élias de Mechmech, supérieur du couvent Saint
Maron de Annaya, a envoyé Père Charbel, à Mazraat Kfarbaal, où il y avaient les
fermiers-associés du couvent, pour les aider à accomplir leurs devoirs
spirituels pendant le carême, étant donné que leur curé ne jouissait pas des
connaissances théologiques; il a accepté, bien volontiers, passant toute une
semaine à servir par obéissance".
6- J’accomplis le ministère que j’ai reçu du
Seigneur (At
20,24)
"Je sais qu’il menait une vie angélique se souciant de ses devoirs
sacerdotaux dont il s’acquittait avec une exactitude extrême; Il ne parlait avec
aucun des moines, sauf s’ils lui parlaient, alors ils leur répondaient. Je ne me
rappelle pas l’avoir vu commencer une conversation. Il passait son temps entre
l’Église et le travail du champ; malgré qu’il fût prêtre, il ne faisait rien à
propre initiative, mais il attendait l’ordre du responsable des travaux
champêtres; au cas où ce dernier s’absentait, il demandait la permission à
n’importe quel frère ou domestique. Il ne demandait pas de sortir du couvent
pour un ministère paroissial ou un autre travail. Une fois, il a célébré la
messe à Kfar Baal, quelqu’un lui donna de l’argent qu’il mit dans sa main; une
fois au couvent, il le remit au supérieur en lui disant: "Prenez cet argent
qu’on m’a donné".
7- Il nous demandait de lui copier des
amulettes
"Père Charbel nous demandait, à moi et à mon frère Mikhaël,
devenu plus tard moine, de venir chez lui les Dimanches, pour lui copier des
amulettes des Saints Antoine et Cyprien pour les offrir à ceux qui les demandait
pour les mettre chez eux et sur leurs vers à soie, comme bénédiction. J’ai
continué à le fréquenter pendant 4 ans, où j’avais à ce moment-là environ 18
ans".
8- Ils accouraient vers lui (Mc 3,9-10)
"Quand il arrivait dans un village pour participer à des funérailles, il
se dirigeait tout de suite à l’Église où il restait pour que tout le monde en
soit sorti, après quoi il revenait tout de suite au couvent. Faut-il parler de
l’empressement des gens autour de lui et leur estime pour lui? Dès qu’ils
pressentaient son arrivée, ils se précipitaient vers lui pour leur bénir
l’eau".
9- Ma nourriture, vous ne la connaissez pas
(Jn 4,32)
"Une fois, il a accompagné les moines pour participer aux funérailles
dans le village de Mechmech. Après l’enterrement, les parents du mort ont invité
les Pères au déjeuner à l’exception du Père Charbel qu’ils connaissaient
réticent et préférait rebrousser chemin vers le couvent".
10- Le banquet de la
charité
"Une fois, Père Charbel a reçu l’ordre du supérieur de venir célébrer la
messe aux habitants de Kfar-Baal. Mon grand-père lui demanda de présenter la
messe à l’intention de ses morts; cette sollicitation fut acceptée par Père
Charbel. Après la messe, mon grand-père a enfoui une somme d’argent dans un
mouchoir qu’il lui présenta; dès que Père Charbel connut qu’il contenait de
l’argent, il le refusa et lui dit: "donne-le, toi-même directement au
supérieur".
11- Jeune, lève-toi ! (Luc 7,14)
"Mon Père atteint de typhoïde, suivait un traitement chez les personnes,
réputées par
leurs connaissances médicales. Son mal s’est tellement aggravé qu’ils ont perdu tout espoir de
le guérir et arrêtèrent le traitement";
"il perdit connaissance et entra en agonie".
"Ses frères et les parents ont eu recours au supérieur",
"Père Élias de Mechmech"
"afin d’envoyer Père Charbel pour prier à côté de lui; le supérieur a satisfait
leur sollicitude, et Père Charbel est venu chez nous"
"la nuit";
"des hommes et des femmes étaient réunis à la maison; dès que les femmes ont su
qu’il arrivait, elles ont quitté la maison à l’exception de ma mère qui s’est
couverte d’un drap. Une fois entré, il appela 3 fois mon père par son nom,
disant: "Richa". Mon Père ouvrit les yeux; Père Charbel ajouta: "N’aie
pas peur". Il aimait mon père qui lui servait la messe au besoin. Il a
prié
et béni l’eau dont il a aspergé mon père et lui en a donné
à boire. En sortant, il dit: "Il n’y a plus rien à craindre". En effet,
mon père reprit connaissance, mangea et but. Peu après, il s’est remis
complètement et quitta sa couche".
12- Donnez-lui à manger (Mc 5,43)
"Une fois, mon oncle, le médecin, Najib Beik Al-Khoury, atteint de la
typhoïde se mourrait. Mon grand-père qui était médecin, croyait que la situation
de mon oncle était grave et inguérissable. Ma grand-mère envoya quelqu’un auprès
du Père Charbel lui demandant de venir le bénir, espérant qu’il le guérira. Père
Charbel dit à l’envoyé qu’il viendrait la nuit. L’envoyé lui expliqua que
le malade était entré dans une phase très grave et qu’il ne fallait pas tarder;
il répondit: "nous irons immédiatement, mais je ne veux pas qu’on me
voie".
"Il ne voulait pas attirer l’attention des gens sur lui par humilité".
"Quand il est arrivé, la fièvre était déjà très élevée et il a perdu
connaissance. Après avoir prié Père Charbel prit un mouchoir, trempé d’eau, et
le lui passa sur le front, sur le coup, il ouvrit les yeux",
"après quelques jours de perte de connaissance, et prononça deux mots: "Père
Charbel".
"Sa mère lui dit: "Embrasse-lui la main".
"Père Charbel s’adressa à ceux qui étaient présents, en leur disant:
"Glorifiez Dieu, le malade a guéri";
"donnez-lui à manger". Ils ont hésité vu que l’enfant était atteint de
typhoïde suite de laquelle les gens croyaient que la nourriture pouvait causer
la mort du malade; mais Père Charbel a insisté de lui donner à manger;
puis il repartit. Alors on lui présenta le repas; il en mangea et se reprit peu
de temps après; son Père qui est, mon grand-père, revint à la maison; on lui
rapporta ce que Père Charbel a effectué. Il reprit: "Plus de chance; puisqu’il a
mangé, on
n’a plus d’espoir". Mais l’enfant a guéri, grandi et est devenu médecin; il a
vécu jusqu’à l’âge de 85 ans. Il a soigné plusieurs fois Père Charbel de son
vivant".
13- Talite, lève-toi (Mc 5,41)
"Une autre fois, Père Charbel fut convoqué pour bénir Gerges Jibraël, de
mon village, Ehmej, atteint d’une grave maladie. Sur l’ordre du supérieur, il
est allé passer une nuit chez lui dans la prière. Dieu l’a guéri grâce à la
prière du Père Charbel".
14- Prier pour eux (Mc 6,5)
"Je me rappelle qu’une fois les sauterelles envahirent la région; entre
autres Ehmej. Les gardiens champêtres se groupèrent au couvent sollicitant le
supérieur de leur envoyer Père Charbel afin de prier sur les sauterelles pour
les éloigner. Il bénit l’eau, en aspergea les sauterelles qui s’éloignèrent. En
même temps, il y avait dans le village des malades dans une maison atteints de
fièvre typhoïdique; on a demandé au Père Charbel de venir les bénir; il répondit
qu’il ne pouvait pas y aller sans l’autorisation du gardien, car le supérieur
le lui confia; le gardien répondit: "Comment puis-je t’ordonner alors que tu
es moine?!" Père Charbel dit: "Le supérieur m’a confié à toi; et je t’obéis;
je vais là où tu m’ordonnes". Alors le gardien l’ordonna d’y aller avec lui
pour prier sur eux".
15- Lazare est mort! (Jn 11,14)
"Une fois, mon grand-père paternel, Boutros Saba Al-Khoury, qui
pratiquait le métier de médecin (selon les traitements populaires, sans
autorisation), fut appelé à Amchit pour soigner un malade, unique dans la
famille d’un des dignitaires de Amchit , du nom de Jibraël Sleiman Abbas. Mon
grand-père y passa 4 ou 5 jours s’efforçant de soigner le malade, usant de tous
les moyens. Quant il a désespéré de sa guérison, il envoya un messager à son
fils – qui est mon père – pour lui dire: "va à l’ermitage des Saints Pierre et
Paul et demande à l’ermite, Père Charbel de t’accompagner à Amchit pour prier sur le malade". Mon père agit
immédiatement et y arriva l’après-midi, expliquant à Père Charbel la mission
dont il fut chargé. Au début, il hésita, puis il accepta à condition d’avoir
l’autorisation du supérieur, Père Élias de Mechmech. Après l’approbation du
supérieur, Père Charbel prit sa lanterne pour l’allumer en chemin, car il ne
quitta pas son ermitage qu’après la tombée de la nuit pour ne voir personne et
ne soit vu de personne; c’était son habitude durant toute sa vie d’ermite. Il a
préféré marcher à pied, en disant à ses compagnons, le Père Maron de Mechmech,
le Père Élias de Mahrin et l’ânier:
"J’ai peur de tomber si je monte à dos de l’ânesse, car je n’en ai pas
l’habitude. Après une longue distance traversée, il dit: "allons
nous acquitter de l’obéissance à l’ordre donné". Arrivés à un endroit
au-dessus de Mahrin, Père Charbel s’arrêta stupéfait: il
lui demanda: "Qu’est-ce qu’il y a? Hâtons-nous". Il répondit à mon père, qui le
dépassait non moins d’une distance de 20 mètres, monté à dos de son
cheval: "Ecoute! Ecoute! Ils disent qu’il est mort!". Alors, mon
père arrêta son cheval et lui dit: "avec qui parlez-vous, Père Charbel?" Le Père
répéta: "Ils disent qu’il est mort". Mon Père lui répliqua: "Pourquoi
dites-vous cela? Avec qui parlez-vous" A ce moment-là il s’adressa à mon Père en
lui disant: "Récite l’Angélus. Prions pour l’homme, car il est mort!"
Puis, il s’agenouilla et commença à prier. Alors, mon père, tout troublé, fit le
signe de la croix et descendu du dos de son cheval s’approchant du Père Charbel,
avec recueillement extrême et secoué d’une émotion sans pareil pour le prier
maintes fois de poursuivre sa marche, après avoir marqué
l’heure à laquelle il dit les paroles sus-indiquées. Père Maron dit à Père
Charbel: "Continuons notre marche, par obéissance à l’ordre du supérieur". Après
une brève hésitation, Père Charbel accepta, après que mon père lui eut fait
comprendre les difficultés qu’il pourrait rencontrer en chemin de retour, à
cette heure tardive de la nuit. Donc il poursuivit son chemin à pas lents et
hésitants – comme on le dit selon le proverbe libanais populaire: un pas en
avant, un autre en arrière. Il répétait: "Il est inutile d’y aller. Il n’est
plus nécessaire de continuer la marche, car la mission pour laquelle le
supérieur nous a donné l’ordre de nous acquitter est terminée, car le malade est mort". Mais vu que mon
grand-père avait demandé immanquablement la présence du Père Charbel d’un côté,
et de l’autre l’incrédulité de mon père concernant le décès du malade, insista à
ce que l’ermite continuât la marche. Et voilà; arrivés à quelques 500m de la
maison du malade, ils entendirent des cris et des pleurs. En vérité, le malade
est décédé. A ce moment-là, mon père commença à questionner Père Charbel sur sa
capacité de savoir la mort du malade alors qu’ils étaient à une heure et demie
de marche
de Amchit , d’où l’on ne pouvait ni
entendre des sons ni voir le village; mais Père Charbel ne répondit pas,
continuant sa prière. Arrivés à la maison, mon père se renseigna sur l’heure du
décès qui coïncida avec le moment où Père Charbel s’arrêta en route pour dire:
"Ils disent qu’il est mort!" Alors, mon père leur raconta ce qui s’est
passé en route et les assistants s’étonnèrent et regrettèrent de ne pas avoir
appelé l’ermite plus tôt. Cette nouvelle s’est répandue dans Amchit et sa localité. Mon père a raconté cette
nouvelle une vingtaine de fois, devant moi et devant d’autres parmi lesquels:
des prêtres et des dignitaires. Suite à cet événement les habitants de Houjoula,
de Bachtilda et de Aalmat, tous des musulmans Chiites, venaient chez Père
Charbel pour les bénir, et lui amenaient leurs malades, sollicitant auprès de
lui la guérison. Quant à Père Charbel, je n’ai jamais entendu les gens dire
qu’il a parlé de cet événement ou d’autres qui s’accomplissaient par son
intercession et dont parlaient les gens".
16- Le malade est mort
"Youssef, fils d’Élias Antoun, du village de Mechmech, a été
atteint d’une grave maladie. Les parents du malade demandèrent au supérieur de
leur envoyer Père Charbel pour prier sur lui. Il y est allé par obéissance.
Arrivé au milieu de la route, il s’arrêta silencieusement stupéfait environ 5
minutes, puis dit au messager: "Je reviens à l’ermitage";
"à quoi bon d’aller à Mechmech alors que le malade vient de rendre l’âme
maintenant".
"Or, le malade est décédé à la même heure où Père Charbel à rebrousser chemin".
17- Les Musulmans Chiites ont accouru
(Jn
4,39-42)
"Je me rappelle qu’une fois les sauterelles envahirent les propriétés du
village de Tourzayya, divisé en deux quartiers: l’un habité par des Chrétiens,
l’autre par des musulmans Chiites. Les Chrétiens et les fermiers-associés du
couvent vinrent chez Père Charbel et lui dirent: "nous vous prions, aidez nous".
Ils les envoyèrent auprès du supérieur qui l’ordonna d’accompagner les
habitants. Alors, il bénit l’eau et l’aspergea, assisté par un
autre moine. Les sauterelles se dirigèrent vers les propriétés des musulmans
Chiites qui accoururent vers Père Charbel le priant d’éloigner les sauterelles
de leurs terrains; il continua à asperger leurs propriétés d’eau bénite. Les
sauterelles abandonnèrent toute la zone qui fut aspergée d’eau bénite".
18- Il n’y a que Père Charbel qui peut bannir
cette calamité
(Mc
4,35-41)
"Un de mes parents à Ehmej, Sassine Al-Khoury, me raconta que les
sauterelles par myriades envahirent la région du temps où Père Charbel était à
l’ermitage, et dévastèrent l’ensemble des semences et des arbres de Aalmat,
village proche de Ehmej. Tout le monde répétait: "Il n’y a que Père Charbel qui
peut bannir cette calamité". Jibraël Sassine, se hâta auprès de lui; et le voilà
qui bénit l’eau, sortit de l’ermitage et l’aspergea en direction de Ehmej. De
retour de Jibraël à Ehmej, il trouva que les sauterelles prirent une autre
direction. Ses semences furent épargnées".
Je me rappelle aussi qu’une fois, les sauterelles envahirent la région, entre
autres Ehmej. Ses gardiens champêtres demandèrent au supérieur d’autoriser Père
Charbel et de les accompagner pour éloigner d’eux les sauterelles. Il bénit
l’eau, en aspergea les sauterelles qui s’éloignèrent de ses terrains.
C: Travail et
prière
I- Présentation
"Le novice doit être silencieux, calme et dynamique dans son travail. Il
ne se choisit pas le travail facile ni les bonnes choses, pour laisser aux
autres les mauvaises. Il se procure des choses mauvaises et aux autres les
bonnes… ceci doit le faire humblement; acceptant les ministères et les besoins
les plus inférieurs au couvent… pour se libérer de son amour propre sans
lequel l’enfer ne serait pas existé";
"c’est pourquoi, il n’avait pas de ministère au couvent, sinon la messe, la
prière et le travail au champ; il s’adonnait, en particulier, à ramasser les
pierres pour construire des murs de soutien aux lopins, les préparant au
cultivateur".
"Avant son entrée à l’ermitage, il aidait le chevrier à garder les chèvres, à
les paître et s’en occuper".
"Il ne connaissait l’oisiveté, mais toujours laborieux dans ses prières et ses
actions spirituelles. Il ne parlait guère, silencieux",
"il abhorrait le repas, fuyait le sommeil, se passionnait pour les
mortifications et le travail".
"Toute sa vie monastique, 50 ans environ, se résume en prière, travail et
silence";
"il besognait avec les frères et les domestiques dans le champ et la vigne;
pourtant il était vertueux et respectueux, assidu au travail jusqu’à ce que la
cloche sonnât pour la prière; alors, il demandait congé au frère, responsable du
travail, ou bien au domestique en cas d’absence du frère responsable, attendant
de lui permettre de retourner à l’église pour l’office de prière".
"Il s’agenouillait sur les cailloux pendant l’office de prière".
"Il œuvrait ardemment et amour, ne regardant pas autour de lui et sans
repos. Il poursuivait son travail en attendant que son compagnon le
congédiât. Ses
mains étaient caleuses à force du travail",
"pourtant quand il souhaitait prendre un bol d’air, il allait ramasser les
cailloux dans la vigne;
je ne le voyais que travailler dans la vigne de l’ermitage ou dans le champ"
"comme s’il était condamné aux travaux forcés"
"comme une machine qui ne cesse pas de faire; il y mettait tout son cœur; et
s’il s’arrêtait, c’était pour faire le signe de la croix à maintes reprises,
priant sans interruption pendant sa besogne".
"Quand le domestique du couvent lui demandait de transporter ailleurs la
charrue, il exécutait sur le champ".
"Il n’était pas réticent au travail, faisant froid ou chaud; et quand on
l’ordonnait de transporter une charge d’arbusseaux épineux ou autres objets, il
portait autant qu’il pouvait et en superflu, sans dire que ceci est lourd ou
léger".
II- Récits et événements
1- Comment passait-il sa
journée ?
"Il disait sa messe tôt le matin, et se dirigeait sans s’attarder au
travail après avoir reçu l’ordre du supérieur ou du responsable du travail. Il
allait à son boulot dans un champ proche ou loin ou bien à la vigne, sans parler
avec personne en route, ne regardant ni à droite ni à gauche. Si quelqu’un le
saluait en disant: "gloire à Dieu", il répondait: "Que Dieu vous
bénisse". Sitôt arrivé au lieu du travail, il prenait sa pioche et
commençait sa
besogne énergiquement et avec amour, comme s’il était un domestique bien payé
qui cherchait à augmenter son salaire. Qu’importait pour lui si le responsable
du travail était prêtre, frère ou domestique: tous représentaient pour lui
l’autorité établie par Dieu. Si les autres s’assayaient pour se reposer, boire
de l’eau fraiche et s’amuser à échanger des propos, lui, il se tenait
à
l’écard,
sans parler ou boire, attendant la reprise du travail avec impatience; si
l’obéissance ne l’obligeait pas au repos, il ne reposerait pas. Les moines et
les domestiques le vénéraient, respectaient ses vertus et évitaient de tenir des
propos oiseux devant lui; si le responsable du travail restait au champ à une
heure tardive, de son côté, Père Charbel poursuivait son boulot avec les mêmes
efforts dont il a débuté, même son zèle augmentait tout au long de la durée du
travail, sans avertir le responsable du retard; c’est que, comme je l’ai déjà
dit, il ne protestait contre rien que ce soit; si le responsable tardait à
appeler Père Charbel et les autres moines à déjeuner, il ne s’agitait pas, et ne
disait jamais qu’il auvait faim ou bien qu’il était fatigué. Ces termes ne lui
venaient jamais à l’esprit. Qu’il fît chaud pendant la moisson ou froid en
hiver, il n’enlevait jamais son capuchon. Il ne s’intéressait pas aux
conversations profanes et aux propos de l’actualité; il ne se souciait pas à ce
qui se déroulait dans le pays ou dans l’Ordre des sujets se rapportant à
l’administration; plutôt tout son intérêt se concentrait sur son travail pour
accomplir l’obéissance, quant au reste, il le confiait à la Providence; c’est
pourquoi j’ai dit de lui qu’il se distinguait des autres moines; de même, il
fuyait les femmes et la fréquentation mondaine; et comme tout le monde
connaissait son tempérament, on l’évitait et on s’éloignait de lui, par respect
à ses vertus".
2- Il accourait à l’Église pour prier
(Mt
14,23)
"Père Élias de Mechmech m’appela, il y a 40 ou 45 ans,
pour lui construire un four au couvent de Saint Maron à Annaya; je lui ai
demandé des ouvriers pour m’aider dans la construction, entre autres, Père
Charbel. Il a travaillé avec moi 6 jours, durant lesquels, il fut un exemple de
perfection: dès son arrivée au travail il me demanda: "Que voulez-vous,
maître?" Et je lui, répondis: "des pierres, des petites pierres affûtées, de
l’argile"; il me les transporterait avec labeur et énergie, soulevant les
pierres lourdes sur sa poitrine pour les monter sur l’échafaudage; quant aux
petites pierres affûtées, il les draguait à la main, tellement que le sang lui
coulait sous les ongles. Je lui disais: "Non! non! mon maître, faites attention,
ne vous fatiguez pas autant, allez-y lentement». Il ne me répondait pas, et
continuait son travail pénible. C’est ainsi qu’il a passé avec moi une semaine à
travailler avec ce rythme sans prononcer un seul mot, ne me posait aucune
question, sinon: "Que voulez-vous?" J’avais pitié de lui, et je faisais
de mon mieux pour lui alléger le travail. Pendant que nous nous reposions pour
fumer une cigarette, lui, il accourait à l’Église pour prier".
3- Directement à
l’Elgise
"Comme la panification se faisait la nuit à tour de rôle, ainsi en
était-il de Saint Charbel qui,
comme le reste des frères, il venait le soir au couvent et se dirigeait
directement à l’Église pour y rester jusqu’à minuit en attendant que la pâte
soit fermentée; alors le frère dépensier l’appelait pour aider ses confrères
jusqu'à ce qu’il eût fini de panifier; et c’est alors qu’il revenait à
l’ermitage où il célébrait l’Eucharistie".
4- Il ne laissait pas la moindre
occasion
"Avant son entrée à l’ermitage, il travaillait avec les moines dans les
champs; lorsqu’il venait au couvent pour prendre le repas à ceux qui
travaillaient, il déposait les ustensiles dans la cuisine et s’en allait à
l’Église pour s’y retirer devant le Saint Sacrement, saisissant la moindre
occasion pour la passer soit devant le Saint Sacrement, soit au travail".
5- Quoiqu’on lui donnât à travailler, il était
silencieux (Mt 5,11-12
et 41)
"La majorité des moines responsables au couvent étaient de Mechmech,
seul Père Charbel était de la région de Jebbé (Nord). Quoi qu’on lui donnât à
travailler, il était silencieux, et ne disait "non" à personne ni ne se
plaignait; personne d’entre eux n’avait pitié de lui. Le cuisinier, Francis,
frère du supérieur, le faisait travailler durement, tout en le grondant; Père
Charbel lui obéissait, comme son obéissance à son supérieur, malgré qu’il soit
prêtre et l’autre un frère convers. Dès qu’il revenait du champ, chargé d’un
lourd fardeau de bûches, le dos courbé, frère Francis l’ordonnait d’assurer
l’eau et un autre boulot. Une fois, on lui a donné l’ordre d’arroser les plantes
du tabac au moyen d’un seau: il a tellement porté des seaux d’eau toute la
journée que la peau de ses mains s’écorcha".
6- Les pierres lui touchaient la
peau
"Un jour au champ, je le chargeais de pierres directement sur le dos,
sans utiliser une étoffe en serpillière protectrice. Il a poursuivi ainsi
jusqu’à ce que son habit et sa chemisette eussent été déchirés et que les
pierres touchassent la peau. Je m’apitoyais de lui, car il était prêtre. Il est
allé chez le supérieur et lui dit docilement et à voix basse: "Regardez mon
habit". Le supérieur ordonna de lui donner un habit".
7- Il s’en acquittait avec joie et
patience
"Je l’ai vu porter un fardeau de bûches et des pierres dans une hotte
sur son dos. Il piochait et travaillait jusqu’au soir dans la vigne sans se
reposer ni abandonner le travail que lorsque son compagnon l’appelait à manger
ou à effectuer une autre besogne. Si son assistant au travail l’ordonnait à
porter un fardeau qui dépassait sa force, il ne s’agitait pas; si on lui
confiait une œuvre pénible il s’en acquittait avec joie et patience, sans
maugréer ni se mécontenter; il ne réagissait ni se dérober, travaillant tout en
cachant sa tête d’un capuchon qui lui descendait jusqu’aux yeux; il ne le
soulevait, même pas, pour essuyer sa sueur".
8-
Que voulez-vous que je travaille?
"Il était un moine de travail, de prière et de silence";
"personne n’entendait sa voix; et nous, les fermiers-associés qui travaillions
avec les moines au champ, nous ne nous rappelons pas l’avoir entendu prononcer
un mot, sinon: "Que voulez-vous que je travaille?" Termes qu’il disait
debout, bras croisés devant le responsable du travail, tête penchée et à voix
basse".
"Quand le moment de la prière arrivait, il s’agenouillait sur place et priait,
ne se livrant pas de toute sa vie à la distraction et au repos".
9- Il fait le signe de la
croix
"Le don de soi consiste à faire
le signe de la croix, chaque fois que tu commences un travail; puis offre cette
besogne à Dieu
en disant: "Mon Seigneur et mon Dieu, je vous fais don de mon cœur et de mon
âme ainsi que ce travail; mon Dieu, donnez-moi la force de l’accomplir selon
votre volonté et qu’il soit offert pour satisfaire à la gloire de votre
divinité".
Sur ce, "quand il allait avec nous, les novices, pour travailler au champ, il le
faisait comme s’il l’un de nous, faisant de temps en temps le signe de la croix,
conservant profondément le silence; il ne m’adressait aucune parole, ni à moi ni
à d’autres; quand on le questionnait à propos de quelque chose, il répondait par
oui ou non, ou bien brièvement, selon sa coutume. Il peinait beaucoup dans le
travail au champ, sans se soucier du repos de son corps".
D: La pauvreté de Charbel
(Mc 10,21)
I-Présentation
1- Pauvreté matérielle
"Pourquoi l’homme court à la recherche de l’or? Pour se donner de la
valeur? Mais l’homme est beaucoup plus cher que l’or, il est le fils de Dieu et
sa valeur réside en lui-même";
d’où "il conservait méticuleusement la vertu de la pauvreté".
"Le moine ne doit rien avoir en possession";
"sa main n’a jamais tenu de bon gré de la monnaie, en argent ou en or. Il se
servait des choses les plus viles, ne permettant pas de les négliger,
méprisables qu’elles soient, pour observer le vœu de la pauvreté. En somme, il
était pauvre dans son manger",
"son boire et ses vieux habits élimés; pauvre par ses mains caleuses par le
travail, refusant d’être
désigné, un
jour, dans une fonction stable; il renvoyait le tout aux responsables",
"tout en portant jalousement le soin aux possessions du couvent"
"pour n’en rien jeter, minimes ou considérables qu’elles soient",
"jusqu’à la tige des légumes, et s’il voyait un grain de raisin sous un cep ou
bien une miette sur la route, il les ramassait et les mettait dans la cuisine.
L’Ordre n’a jamais rien dépensé
pour lui acheter un habit nouveau, à sa demande; ses habits étaient toujours
usés, ne portant que de ce que ses frères ne s’en servaient plus";
"il était aussi pauvre qu’un mendiant; même un pauvre n’aurait accepté son
manger, sa couche et ses habits";
"il considérait tous les biens du monde comme de la poussière piétinée".
2- Pauvreté intérieure
"Il vivait dans la pauvreté extrême",
"dépassant en cela celle des gens les plus besogneux. En effet, il menait
l’apparence d’une pauvreté sans pareil; mais la véritable pauvreté résidait dans
son apparence d’imbécile apathique malgré sa richesse en dons divins, en ses
vertus sublimes",
"il était détaché de ses parents à qui il n’a jamais rendu visite, de toute sa
vie, de qui il n’a jamais parlé ni demandé de leurs nouvelles; quand son frère
venait chez lui une ou deux fois par an, il ne le rencontrait que pour peu de
temps et à l’ordre de son compagnon. Il se désintéressait de sa volonté, non
seulement concernant ce qui stipule la règle, mais dans toutes choses, c’est
qu’il était dépouillé de la volonté. Malgré l’intelligence dont il jouissait, il
ne laissait rien apparaître de sa sagesse, ni en paroles ni dans l’expression
écrite. Il n’a jamais prononcé l’un des termes suivants: "ceci est pour moi,
cela est pour nous ou pour le couvent". Moi, je compare Père Charbel à un ombre
qui l’accompagnait à l’Église, au travail, au manger et aux autres besognes
monastiques, fantôme dont il ne laissait aucune trace le pénétrer. Tandis qu’il
effectuait, de toute force, n’importe quel travail ou prière qu’il élevait avec
pleine ferveur à l’Église, il arrêtait tout cela dès que son compagnon l’eut
ordonné de le faire pour s’acquitter de la nouvelle besogne demandée, comme une
ombre qui marche à côté de sa source. Il était ermite, mais sa volonté et sa
raison étaient manipulées par son compagnon; là, c’est l’absolu du dénuement";
"il n’était riche que dans son amour pour Dieu";
à part cela, "rien ne pouvait indiquer son existence dans le monde".
3- L’observance du temps
"Il ne perdait pas le temps dans l’oisiveté; autant qu’il pouvait, il
priait pour les besogneux et ses morts, évitant de paresser pour ne pas tomber
dans les pièges du démon".
"Donc il était très attentif au temps et ne laissait aucune occasion, minime
qu’elle soit, sans faire une besogne dont l’Ordre pouvait profiter",
"et en tirer son gain pour la vie éternelle sachant pour sûr que le temps nous a
été donné pour nous sanctifier";
"quand il n’avait pas de travail à accomplir, il s’adonnait à la prière et à la
méditation",
"d’un cœur libre de tout attachement aux choses du monde".
II- Récits et événements
1- Prenez cela
Quand il participait aux funérailles et qu’on lui donnait de l’argent, il le remettait au
supérieur dès son arrivée au couvent en lui disant textuellement:
"Prenez cela"; ce qu’il portait, c’était ou bien une livre ottomane
ou bien des piastres ottomanes (toutefois on offrait à tous les
prêtres 3 piastres ottomanes, tandis qu’au Père Charbel on donnait une livre);
pourtant il ne savait pas distinguer la monnaie; s’il ne trouvait pas le
supérieur dans sa chambre, il la mettait sur un plateau en osier sous sa couche.
Une fois, Jibraël Lahoud de Amchit était au couvent de Annaya; il rencontra,
dans le corridor, Père Charbel à qui il a demandé de dire une messe à son
intention et lui a donné une livre ottomane; il la prit et attendit que l’homme
s’éloigna de la chambre du supérieur chez qui il entra racontant ce que Jibraël
lui a demandé et disant: "prenez cela". Le supérieur répliqua: "laisse-la
avec toi et dis la messe". Père Charbel dit: "Quant à la messe, elle est
notée sur le cahier du couvent, mais cela je ne la laisse pas avec moi,
prenez-la". Le supérieur prit la livre".
2- Prenez ce diable loin de
moi
"Père Charbel accompagna les moines du couvent pour répondre à un
faire-part de décès; chacun d’eux a reçu 3 piastres ottomanes; de retour, Père
Charbel a voulu donner ces piastres au supérieur qui lui dit: "garde les avec
toi, peut-être aurais-tu besoin d’acheter un mouchoir ou autres choses". Il
obéit à l’ordre du supérieur. Mais, le soir, ne pouvant plus les garder sur lui,
il les porta auprès du supérieur, en lui disant: "Prenez-les, car je ne
veux pas laisser ce démon chez moi".
"Un homme lui demanda de lui dire une messe et lui offrit une piastre
ottomane; et comme son habitude, il la prit au supérieur, le Père Roukoz de
Mechmech
qui lui dit: "Laisse-la avec toi". Par obéissance, il la ramena à l’ermitage, la
déposant sur une planche dans sa cellule et l’oublia. Après un certain temps, il
la retrouva par hasard, la prit chez le supérieur et lui dit: "Mon Père,
prenez ce démon maudit, loin de moi".
3- Donne-les au Père
Makarios
"Je vais raconter un épisode qui se déroula avec moi en juillet 1898,
alors que j’étais au couvent Saint Antonios à Kozhaya, où Père Antonios
Alwan qui venait de prononcer ses
vœux récemment, y résidait".
"Après mon départ du couvent, je me rappelle avoir parlé à un parent à moi des
vertus du Père Charbel; ce dernier a bien voulu lui envoyer de l’argent pour
dire une messe à l’intention du frère
Antonios Alwan; en fait, il m’a donné 1/4 de majidi (livre ottomane) pour les
lui envoyer. A mon tour, j’ai confié cette mission aux soins du Père Youssef
Al-Hasrouny, lui demandant de livrer cette somme directement au Père Charbel à
l’intention du frère sus-mentionné".
"Père Youssef Al-Hasrouny a raconta que lorsqu’il est allé à l’ermitage, il a
rencontré Père Charbel et lui a dit: "Veuillez prendre cet argent pour dire une
messe à l’intention du frère Antonios de Aïto. Il m’a répondu: "Donne-le au
Père Makarios". J’ai répliqué: "L’intéressé m’a demandé de vous le donner en
main",
"et donc je ne peux pas le remettre à d’autres". Alors, il fit un geste le long
de sa main, fermant les yeux, la tête penchée; et j’ai mis l’argent dans la
paume de sa main. Sitôt fait, il se dirigea vers Père Makarios, l’appelant d’une
voix inhabituelle hors de l’Église, en disant: "Père Makarios! Père Makarios!
Prenez cet argent", sa main toujours tendue loin de lui comme s’il portait
un scorpion et lui versa la somme sans la regarder ou savoir son montant".
"Si l’un des visiteurs voulait lui offrir de l’argent comme vœu à
l’ermitage, il lui répondait tranquillement, sans regarder ni l’argent ni son
montant: "Va chez Père Makarios".
"Aussi, voici un exemple parmi tant d’autres: un jour, un visiteur est venu lui
offrir de l’argent pour qu’il dise une messe à son intention; le visiteur lui a
dit: "Priez pour moi, et voilà, cet argent je vous le donne, à vous
personnellement et non pas à l’ermitage". il répondit: "Mettez-le sur l’autel
avec le vœu, car je n’en ai pas besoin". L’homme qui essayait de convaincre
l’ermite a réussi après beaucoup d’efforts de le lui mettre dans la main et la
lui ferma. Père Charbel est allé directement et a remis la somme à son
compagnon, le Père Makarios, sans la regarder".
4- Vers l’aube
"Une fois, il est venu chez moi – j’étais supérieur en ce temps-là –
vers l’aube et m’a raconté que des visiteurs étaient passés par l’ermitage et
lui ont donné 4 piastres ottomanes lui disant: "Achetez avec cette somme
vos besoins particuliers", me décrivant comment il a
passé toute
cette nuit-là sujet de tentation par l’ennemi du bien pour qu’il garde l’argent
sur lui; et que par la grâce de Dieu, il l’a vaincu. Je
lui ai dit: "As-tu besoin de quelque chose?" Il m’a répondu: "Si vous voulez,
il me faut quelques mouchoirs pour essuyer la sueur et m’en servir
d’essuie-main". Je lui ai donné 4 mouchoirs noirs".
5- Je ne veux pas voir l’argent (Mc 10, 23-25)
"Wardé Hanna Antoune Zaarour, la tante de ma mère, l’épouse de mon oncle
Challita, nièce germaine du Père Charbel, m’a raconté que sa mère possédait un
gobelet en argent que les femmes mettaient sur la tête pour s’en parer. Après sa
mort, sa fille Wardé l’a vendu à 300 piastres, l’équivalent de deux livres
ottomanes en or. Elle porta cette somme à son oncle, Père Charbel, lui demandant
en revanche de dire des messes pour le repos de l’âme de sa mère qui est en même
temps la belle-sœur de l’ermite. Il refusa de prendre l’argent, s’adressant à sa
nièce de l’intérieur de sa cellule et sans voir son visage, en lui disant:
"Donne cette somme au Père Supérieur". Elle lui répondit: "Je voudrais
vous la donner à vous, pour que vous offriez, vous-même, les messes". Il a
répliqua: "Pour les messes, je les note sur mon cahier; mais l’argent je ne
le prends pas. Va le donner au supérieur et ne me laisse pas le voir". Elle
lui obéit".
6- Je vais dire les
messes
"Ma mère est allée à l’ermitage après le décès de son Père Hanna
(frère du père Charbel); elle lui a demandé de dire des messes pour le repos de l’âme de son
père. Il lui a répondu: "Quant aux messes, je vais les dire, mais
l’argent, donne-le au supérieur". Elle a exécuté comme il le lui a
ordonné".
7- Je suis mort à ce monde le jour où je l’ai
quitté (Mt
6,24)
"La cause de notre deuxième visite fut après le décès de mon grand-père,
Hanna Antoun Zaarour Makhlouf, frère de l’ermite, le Père Charbel; le décès eut
lieu le 25 Janvier 1897 ;
et le défunt n’avait pas d’enfants mâles, d’où sa fille ne pouvait hériter que
la moitié de son père; là, les parents paternels se sont intervenus prétendant
que l’autre moitié était de leur droit et que le frère du décès était moine et
ermite, n’ayant pas le droit à un héritage selon la règle de l’Ordre; mais ma
mère a répondu que mon oncle, le père Charbel, est un héritier direct. C’est
pourquoi je l’ai accompagnée au couvent Saint Maron à Annaya, un jour de
printemps, pour le mettre au courant du décès de son père et lui demander de lui
écrire un testament de cession volontaire de sa part dans l’héritage de son
frère. Arrivées à l’ermitage, nous n’avons pas pu nous entretenir avec lui de
tête à tête, mais nous nous sommes mises debout à côté de la porte de l’Église,
et lui, il était à l’intérieur. Il lui demanda ce qu’elle voulait de lui. Elle
lui a fait part de décès de son père et lui demanda un testament écrit de
cession volontaire, lui expliquant que les parents paternels réclamaient la
moitié de l’héritage. Je l’ai entendu lui
répondre: "Ma nièce! Mon frère est mort, il a quelques mois alors que
moi, je suis mort au monde le jour où j’ai pris l’habit et prononcé mes vœux
solennels au couvent Saint Maron à Annaya, il y a 44 ans; le mort n’hérite ni ne
donne en héritage; et donc, ton affaire n’est pas de ma compétence. Je ne peux faire cession de quelque chose que je ne possède
pas". Ainsi, sommes-nous retournées mains vides".
"Ces expressions sont devenues plus tard un signe que les gens se transmettaient
pour désigner le dépouillement du Père Charbel, sa justice et son véritable
esprit monastique".
"Sa nièce voulant mettre fin à la concurrence des parents et s’assurer de tout
l’héritage, insista à ce qu’il lui écrivît la
cession volontaire; Père Charbel prit un petit papier sur lequel il a écrit et
le lui remit. Quand elle arrive à Bqaakafra, elle ouvrit le
papier pour y trouver le suivant: "je n’hérite ni
je ne donne en héritage".
Pour ce qui concernait ses parents, il ne s’approchait ni de corps ni de cœur".
8- Mettez l’argent du vœu sur le
rayon
"Une fois, ses deux frères l’ont visité et lui ont proposé de prendre
quelques sous turcs, mais il refusa; après une longue tentative de conviction et
d’insistance sur le caractère du vœu de cet argent offert à l’ermitage, il
accepta en leur disant: "mettez
l’argent du vœu sur le rayon", sans regarder la somme. Un jour, je suis venu
en visite à l’ermitage, et voilà que Père Charbel m’expliqua en disant: "mes
deux frères étaient venus me rendre visite et ils ont mis cette somme pour
l’ermitage; la voilà sur le rayon, prenez-la". Je l’ai prise et
trouvé
qu’elle comptait 8 piastres ottomanes ".
9- La providence ménage (Mt 6,25-34)
"Il ne comprenait rien du tout à l’argent, incapable de distinguer entre
une pièce et une autre, ne l’ayant jamais utilisé de toute sa vie, il ne
s’intéressait ni à l’abondance ni à la rareté des vœux, non plus à la rente de
l’ermitage. Il priait pour la fertilité des récoltes sans se soucier pour
sécheresse ou fécondité, disant: "La providence ménage". Il pratiquait la
pauvreté dans toutes choses; dans sa cellule, dans l’habillement, dans son
manger, son boire, sa couche et les outils du travail".
E: L’habillement de
Charbel
I- Présentation
"Que l’habillement, la paillasse et la couverture du moine répondent à
la pauvreté";
"à ce niveau, il s’habillait comme le dernier des pauvres"
"et des novices";
"il n’a jamais porté un habit neuf",
"cherchant humblement"
"à user des habits abandonnés par ses confrères",
"un habit monastique était usé, rapiécé"
"et éliminé dont les fils sont devenus visibles",
"fait en laine libanaise épaisse, déteinte",
"rougeâtre",
"mais toujours propre; il la lavait de ses mains",
"la rapiéçait lui-même sans soin",
"comme on coud les sacs
en filaments des plantes",
"faisant tous les 5cm un point de couture".
"Il n’avait pas d’habits particuliers pour l’été et l’hiver,
plutôt un seul habit en laine et une chemise
brute" "qu’il portait jusqu’à ce qu’ils
soient usés pour lui en donner après d’autres déjà utilisés par un
confrère".
"Sa ceinture, tout comme pour les
autres moines, était en cuir", "écorchée par les pierres et les arbusseaux
qu’il portait". "Il se revêtait d’un pantalon
(cherwal) noir", d’une chemise brute, "d’un gilet coupé d’un vieil habit
monastique, et l’habit monastique au-dessus"; "il n’a jamais mis des bas aux pieds,
malgré le froid glacial". "Il mettait la cape à l’Église, hors
de l’ermitage, et l’enlevait pour le travail… Il était toujours capuchonné,
hiver et été, jour et nuit, sauf pour la messe conformément à la
liturgie". "Le capuchon lui couvrait la tête,
les yeux, les oreilles, une partie des joues et le cou"; "il ne retroussait pas son habit sous
la ceinture, comme font les moines au travail, pour ne pas laisser apparaître
son pantalon".
"Ses gros souliers étaient usés et
rapiécés", "et se terminaient en haut de
l’arrière par une languette"; "ses petits essuie-mains étaient
faits de gros fils"; "son habillement pauvre mais propre,
élimé depuis les gros souliers jusqu’à la calotte"; "il ne réclamait rien, même le
nécessaire; et au cas du besoin le plus pressant, il le demandait simplement,
humblement et avec écrasement".
"Il abhorrait la saleté; toutefois, "il ne lavait son
habillement que lorsque le supérieur l’ordonnait de le faire, même s’il lui a
fallu de le porter pendant un an"; "il ne lavait le visage" "qu’une seule fois par semaine, sauf
au cas d’une occasion exceptionnelle, alors, il demandait l’autorisation du
supérieur".
II- Récits et
événements
1- Sans rayures
rouges
"Père Charbel recommandait au frère
cordonnier qui ajoutait aux gros souliers des rayures rouges, selon une coutume
monastique en ce temps là, de les lui éliminer".
2- Pour les
rapiécer
"On m’a confié le vestiaire pour un
certain temps au couvent Saint Maron, pendant le triennat du Père Ighnatios de
Mechmech qui m’a ordonné d’aller à l’ermitage, contrôler les habits des ermites
et voir ce dont ils ont besoin. Je suis entré dans la cellule du Père Charbel
chez qui je n’ai rien trouvé qui soit bon à porter; je l’ordonnai
de sortir ces chiffons. Ne voyant en train de les déchirer, il m’a prié de
les lui laisser pour qu’il puisse les raccommoder et les porter pour observer la
pauvreté. Puis le supérieur me demanda de lui préparer deux habits neufs.
Il s’est abstenu à l’accepter, présentant ses excuses à ne pas pouvoir porter
un habit neuf, me recommandant de soulever auprès du supérieur ses souhaits de
lui envoyer un habit usagé, convenable à la nature de son travail; sans
lui apporter des chemises, puisqu’il porte le cilice; puis une
chemisette, coupée d’un habit élimé, pour cacher en dessous le
cilice".
3- Je l’étends
par terre sous ma couche
"Nouvellement profès, je suis allé un
jour lui rendre visite, et je l’ai trouvé en train de laver ses habits, les
frottant sous les pieds; voyant le cilice dans la lessive, je lui dis:
"Qu’est-ce que c’est?" Il répondit: "Je l’étends par terre, sous ma
couche", essayant de cacher sa vertu devant moi".
4- Habillez-moi
comme je vis
Une fois, il a été chez le Père Roukoz
de Mechmech portant un habit très élimé, et lui dit: "Faites que je vive
comme mon habit, ou bien habillez-moi comme je vis". Je pense qu’il a bien
voulu lui dire: "Ou bien vous m’envoyez à l’ermitage qui convient à cet habit
que je porte, ou bien veuillez me donner un habit meilleur pour le porter quand
je vous accompagne". Cette interprétation à été soutenue par la réaction du
supérieur qui entra rapidement dans sa cellule, enleva son habit et l’en
habilla; il était large. Le supérieur lui dit: "Tu peux le porter".
5- Pourquoi te
négliges-tu ainsi?
Une fois, l’ayant vu porter des
souliers déchirés, je lui dit: "Pourquoi te négliges-tu ainsi? Commande de gros
souliers convenables, car tes pieds sont comme ceux d’un chameau!" Il n’y
répondit pas".
F: Sa paillasse, son sommeil
et le mobilier de sa cellule
I-
Présentation
1- Cellule du
Père Charbel au couvent
Elle est située dans la partie Ouest du
couvent, sa longueur, du couloir Est jusqu’au mur Ouest, est de 325cm; sa
largeur, du Nord au Sud, est de 225cm; sa hauteur 300cm; sa toiture est faite en
bois simple, en tronc d’arbre et de la terre. Un fenêtre est pratiquée dans le
mur Ouest, de hauteur de 80cm, de largeur de 40cm; sa terre est couverte de
pierre; sa porte à l’Est est de hauteur de 175cm, sa largeur est de 80cm; la
porte donne sur la fenêtre et la porte de l’Église, face au Maître
Autel".
2- Sa cellule à
l’ermitage
"Sa longueur, de l’Est à l’Ouest
atteint 3m, sa largeur du Nord au Sud est 210cm, sa hauteur est de 240cm. Sa
fenêtre pratiquée au mur Sud est en bois simple, formée de deux volets
vitrées", "toujours fermés, avec un rideau noir
d’où personne ne le voit de l’extérieur" "et il ne voit que la montagne de
Ehmej et les chaînes montagneuses raboteuses. Dans le mur oriental, une lucarne
a été pratiquée pour servir comme armoire", "et dans la laquelle il a déposé sa
lanterne à l’huile"; "sa terre est dallée en pierre de la
montagne; ses murs en pierres, sont couverts à l’intérieur d’argile; sa toiture
est en bois, sa porte en bois très simple: de largeur de 80cm, d’une hauteur de
170cm, dotée d’un loquet en bois, de l’extérieur,
elle est munie d’une manette en bois". "Sa cellule était vide",
"toujours ouverte", "noircie par la fumée", "une couche en bois sous laquelle il
avait mis un plateau en osier où il déposait ses livres spirituels" "et théologiques, on y voyait une
cruche d’eau potable". "Il ne permettait à personne d’y
entrer, sauf clandestinement".
3- Sa
couche
"Sa paillasse était
rembourrée" "de feuilles de galle et de chêne,
d’écorces des arbres, couvertes d’une sorte de tapis, tissé de poils de chèvres,
et le tout était couvert d’une vieille étoffe en
feutre. Une bûche enroulée dans un chiffon noir pris d’un habit constituait son
oreiller. Sur cette couche très rude, sans matelas ni couverture,
dormait été et hiver". "Ce sur quoi il dormait était
éliné";
"il se couchait sur une serpillère déposée sur deux planches", "rehaussées de la terre d’une hauteur
de deux empans", "liées entre elles par une lanière
découpée d’un drap"; "souvent, couchait-il par
terre".
4- Son
sommeil
"Il ne veillait jamais avec les moines,
vivant en ermite dans le couvent. Il détestait le repos, n’aimait pas le
sommeil, ennemi de l’oisiveté et du repos, passionné pour la mortification et le
travail"; "il dormait après complies et les
autres offices de prière, environ huit heures et demie", "se réveillant, à minuit selon le
règlement de l’ermitage", "pour l’office de prière, pour lequel
il s’est adonné toute sa vie",
"après quoi il ne se rendormait plus" – "sauf parfois pour se reposer une
heure, et reprendre la méditation et la prière. Ses veillées n’étaient qu’une
oraison à Dieu et aux questions spirituelles" "à l’Église".
"Il se réveillait très tôt" "avant l’aube" "pour aller prier à l’Église et dire
la messe; il ne tardait jamais à s’y présenter précédant tout le monde". "Le jour, il ne connaissait jamais le
repos, toujours pris par le travail et la
prière", "occupant la plupart de son temps à
l’Église devant le Saint Sacrement" "et la nuit dans la lecture des livres
théologiques, la méditation et la prière jaculatoire". "Il n’a jamais connu le
divertissement"; "plutôt il prolongeait ses veillées
dans la prière".
II- Récits et
événements
1- Epuisé de
sommeil (Mc
4,38)
"Je remarquais qu’il était épuisé de
sommeil à cause de ses longues veillées continuelles; pendant qu’il était
agenouillé tout droit, parfois le sommeil le gagnait inclinant sa tête, son
corps se laissait pencher en avant petit à petit, au point de toucher la terre,
c’est alors, averti subitement, il se redressait, vainquant sa défaillance
physique, élevant ses yeux vers le haut, soupirant de la profondeur de son cœur.
Personne ne l’a jamais vu se reposer, fermant les yeux à l’ombre d’un
arbre".
2- L’oreiller de
laine (Mt
8,20)
"Sa cellule n’avait ni serrure ni
clé ; ceci le connaissaient tous les moines qui avaient fréquentés Père
Charbel au couvent de Annaya. Sa couche comprenait une vieille paillasse
déchirée, avec une bûche enroulée dans un chiffon, coupée d’un habit élimé pour
lui servir d’oreiller. Il n’avait ni couverture ni drap. Une fois, pendant que
Père Charbel travaillait au champ, frère Boutros Al-Fraidiss en profita, entra dans la cellule,
prit la bûche, la jeta et la remplaça par un oreiller de laine. De retour dans
sa cellule, il remarqua le changement de son oreiller, alla auprès du frère,
le priant de lui remettre la bûche et insistat jusqu’à ce que sa
sollicitation eût trouvé satisfaction".
G: Le manger de
Charbel
I-
Présentation
1- Au
couvent
"Il faut que le repas du moine soit
facile à en trouver les ingrédients et qu’il ne mange que deux fois: le déjeuner
et le dîner"; "au couvent, Père Charbel mangeait 2
fois avec ses confrères au réfectoire", "se satisfaisant des morceaux de pain
brûlés ou mal cuits. Au champ, il se nourrissait du reste du repas de ses
confrères qui travaillaient avec lui et de celui des domestiques qui labouraient
la terre". "Plusieurs fois, il arrivait qu’on
oubliât de l’appeler au déjeuner, il
continuait à travailler".
"Durant son séjour au couvent, il
m’arrivait d’aider les moines au champ où Père Charbel travaillait aussi, je
remarquais qu’il ne mangeait que lorsque le responsable l’ordonnait de prendre
son repas; alors attendait-il que ce responsable lui donnât sa portion qu’il
prenait, se retirant dans un coin; il ne mangeait rien hors des repas", "toujours frugaux"; "hormis cela, il ne se permettait pas
de prendre du mets, du boire ou du fruit"; "il ne choisissait que le pain en
miettes ou bien le gratin du chaudron". "Quand on tardait à servir le
déjeuner, il ne maugréait pas, ne répugnant à aucune nourriture, sans demander
pour lui-même quelque chose de spécial au cuisinier ou bien au dispensier; au
contraire, il recommandait qu’on lui réservât le reste du manger pour s’humilier
plus et se limiter au nécessaire". "Il ne s’adonnait ni au tabac, ni à
l’alcool" "et ne mettait aucune nourriture dans
sa cellule".
"Il n’a jamais dit: "je ne mange pas de
ce plat parce que je suis malade". Jamais, il ne parlait de la suavité de la
cuisson ou son mauvais goût. Il n’a jamais mangé hors du couvent, sauf au champ
quand il y travaillait; quand il ramassait du raisin ou des figues, il n’en
mettait rien dans la bouche. Pendant le repas, il mangeait tranquillement et
avec soin", "comme s’il était à
l’Église", "ne parlant avec personne, baissant
le regard comme s’il méditait sans dire: "ceci est salé, cela est fade, l’autre
est brûlé. Il ne prenait ni boisson alcoolique ni café"; "en somme, il ne mangeait que pour la
nécessité et non pas pour se régaler"; "Souvent, après avoir fait la
vaisselle, il en buvait l’eau, le faisant avec joie"; "il se servait des assiettes en
poterie et des fourchettes en bois".
"Parfois on était ensemble pour le
labourage et il nous y aidait. Malgré la grande chaleur, il ne se désaltérait
pas, tandis que nous, nous buvions trop à cause de la fatigue et de la
chaleur"; "il ne se préoccupait ni du manger ni
du boire ni d’habit. Il était dans ce monde sans y appartenir, détaché de tout
ce qui y existe. Tous ses désirs, ses penchants et ses sentiments étaient
orientés vers Dieu".
2- A
l’ermitage
"Il ne mangeait qu’une seule fois par
jour à 15h. après l’office de prière; son mets était frugal: de la salade avec
des olives, les épluchures des pommes de terre qu’il ramassait au couvent, les
lavait, les bouillait et les manger. C’est pourquoi, sa vie était identique,
marquée par le recueillement et la dévotion; pendant le repas, il ne réclamait
rien par la voix, se satisfaisant de regarder du coin de l’œil"; "il n’a jamais mangé de la viande,
son mets était toujours préparé avec l’huile, sauf à l’occasion des grandes
solennités comme: Noël, La Résurrection, la Saint Antoine, les Saints Pierre et Paul,
patrons de l’ermitage où la cuisson était préparée avec du beurre"; "d’ailleurs, il ne se présentait pas
pour manger tant que son compagnon de l’ermitage ne l’aurait pas appelé au
repas, même s’il lui fallait rester toute la journée à jeun"; "il ne se donnait pas des soucis au
mets et ignorait où on le mettait"; "il mangeait modestement et
austèrement sans se régaler"; "s’il arrivait à son compagnon
d’avoir oublié de l’appeler, il était capable de rester au lendemain sans
manger; renommé pour cela".
"Quand il venait au couvent pour en
prendre la provision, il commençait par choisir à lui-même le pain
moisi" "qu’on jetait aux chiens" "et le reste du mets des jours
précédents" "pour présenter à son compagnon le bon
pain et la bonne nourriture; en outre, il allait remplir la jarre à la source de
Annaya, à une demi-heure à pieds, pour ses compagnons, quant à lui, il puisait
l’eau du puits de l’ermitage pour en boire".
"L’ermitage était entouré de potagers, de vignes, de figuiers,
de poiriers… dont il assumait la plus grande partie du travail du ramassage des
fruits qu’on expédiait au couvent et dont il se privait", "n’en gouttant que très peu. Pour le
repas, il ne mangeait que ce que Père Makarios lui présentait"; "il ne buvait que pendant son seul
repas, s’interdisant de prendre du rafraîchissement". "Moines que nous sommes, nous nous
étonnions de son train de vie, porté à l’ascétisme extrême". "Quand il priait, travaillait ou
mangeait, il s’y plongeait comme dans une extase profonde jusqu’à ce que son
compagnon vînt l’en réveiller".
II- Récits et
événements
1- Le pain est
devant la fenêtre (Jn
4,31-34)
"Quand nous revenions tard du travail
au champ, Fr. Francis lui donnait pour son dîner seulement quatre niches de
pain; qu’il portait sous son aisselle et entrait à l’Église pour les mettre
devant la fenêtre, puis s’agenouillait pour la prière; il y restait longtemps,
parfois une heure et demie et finit par s’endormir; et lorsque Fr. Francis
entrait à l’Église pour sonner la cloche, annonçant l’office de prière de
minuit, il trouvait que les pains étaient toujours devant la fenêtre et les
ramenait à la despense. C’est que Saint Charbel oubliait sa faim devant Dieu; je
ne saurais l’affirmer s’il abandonnait son pain exprès ou par oubli; il lui
arrivait souvent de ne prendre qu’une seule fois par jour son repas, malgré son
travail épuisant; on ne le laissait aucune minute sans boulot, voire même, on
l’appelait de l’Église, contrairement à son désir d’y rester à prier pour lui
confier un service".
2- Il ne mangeait
pas du raisin
"Du temps de notre noviciat, nous
venions au couvent pour la moisson; assoiffés, nous allions ramasser des grappes
pour étancher notre soif, appelant en vain Père Charbel à partager avec nous les
raisins; il tournait le dos" "s’abstenant à en manger; pourtant il
travaillait dans la vigne".
3- L’eau de la
vaisselle
"Étant donné que j’étais affecté au
travail à la cuisine, le supérieur n’avait autorisé de manger au réfectoire avec
les moines où Père Charbel ne s’y rendait qu’une seule fois par jour pour
prendre 3 miches de pain épais qu’il mettait en morceaux et les mélangeait avec
sa nourriture, se servant de la cuillère, mangeant
avec soin et retenue, s’interdisant de regarder à droite et à gauche. Une fois
son voisin ayant terminé de manger, il prit son assiette pour la laver, versa
l’eau de la vaisselle dans son assiette, et la but pour se mortifier et vaincre
son amour propre. Pendant que nous faisions la sieste après le déjeuner, Père
Charbel allait à l’église pour l’adoration du Saint Sacrement; la même chose
qu’il répétait durant le temps du petit déjeuner, vu qu’il ne mangeait qu’une
seule fois le jour".
4- Le blé
concassé au beurre
"En vain le supérieur invitait-il le
Père Charbel à sa table, quand il déjeûnait au réfectoire avec les moines par
des jours pluvieux; mais il préférait toujours la dernière place. Aussi le
supérieur me demandait-il de remplir une assiette de blé concassé au beurre,
préparé spécialement pour lui et l’offrir à Père Charbel qui n’y touchait
pas".
5- Sans
huile
Une fois, je l’ai vu rentrer au couvent
après le travail portant des végétaux comestibles et des herbes ensemble; je
suis intervenu l’avertissant: " Mon maître, ces herbes ne sont pas comestibles,
c’est pour le bétail". Il me répondit: "Ca ne fait rien". Puis, il a
haché le tout ensemble, le saupoudrant avec un peu de sel. Entre temps, Père
Makarios arriva et comme son habitude, il commença à préparer le repas. Voyant
Père Charbel s’occupant de ses végétaux, lui dit: "Y as-tu ajouté de l’huile?"
Il lui répondit: "Non, cela ne fait rien on peut en manger sans huile".
C’était pendant le Carême. Ainsi a-t-il mangé de l’herbe que mange le
bétail".
6- Deux jours
sans mets (Luc 4,46; Mc
8,2)
"Il ne s’approchait du manger tant que
l’ancien ne l’y autorisait pas tous les jours". "Tant de fois, lorsque Père Makarios
venait au couvent pour s’acquitter de quelques services auxquels il est appelé
par l’obéissance, nous insistions à ce qu’il restât avec nous, mais il répondit:
"Je veux retourner à l’ermitage pour appeler Père Charbel au déjeuner". Une
fois, j’ai répondu: "Est-ce qu’il ne sait pas manger tout seul pour que tu
t’obliges chaque fois d’aller lui donner à manger?" Il me répliqua: "Il est
impossible qu’il mange si je ne l’appelle pas moi-même et que je ne lui présente
pas le mets de mes propres mains". Si on le laissait deux jours sans l’appeler
au manger, il ne le réclamait ni ne s’en approcher à sa propre
initiative".
7- Le pain
brûlé
"Père Makarios descendait au couvent
pour aider à faire le pain, occasion pour lui de ramasser les pains brûlés ou
mal cuits, en disant: "Ceci est à mon maître!", voulant dire au Père Charbel qui
lui-même faisait la même chose chaque fois qu’il venait au couvent pour la
panification; dans son régime alimentaire, il cherchait la
mortification", "sachant qu’il ne conservait ni
manger ni boire dans sa cellule".
8- Comment
mangeait-il ?
"Je l’ai vu quatre ou cinq fois quand
il arrivait à la suite de l’appel de son compagnon, le Père Makarios, pour son
seul repas sur vingt-quatre heures, rien que par obéissance, malgré que cet
ermite était le servant du Père Charbel, ce dernier lui obéissait comme son
obéissance à son supérieur. Je l’ai vu arriver à pas lents pour son repas, bras
croisés, regard baissé avec recueillement, se mettant debout à l’écart,
attendant que son compagnon l’ordonne de s’asseoir; puis il pria et s’assit par
terre, les jambes croisées et son habit couvrant ses pieds sans manger jusqu’à
ce que son compagnon lui ait demandé de commencer à manger. Je n’ai vu dans son
assiette que des tiges flétries de pourpier, pleines de grains, ne contenait que
quelques rares feuilles; il ne commençait un nouveau pain que quand il a ramassé
de son assiette toutes les miettes brûlées. Une autre fois, je l’ai vu manger
seulement de la salade; une troisième fois, du blé concassé cuisiné avec des
tomates. En été, quand il finissait son mets, son compagnon l’ordonnait de
prendre du raisin, alors, il n’en mangeait que trois ou quatre grains".
9- Les tiges du
pourpier et du persil
"Je me souviens qu’une fois, j’étais
avec mes confrères les novices à travailler près de l’ermitage; nous avons eu
l’idée de préparer "le tabboulé". Alors, nous avons effeuillé le persil et le
pourpier et jeté les tiges, Père Charbel s’est penché pour les ramasser, puis
les hachant, il les a mélangées avec l’huile et saupoudré du sel et s’est mis à
manger".
10- Bien
volontiers
"Une fois, Père Makarios lui dit:
"voici ce petit reste à manger que j’ai laissé pour la chatte dans son assiette,
car je t’ai oublié". Il lui répondit: "Mon Père, il n’y a pas
d’inconvénients. Je me contenterai bien volontier de manger la portion réservée
au plus petit des animaux".
11- Une boîte
métallique oxydée
"Une fois, je me suis présenté à
l’ermitage; j’ai vu Père Charbel manger tranquillement, avec soin et doucement,
regard baissé vers la terre, choisissant les miettes et les petits morceaux du
pain brûlé pour les manger. Après avoir terminé de manger, il se leva, prit
l’assiette de son compagnon et sa gamelle en bois, les lava et versa l’eau de la
vaisselle dans une petite boîte métallique oxydée, la portant dans sa cellule.
Je demandai au Père Makarios, son compagnon: "Que fait Père Charbel de cette eau
de vaisselle qu’il a prise avec lui?" Il me répliqua: "Pour la boire, c’est ce
qu’il fait toujours". E je me demandai comment il pouvait vivre dans cet état et
de ce mets dont il se nourrit"
12- Ému jusqu’aux
larmes
"Vers le soir, à l’heure du déjeuner du
Père Charbel et son compagnon, Père Makarios, je me suis assis près d’eux pour
les contempler en train de manger une ratatouille aux pommes de terre brûlée.
J’ai vu Père Charbel chosir le pain brûlé, les miettes et les mettre
soigneusement dans sa gamelle. Alors, j’ai eu pitié de lui au point que les
larmes allaient couler de mes yeux; c’est alors que je me suis dit: "tandis que
cet ermite accomplit toutes ces mortifications pénibles, nous autres moines,
nous ne cherchons que le mets savoureux et le lit confortable".
13- sans qu’il
gouttât un seul
grain
"Lorsque le supérieur du couvent Saint
Maron, le Père Ighnatios Al-Tannoury, m’envoyait pour ramasser du raisin de
la vigne de l’ermitage, là-bas, le Père Makarios ordonnait Père Charbel de
m’accompagner pour m’en ramasser sans qu’il en gouttât un seul grain; quand je le trouvais
seul à l’ermitage, je lui demandais de me cueillir du raisin, il ne me répondait
pas, attendant l’ordre de son compagnon"
14- Personne ne
m’a ordonné
"Tous réunis pour le déjeuner dans les
vignes, les moines et les ouvriers, ils ont oublié d’appeler Père Charbel; de
même, le jour suivant, il n’a rien mangé. Le supérieur s’étant rendu compte de
l’erreur, appela Père Charbel et lui dit: "As-tu mangé, aujourd’hui?" Il
répondit: "Non". Le supérieur poursuivit: "Hier, as-tu mangé?" Il
répliqua: "Non plus". Le supérieur poursuivit: "pourquoi?!" Charbel
répliqua: "personne ne m'a pas ordonné". Sur le champ, le supérieur ordonna qu’on
lui apportât le manger".
15- Je ne mange
pas à mon gré
"Je vous assure que même s’il restait
deux jours sans manger, il ne réclamait pas le mets; et il ne s’y approchait pas
tant que son compagnon ne l’y ordonnait pas. Moi-même j’en fus le témoin quand
l’heure du déjeuner était passée, je l’invitai à manger; il me répliqua: "Je ne
mange pas à mon gré, j’attends que mon compagnon m’y ordonne".
16- Va
prier
"Un jour, j’étais présent à l’heure de
leur repas; ayant fini de manger, Père Charbel se croisa les bras et se pencha
devant son compagnon et lui demanda: "Père, que voulez-vous que je fasse
maintenant?" Il lui répliqua: "Va prier". Ainsi, se comportait-il dans tout
ce qu’il faisait".
17- Les
provisions abondent (Mc
6,30-44)
"J’ai entendu mon grand-père maternel
racontait qu’un jour les provisions venaient à manquer au couvent. L’un des
moines mit le supérieur au courant de cette affaire; alors, il appela Père
Charbel et lui demanda d’asperger la cuve de l’eau bénite et de prier; il obéit
et voilà la cuve qui abonda de blé".
"Entre autres de ses miracles, ce fut celui survenu en une année où les
provisions venaient à manquer au couvent, le supérieur convoqua Père Charbel,
l’ermite, qui pria et bénit, et les provisions se multiplièrent. Ce phénomène se
multiplia selon les témoignages de plusieurs, parmi lesquels il y avait des
témoins toujours vivants tel que: Père Ighnatios de Mechmech, Père Nehemtallah de Mechmech; frère Élias Al-Mahrini, F. Boulos Nassif de
Maïfouq et
d’autres".
"Aussi fut-il de même lorsque le supérieur apprit que les cuves de l’huile
eurent été vides et que Père Charbel les a remplies grâce à ses prières".
H: La sobriété de
Charbel
I-
Présentation
"Il vivait sobre dans l’été où il se trouvait sans jamais chercher à en
sortir, voulant seulement la complaisance de Dieu. Là où l’autorité l’envoyait,
Il y trouvait son repos et sa joie soit qu’il balayait ou cuisinait ou piochait,
trouvant dans tous ces services un signe de complaisance de Dieu".
"Son compagnon prenait spontanément soin de lui, lui commandait tout le
nécessaire auprès du supérieur".
"Il se privait même des choses ordinaires et nécessaires à sa vie quotidienne, en acceptait les moins
bonnes et les plus difficiles". "Il était calme, docile, d’une
amabilité fascinante, dominant ses penchants et ses caprices".
"Pur comme un
enfant, il fuyait le snobisme, le dédain et la flatterie. Avec ses confrères, il
était indulgent, sévère envers lui-même".
"la droiture primait sa conduite. Il n’a jamais était injuste, envers les autres
de plus en plus ascétique, envers lui-même. Il ne se ventait jamais, il ne
faisait rien à sa propre initiative: ni au travail ni dans sa prière
communautaire ni dans celle des offices, renvoyant le tout à l’obéissance. Une
fois ordonné, il exécutait avec joie".
"Dans son contentement il était stable, assidû dans ses mortifications. Il a
continué ainsi jusqu’au dernier soupir. Il ne s’est jamais plaint, sa vie
Durant".
"Il a mené une simplicité extrême dans son manger, son boire et son habillement;
il ne se mêlait à personne, ne comprenant rien aux relations avec les autres,
sinon ce que l’obéissance l’ordonnait de le faire".
II- Récits et
événements
1- Oh! Père
Général
"Du temps de son supériorat, le Père Général, Moubarak Al-Matni, a rendu
visite au couvent, occasion durant laquelle a bien volontiers accepté de
déjeuner avec les frères étudiants; Père Charbel l’ermite, est venu le saluer et
fut invité par
lui: "Père Charbel, dit le supérieur, tu seras aujourd’hui avec nous pour le
déjeuner, nous allons t’offrir un très bon repas", Père Charbel répondit:
"nous, nous avons prononcé le vœu de l’obéissance, pour les choses
difficiles, mais combien est facile ce que vous demandez! L’obéissance de ce
côté là est très bien". Le Père Général crut que Père Charbel mangera de ce
qui va lui être présenté à table en guise de participation avec le Père Général
lequel, à l’heure du repas, appela Père Charbel qui se présenta bras croisés:
"veux-tu déjeuner avec nous" enchaîna le
Supérieur Général; perplexe, l’ermite se mit à se frotter les mains, répondit
tout bas avec recueillement: "mon Père Général! Mon Père Général!" D’un
côté, il ne voulait pas s’opposer à son ordre, plutôt à son désir, et de l’autre
côté, il ne souhaitait pas manger et du mets préparé pour lui et pour ses
compagnons. Le Père Général réalisa son ambivalence et le libéra; ainsi,
l’ermite retourna-t-il dans son ermitage".
2- Voyez ce que votre
servant me donna!
"Là, il me vient à l’esprit qu’on présentait à l’ermitage des mouchoires
en signe d'ex-voto (de vœu)".
"Une fois, il en a porté un tas au supérieur qui lui dit: "donne-les au
servant". Il les lui a donnés et regardant le supérieur, il lui dit: "Mon
maître s’il vous plait, pouvez-vous me donner un mouchoir pour m’essuyer les
mains?" Il lui répliqua: "ils étaient tous avec toi, pourquoi n’as t’en pas
pris un?" Il lui répondit: "Je ne prends rien sans votre permission". Le
supérieur dit à mon Père: "donne-lui un". Mon Père lui choisit un rouge tout
neuf; souriant, Père Charbel dit au supérieur: "Voyez ce que votre servant me
donne". Il répondit: "choisis ce que tu veux". "Il
en prit un bleu qui était le
plus mauvais".
I: L’intelligence de
Charbel
I-
Présentation
"Il avait les apparences de la
stupidité" "et de la
naïveté; mais en réalité, il était perspicace et intelligent; quand on
l’interrogeait, il répondait nettement en toute concision, feignant d’être idiot
et apathique"; "s’il avait à
se prononcer, il ne disait que juste le nécessaire qui construit le prochain et
adhère au salut de son âme; ses conversations se focalisant toujours sur des
thèmes religieux, orientant toutes ses œuvres sur son salut éternel et le salut
du prochain"; "son avis
s’avérait authentique dans ses réponses théologiques; il témoignait de la
présence de l’esprit malgré son silence absolu". "Quant à sa
sagacité, elle se reflétait dans la précision de ses travaux, en mettant chaque
chose à sa place"; "et malgré la
prépondérance de sa raison et la force de ses acquis, il s’est fait esclave de
tous; il a atteint un degré dans sa mortification, dans la maîtrise de ses
instincts, au point où il a confirmé ce que le prophète David a dit dans ses
Psaumes: je suis devenu comme une bête devant vous, pourtant je suis chaque jour
avec vous". "Il était
simple de cœur et d’intention, n’ayant qu’un seul but: Dieu. Pourtant il me faut
signaler une seule chose, c’est de vous dire: ne croyez pas qu’il était stupide
et apathique, mais il était daté de la prudence des
Saints:
"- C’est qu’il
n’a commis aucune erreur pouvant lui incomber les reproches de ses supérieurs et
ses confrères"
"- C’est qu’il
n’a offert aucune occasion à ses supérieurs ou à d’autres, susceptibles d’y
trouver une lacune quelconque dans son comportement. Je n’ai pas entendu que le
supérieur l’ait réprimandé un jour pour une peccadille, minime qu’elle soit, son
observation aux règlements avec une exactitude étonnante prouve qu’il les a
parfaitement compris". "Sa parole en
Esprit s’affichant sublime, car il se dirigeait vers la perfection par le chemin
idéal dont il ne s’éloignait d’un pas. Dans son train de vie, il mettait chaque
chose à sa place, ne prononçant aucun mot inadéquat. Sa prudence l’a protégé
contre les superstitions et l’exagération détestables,
conseillant les supérieurs et les moines de l’imiter".
"Ne croyez pas
que son retrait des gens et des choses du monde émanait d’une apathie ou
idiotie, plutôt il était homme d’intelligence et de sagacité; sa simplicité
s’enracinait dans son Christianisme, sa pitié basée sur la
sagesse, exempt des scrupules et des troubles, sans la moindre anomalie dans son
travail ou son comportement. D’autre part celui qui a joui de la pleine
satisfaction de ses supérieurs, ses compagnons, des domestiques, de son
entourage, de ses visiteurs, sans encourir la plainte de personne, doit avoir
sans aucun doute une sagesse extraordinaire; d’autant plus, j’exprimais de la
crainte envers lui avec beaucoup de vénération, évitant la plaisanterie
excessive avec lui". "Il était
remarquable par son respect à Dieu: au point où, même si on le menaçait de le
décapiter à l’église, il n’était pas prêt à regarder à
droite et à gauche; quant à son respect à l’autorité, il en a fait son but
extrême; il était ponctuel dans sa conversation sur la liturgie et ses Saints
rites; il célébrait avec son compagnon, à l’ermitage, toutes les cérémonies
religieuses quotidiennes à temps". "Il était
intellectuel, ayant étudié à Kfifane, mais sous les fausses apparences d’un
bonhomme naïf". "Quant à ses
mortifications et l’oppression de son corps rigoureuses, multipliées et
perpétuelles, elles ne lui causèrent aucune maladie, ce qui montre qu’ils les
exerçaient à bon escient", sans être
cérémonieux dans la pratique des vertus, s’y adonnant avec simplicité, sincérité
et fidélité".
"Il était sérieux et
discret, au comportement équilibré, imposant son respect, et son estime à tous
ceux qui l’ont connu; il n’a jamais été une pierre de scandale à personne, ni un
sujet de moquerie de la part des autres; tout le monde le prenait pour un Saint
et demandait sa
bénédiction"; "il était
sage, mais loin de la sagesse de ce monde, plutôt de celle
surnaturelle".
II- Récits et
événements
1- Demandez et l’on vous
donnera (Mt
7,7)
"Père Charbel
possédait une volonté de fer enflammée qui le rendait maître de ses
penchants et ses émotions. Il me disait : "mon frère, la vie est
trompeuse; Dieu connaît tout notre intérieur; celui qui sollicite
sa grâce avec confiance, ne sera pas déçu; demande-lui de vous donner ce
dont tu as besoin". Durant toute la période que j’ai passée à St Maron, ni
moi, ni les moines supérieurs et sujets, nous ne le lui avons reconnu aucune
lacune; il souhaitait qu’on lui demandât un service, non seulement de la part
des supérieurs et des confrères, mais aussi de la part des travailleurs du
couvent: un domestique lui demandait de transporter les outils de labeur
ailleurs, il l’exécutait sur le champ; j’étais moi-même, témoin de beaucoup de
ces ordres qu’on lui donnait. Je n’ai jamais entendu que quelqu’un s’est plaint
de lui ou bien l’a accusé de quelques accusations auprès des supérieurs,
lesquels supérieurs et confrères le respectaient et l’estimaient, lui demandant
ses prières en cas de maladies ou de détresse. Sa pitié influençait beaucoup
tout le monde".
2- Il n’y a pas de
voleurs chez-nous
"Une fois, un
homme vint un Dimanche au couvent pour participer à la messe où les fermiers-associés se rassemblaient
tous les dimanches et les jours des fêtes. Il laissa son bâton auprès de la
porte et entra à l’église; en ce temps-là Père Charbel n’était pas encore entré
à l’ermitage. Après la messe, l’homme ne trouva pas son bâton; il cria, haussant
sa voix, proférant des injures. Père Charbel sortit de l’église et lui dit
doucement et gentiment: "mon frère, personne ne crit fort au couvent".
L’homme dans son excès de colère reprit: "on a volé mon bâton; est-ce-qu’il y a
des voleurs au couvent?" Souriant, Père Charbel répondit avec sérénité: "non
mon frère, nous n’avons pas de voleurs. Regarde cette cuve-là en pierre de
taille, placée à l’entrée du couvent depuis qu’il fut construit, personne
ne l’a volée". Honteux, l’homme se tut; tous ceux qui étaient présents
rièrent, car la cuve était une grande pierre pesant plus de 10 quintaux que
vingt personnes seraient incapables de la bouger".
3- Un maître
ingénieux
"Son
intelligence était remarquable d’après l’exactitude dont il effectuait son
travail; car je ne me souviens pas qu’un compagnon ou bien un laboureur avec qui
il travaillait se fussent plaint de son incompétence dans le travail ou lui
eussent adressé des remarques, directement à lui ou par l’intermédiaire d’un
tiers; en effet il était d’usage parmi les moines ou les laboureurs, quand un
frère maladroit ou stupide les aidaient, d’aller le dénoncer devant le
supérieur, lui disant: "prière, Père Supérieur, ne nous donnez pas frère quidam,
parce qu’il est plutôt encombrant dans le travail qu’utile". Sa prudence s’est
manifestée dans sa plus grande splendeur, ne laissant aucun moyen aux autres de
lui rapprocher les moindres scrupules ou hallucination, et à travers la
transparence de sa conscience qui atteint le culminant de la sublimité de ses
vertus, ne laissant ainsi aucun moyen aux autres de lui reprocher les moindres
scrupules aux hallucinations. Le tout émanait de lui selon des normes
sapentiales. Mais quelle prudence humaine pourrait égaler celle de celui qui a
abandonné le monde! Il est vrai qu’il n’a pas fait des études spécialisées, mais
fut dans les choses spirituelles un maître ingénieux, là où les moines de
l’Ordre, les plus réputés pour leur science et leur expérience se sont montrés
invalides".
J: La bibliothèque et la
culture de Charbel
I- Présentation
1- Ses livres
"Il puisait ses méditations dans les livres suivants: Réflexion,
Préparation à la mort, du Saint Alphonse de Lighory, Confessions,
du Saint Augustin",
"La Perfection chrétienne",
la Théologie morale, Imitation du Christ, imprimé en lettre
syriaque, livre dont il était très passionné", "il lisait beaucoup les livres suivants: les livres
théologiques",
"Jardin des moines",
"Biographie de Saint Antoine le Grand",
La Lampe monastique, Interprétations
spirituelles,
Les Écritures Saintes, L’échelle des vertus, Jean
Climaque; anachorétismes, Saint Basile, Memre de Saint Éphrem", Traits de Saint Isaac le Syriaque
de Nivine, Memre du Sage
spirituel;
La vie
monastique, Jean de
Dalia; Mépris des vanités du monde, par le maître Didoxe Stella, de l’Ordre de
Saint François; Père
Jean, Eusèbe Nir Moubarak le Jésuite, La Balance du temps et le
trébuchet de l’éternité de l’homme; Les Gloires de Marie, par Saint
Alphonse de Lighory",
Le Martyrologe et Les Règles du novice, Règles et
Constitutions de 1732.
2- Sa culture
"Père Charbel était un homme de pure sainteté, qu’on prenait pour naïf,
mais au niveau spirituel, il était
érudit";
"j’ai appris personnellement qu’il était avisé et intelligent",
"connaisseur en théologie spirituelle, en syriaque, dont il traduisait en arabe,
en plus de ses connaissances en langue arabe, il était judicieux et convainquant
dans ses réponses",
"car, dans la théologie morale et les choses spirituelles, il appartenait à la
classe du célèbre Père Al-Kafri";
"dans ses dialogues théologiques avec les prêtres, il parlait volontairement"
"des questions sur la théologie spirituelle, traitant des âmes et du mystère de
la réconciliation",
"où il parlait de l’abondance de son coeur enflammé des
choses spirituelles et divines".
II- Récits et événements
1- Propos dévotionnels
"Lorsque je travaillais au couvent, je fréquentais l’ermitage pour aider
Père Charbel; et durant sa présence au couvent, quand il participait à la
panification, il entretenait des propos théologiques dont on tirait profit; il
était plus pertinent que les autres dans ses réponses qui, en plus de la
précision des connaissances, exhalait la douceur de l’expression, pétrie de la
vertu de l’humilité. Sage qu’il était, il ne répondait que lorsqu’on lui
demandait la réponse". "Il échangeait avec nous des propos
dévotionnels qui démontraient la profondeur de sa foi, citant des versets de
l’écriture Sainte, et des citations des livres spirituels, nous demandant de
trouver un autre vers qui doit commencer par la lettre finale de sa citation,
puis il en expliquait les sens".
2- Lisez ce chapitre
"J’ai connu personnellement Père Charbel en septembre 1898, à l’ermitage Saints
Pierre et Paul, à l’occasion d’une visite que j’ai
effectuée au couvent Saint Maron à
Annaya, quelques mois après mes vœux solennels, accompagné du Père Ibrahim
Al-Haqlani", "Mon compagnon de l’école", "décédé plus tard
en odeur de sainteté. A notre arrivée"
"Au crépuscule"
"nous entrâmes dans la chapelle de l’ermitage où Père Charbel était agenouillé,
recueilli sans bouger et immobile dans sa position".
"Nous visitâmes le Saint Sacrement",
"nous priâmes pour un moment, le
fixant de nos yeux, toujours persistant dans son attitude";
"Puis, nous sortîmes dans une galerie étroite où on a installé une poêle en
pierre brute, et nous vîmes l’autre ermite, le Père Makarios Sawma de Mechmech en train de cuisiner dans une
marmite en terre cuite"
"D’ailleurs, les ermites ne mangeaient qu’une seule fois par jour, c’était vers
le soir. Leur plat était formé d’un assaisonnement de lentilles, de pois chiche,
des haricots secs et du blé concassé, qu’on appelait soupe".
"Il nous a recueilli d'un visage rayonnant et un sourire pur qui montre son cœur
chaste, semblable au cœur d’un enfant. nous nous assîmes sur deux pierres
taillées, en bas d’un arc en pierre"
"Une fois les oignons hachés, il appela Père Charbel"
"nous le saluâmes; il répondit à voix basse, à peine audible, regardant la
terre, prononçant un seul mot: "Paix". Alors, Père Makarios lui
tendit une poêle à frire métallique, dans laquelle il avait mis un peu d’huile,
des oignons hachés, en lui disant: "prends et cuits ces oignons",
"il les prit sans nous regarder. Père Makarios retourne en portant un plateau"
"en osier"
"sur lequel il a mis deux assiettes, un peu de pain et du pourpier".
"Du persil, quelques pains, connus sous le nom, miche des moines, dont quelques
uns étaient en pièces, d’autres brûlés ; il dit au Père Charbel: "effeuille
ces pourpiers"; il reprit la poêle à frire, en versa le contenu dans la marmite
en terre cuite, puis remplit deux assiettes en terre cuite, tandis que Père
Charbel effeuillait les pourpiers, mettant les feuilles dans une assiette et les
tiges au bord du plateau.
"Père Makarios nous invita à manger; nous le remerciâmes sans y
participer; il s’adressa à Père Charbel: "Mange". Il pria, puis commença à
manger avec soin, assis par terre, les jambes croisées, silencieux regardant
tout droit devant lui. Il mangea des tiges des pourpiers que les autres n’en
mangent; il ne mangea pas des feuilles assaisonnées au sel et à l’huile. Père
Makarios se dirigea vers la vigne, nous apportant du raisin de la bonne qualité;
entre temps, Père Charbel avait fini son repas, demeurant dans la même position,
bras croisés, tête penchée, silencieux, attendant l’ordre; son compagnon lui
dit: "va visiter le Saint Sacrement puis reviens pour faire la vaisselle".
Au coucher du soleil, nous fumes nos adieux, recueillis et très émus; nous
retournâmes au couvent stupéfiés de ce que nous avons vu.
"En été de 1898, je passai les vacances au couvent de Annaya, en
compagnie des frères scolastiques. Un jour, vers 6h, nous sommes allés en visite
aux ermites; nous avons trouvé Père Charbel à l’église, agenouillé tout droit
sur le même plateau en acier, à la même place, comme nous l’avions vu la
première fois, l’année passée; en priant devant le Saint Sacrement, je tournais
mes yeux vers lui; je le voyais immobile comme une statue, son chapelet à la
main, regard fixé sur l’autel; j’aurais l’impression qu’il était extasié"
"il ne nous a même pas regardé; pendant que nous prions, nous le regardions,
espérant qu’il nous regarde or il ne s’est même pas du tout retourné, sans le
moindre mouvement";
"nous sommes sortis dans la cour de l’église, du côté ouest; pendant que
discutions et bruitions, Père Charbel ouvrit la porte et se tint silencieux à
nous regarder"
"bras croisés, nous regardant avec son visage rayonnant d’un sourire",
"omme s’il nous disait: ne faites pas de bruit pour ne pas me troubler la prière
dans ma solitude; nous avons été pris de vénération".
"Nous nous approchâmes de lui pour avoir sa bénédiction et embrasser ses
mains";
"chaque fois que quelqu’un de nous s’approchait pour le saluer, il pliait son
genou droit et penchait légèrement son corps touchant rapidement du bout du
doigt chacun de nous, nous empêchant de l’embrasser sur la main; il nous saluait
en souriant, répétant un seul mot à voix basse comme s’il balbutiait:"
"paix". Recueillis pendant une minute devant lui, nous l’avons vu
refermer la porte pour retourner à la prière, tandis que nous, nous nous sommes
retirés dans le bois";
"à l’ouest de l’ermitage, marchant sur le bout des doigts, échangeant nos propos
avec chuchotement pour ne pas troubler sa prière dans la solitude; nous avons
été pris de recueillement et de joie de l’avoir vu; puis, je me suis séparé des
frères et retourné seul à l’ermitage à l’église",
"en vue de le voir et lui parler. J’ai ouvert la porte de la chapelle, il n’y
était, dans le corridor non plus";
"j’ai fait une tournée à l’ermitage où je ne l’ai pas trouvé",
"alors que je suis monté sur le toit, et le voici assis sur un cylindre en
pierre",
"près du mur de l’église, comme s’il nous fuyait",
"livre à la main à lire la biographie de Saint Antoine le Grand. Dès que je me suis
rapproché de lui, il me tend le livre disant: "lis ce chapitre". Je l’ai
lu"
"debout devant lui"
"pendant qu’il écoutait, à peine ai-je fini la lecture, il prit le livre et sans
rien dire, il disparut"
"à l'église. J'ai pensais qu'il m'a donné la lecture, pour qu'il ne me
converse"
"c’était sa manière de recevoir les moines".
K: La confession de
Charbel
I- Présentation
1- Dévoilement des pensées
"Après la confession, le novice doit dévoiler
ses pensées à son supérieur ou son maître de novice, chaque nuit si c’est
possible: il s’agenouille devant son Père spirituel, humblement et dévotement,
tête sans capuchon, baisant la terre… et il dit avec respect: "mon Père, mon
coeur est loin de Dieu…je suis entièrement imparfait et dans l’erreur
devant Dieu… puis il extériorise ses pensées, les bonnes et les
mauvaises… demandant à son accompagnateur spirituel ses directives auxquelles il
doit tenir".
2- Ses confessions
hebdomadaires
"Il détestait le péché et
fuyait les causes qui y aboutissent",
"même il abhorrait de s’en souvenir. Tous ceux qui l’ont connu, ont témoigné
qu’il n’a pas commis volontairement un péché véniel".
"Ce qui était commun à tous c’est que, sa vie durant, il n’a jamais contrarié
les dix commandements et ceux de l’église, plutôt il souffrait quand quelqu’un
les transgressait".
"Aussi faisait-t-il tous les soirs, un examen de conscience sur tous ses actes
du jour comme le fait le commerçant prudent pour discerner s’il était gagnant ou
perdant; dans le premier cas, il rendait grâce au Seigneur, sollicitant plus de
grâce afin de pouvoir augmenter ses efforts dans le travail et multiplier ainsi
son gain et sa récompense; dans le deuxième cas, quoique minime fût la perte, il
prenait la résolution efficace pour remédier à la lacune qu’il aurait repérée".
"Ses confessions étaient ininterrompues soit quand il était dans le monde ou
dans sa vie monastique et sacerdotale".
"Il se confessait une fois par semaine",
"qu'il se confese une fois par semaine"
"et les moines se confessent tous les dimanches et les jours des fêtes".
"Il était d’une sagacité et prudence
sans scrupules, doté de la vraie science approfondie de l’esprit",
"ne rejetant aucun bon conseil durant toute sa vie".
"Durant son séjour au couvent de Kfifane, il avait deux accompagnateurs
spirituels: le Père Nehemtallah
Al-Kafri, élu plus tard Supérieur Général, et Saint Nehemtallah Al-Hardini".
"Au début de sa vie anachorétique,
Père Alichaa fut son directeur spirituel; après le décès de ce dernier,
ce fut le Père Libaos Al-Ramati, transféré plus tard à l’ermitage du couvent de
Qattara; et enfin, jusqu’à son décès, ce fut Père Mokarios qui a rempli le rôle
de son conseiller spirituel".
3-Au service des fidèles
"Il obtint l’autorisation de la confession du patriarche Boulos Massaad,
le 20 février 1863","pourtant
il ne confessait les fidèles que sous la demande du supérieur",
"car il n’était pas désigné à leur
service qui, après leur confession
chez lui et les directives dont il les comblait, ont témoigné et loué son zèle
pour leur bien et son influence efficace sur leurs âmes".
"Aussi tous ont–ils vanté sa perspicacité et ses conseils judicieux",
"visant la construction des autres et leur progrès dans
leur vie spirituelle";
"et en cas nécessaire, il ne retenait pas ses conseils à ceux qui le
fréquentaient";
"personnellement, j’ai vécu l’expérience de la force de ses directives
sapientielles, la première fois où je me suis confessé chez lui",
"plusieurs fois";
"aussi l’ai- je pris comme accompagnateur spirituel".
"Il priait pour les
pêcheurs, leur enseignait des directives salvifiques quand il écoutait leurs
confessions",
"les admonestait énergiquement pour leurs péchés, en leur imposant une
compensation très ferme".
"L’un des repentis m’a raconté qu’il s’était confessé chez Père Charbel, ses directives pénétraient dans l’âme plus que celles des
confesseurs auprès de qui il s’était confessé, comme les Pères Jésuites et
d’autres";
"il était plus clairvoyant en esprit que les docteurs".
"Il évitait de confesser
les femmes, pour conserver la vertu de la chasteté; cependant, il s’y pliait
sans plainte à la demande du supérieur".
II- Récits et événements
1- Pour verser l’espoir dans leurs
cœurs
"Son exemple exerçait une
grande influence sur les autres",
"moines et laïcs",
"œuvrant de son mieux à semer l’espoir dans leur cœur";
"si un moine tombait gravement malade, on demandait au supérieur de lui envoyer
Père Charbel pour le munir des derniers sacrements:"
"confession et communion…"
"pour réconforter les mourants et verser dans leurs cœurs l’espoir et
l’espérance afin qu’ils puissent admettre leur départ de ce monde, ayant
l’espérance dans la Résurrection".
"Il allait passer toute la nuit au chevet du malade, assis sur une chaise, ne
s’éloignant de lui que pour réciter son office de prière au cas où la situation
le lui permettait";
"quand le supérieur l’ordonnait de telles missions, il réalisait bien
volontiers".
2- Seul parmi les moines
"Frère Sarkis de Ehmej décédé d’une mort naturelle, muni des derniers
sacrements, en la présence du curé,
Youssef Issa et Père Charbel de Bqaakafra, le 14 Mars 1874".
3- Un conseiller
judicieux
"Il était, durant toute sa vie, un exemple de simplicité, en parole et
en action. Dans ses propos spirituels, il se distinguait par la perspicacité et
la direction judicieuse. Je me souviens qu’il m’avait dit une fois: "ne
prononce pas un mot, susceptible de causer un péché, s’il est bénéfique, dis-le,
sinon abstiens-toi de le dire".
4- Mon recueillement à la suite de ses
conseils
"Lorsque Père Charbel sortit de l’église pour regagner sa cellule, je
l’arrêtai, le priant de me confesser; il rentra en me disant: "suis-moi".
Après la confession, je promenai mon regard sur l’intérieur de l’église où
j’aperçus des fenêtres dans le toit et les murs pouvant causer son écroulement;
je lui dis: "mon Père vous passez toute la nuit dans cette chapelle et il se
trouve que l’ermitage est exposé aux foudres; il suffit qu’un tonnerre s’abatte
là-dessus pour l’ébranler et elle s’écoulera sur vous. Pourquoi ne la
restaurez-vous pas?" Il répondit: "ne nous en préoccupons-nous pas" je
répliquai: "je dirai, moi-même au Père Supérieur de la restaurer" il me
répondit: "on ne lui dis rien, mon fils, où est-ce que je peux trouver un
endroit plus Saint que cet autel
pour y mourir?" j’éprouvai du recueillement à la suite de cette réponse
comme le sentiment qui me prend en écoutant ses conseils pendant la
confession. Puis il partit pour regagner sa cellule, et nous aussi, nous
allâmes".
5- Sa personne réunissait les qualités du
confesseur
"Il fut célèbre pour sa sainteté par rapport à tous; intelligent et très
compétent dans ses conseils et ses directives, il réjouissait les cœurs de ceux
qui se confessaient chez lui. Moi-même, j’ai été plusieurs fois dans son
confessionnal, je souhaite à présent, de tout mon cœur, avoir la chance de
trouver un prêtre comme lui pour me confesser chez lui quotidiennement tout au
long de ma vie, parce que Père Charbel jouissait d’une mémoire rarissime dans sa
sagacité au point où le confessé avait l’impression que Père Charbel connaissait
le monde invisible, tellement il se rappelait des cas de ses confessés quoique
leur absence fût très
longue. En plus de sa connaissance et sa précision dans la direction des âmes,
il savait les remédier fermement; capable d’attirer le cœur du
confessé,
malgré
la rigueur de son admonestation pour le péché commis et la compensation sévère qu’il imposait".
"Sa personne réunissait toutes les qualités du confesseur:
-
Très pertinent dans
ses conseils, ses questions et ses admonestations.
-
Un juge connaisseur
en théologie spirituelle, d’une excellente connaissance.
-
Un médecin adroit qui
appliquait le traitement adéquat.
-
Un Père tendre qui
ouvrait ses bras au pêcheur, le rendant passionné pour la conversion et la
confession".
6- Très impressionnantes
"Il écoutait les confessions des hommes, strictement ceux qui le lui
demandaient; il les envoyait d’habitude auprès de son compagnon d’ermitage; ses
directives étaient très impressionnantes pour ceux qui les écoutaient dans le
confessionnal; c’est ce que m’a raconté mon père qui s’est confessé chez lui
pendant environ sept à huit fois, il avait alors vingt cinq ans",
"il trouvait ses conseils très utiles au salut des âmes".
L: Serviteur de
tous
I- Présentation
"Que les gestes et les œuvres des moines soient considérés par ses
confrères comme bas et avilissants";
c’est pourquoi "quelques uns de ses confrères se moquaient de sa naïveté",
"alors qu’il incarnait l’exemple du chrétien par son humilité, s’efforçant de
camoufler sa vertu et de cacher ses bonnes actions. Il s’attristait et se
tremblait à la louange des autres envers lui".
"Il représentait la modestie, s’éloignait des gens et des confrères, préférant
la cachette, l’isolement et le silence, humain, selon les apparences, vivant
dans le ciel en réalité. Lorsque les gens demandaient son intercession, il leur
disait en s’éloignant: "fiez-vous à Dieu et c’est lui qui dispose".
"Quand on l’avisait d’une chose, même s’il n’en était pas fautif, il
s’agenouillait bras croisés demandant le pardon, tête penchée vers la terre, ne
se remettant debout que lorsqu’il aurait reçu l’ordre de se relever";
"quand on l’admonestait, vite, il s’agenouillait silencieux et bras croisés,
sans chercher à se justifier et ne se relevait qu’après avoir reçu l’ordre et la
bénédiction du supérieur pour aller au travail";
"si quelqu’un lui disait: "tu es Saint "; il sursautait, secouait sa tête et
fronçait ses sourcils",
"se considérant comme le dernier des humains et le plus grand pêcheur; quand on
demandait ses prières, il répondait: "je suis pêcheur".
"Il était devenu l’humilité même, veillant à ne jamais parler de
lui-même; et par conséquent, il était comme un mort à ce monde".
Quant à ses confrères, quelques uns d’entre eux se moquaient de lui et de la
rigueur de son ascétisme, entre autres, le cuisinier qui lui a mis dans la
lanterne de l’eau au lieu de l’huile".
"Des gens méprisaient ses vils habits";
"il s’est fait humilier jusqu’à l’anéantissement, et aurait souhaité
l’anéantissement total, se montrant sans volonté, écervelé, insensé, méprisable
dans son habit, son manger, dans
son sommeil, dans son agenouillement, dans sa couche, dans sa cellule et dans
son travail épuisant";
"il s’oubliait".
"Il acceptait volontiers le mépris des autres et sentait la joie quand
on l’insultait";
"il ne commettait rien qui porte
atteinte à la pudeur. Malgré qu’il fut prêtre connaisseur en théologie
spirituelle, ancien dans l’Ordre et modèle de la vertu, il s’adonnait aux
travaux manuels durs, plutôt aux plus bas de ces travaux; il ne réclamait ni
fonctions ni activités missionnaires qui pouvaient être plus convenables à son
statut sacerdotal que ses travaux-là";
"non plus un poste pour se montrer hautain aux autres; il cherchait toujours la
moindre des parts, la moindre des places. On l’entendait dire: "je ne mérite
pas d’être parmi mes confrères, ni d’atteindre leur dignité, car, je suis
inférieur à tout le monde".
"Il se considérait plus bas que tous les moines dans les fonds et dans la forme,
s’attribuant toute mesquinerie".
"Quand nous travaillions ensemble au champ, il se comportait comme s’il était le
serviteur de chacun de nous",
"choisissant les services et les travaux
les plus modestes, comme: le balayage, la vaisselle, services, non
destinés aux moines ordonnés prêtres"
"et qu’il effectuait sur le champ et volontiers";
"lorsque les moines tentaient de
lui baiser les mains et avoir sa bénédiction; il s’efforçait de les en
empêcher".
II- Récits et événements
1- Étranger
"Père Charbel était le seul au couvent d’origine du nord du Liban, de la
région de Jebbé, et non pas de celle de Jbeil, comme le cas de tous les moines;
toutefois il obéissait d’une obéissance singulière à tous ceux qui se trouvaient
au couvent; moines et laïcs lui adressaient des ordres, soit pour se moquer de
lui ou à titre de plaisanterie; pourtant il n’a jamais rejeté un ordre. Personne
ne le défendait ni le respectait à part le supérieur qui se mettait en colère
contre ceux qui faisaient souffrir Père Charbel ou se moquaient de lui; quant à
lui, il se consacrait au travail, à la prière et à l’obéissance, sans s’indigner
contre ses moqueurs; il ne parlait que rarement et rien que pour répondre aux
questions de son interlocuteur";
"que de mépris, en ci-jordanie, n’as-tu pas enduré pour moi? Je veux disparaître
de la terre et être la dernière en toutes choses, pour toi Jésus" (poésie de
Thérèse cf le texte).
2- Que Dieu me donne la force pour
obéir
"Lorsque mon oncle, Abdel Ahad Al-Houssaïni, était supérieur du couvent
Saint Serges et Bakhus à Qartaba,
il m’a affecté à son service. Un jour, nous sommes venus au couvent Saint Maron
à Annaya où moines et ouvriers s’affairaient à préparer une fournaise; Père
Charbel s’appliquait à
assurer des bûches; c’est alors que Père Roukoz Hanna de Mechmech s’adressa à
lui, pour plaisanter devant tous les assistants: "tous les moines, d’un commun
accord,
ont décidé de te jeter dans la fournaise qui manque de branchage, car le corps
humain, attise plus que les bûches, le feu et sa chair alimente bien la
fournaise; ainsi, la pierre sera-t-elle rapidement bien cuite". A peine, Père
Charbel a-t-il entendu cela qu’il se mit à genoux en disant: "que Dieu me
donne la force pour obéir". Cela veut dire: je suis prêt à sacrifier
ma vie pour obéir. Ému, le Père Élias de Mechmech, alors assistant,
le réprimanda en disant: "aie honte! Pourquoi plaisantes-tu ainsi avec Père
Charbel? Ne sais–tu pas qu’il porte en lui l’esprit de Dieu? Que Dieu nous donne
la bénédiction de son intercession. Alors, Père Roukoz demanda le pardon
à Père
Charbel qui répondit: "Que Dieu pardonne tout le monde".
3- Je suis le grand des
pêcheurs
"Personne ne se rendait compte de sa présence, tellement il était
attaché à la vie retirée; lorsque les visiteurs venaient demander sa bénédiction
et ses prières, il les rencontrait sans les regarder et leur disait:
"demandez au Seigneur de vous donner selon votre foi"; si on lui
disait: "vous êtes Saint ", il
s’agitait en répondant: "je suis le grand des pêcheurs". A l’ermitage il
s’appliquait à des
travaux méprisables et accomplissait ce qui le rabaissait. Supérieur de
l’ermitage qu’il était, toutefois, il s’est imposé l’obéissance à son compagnon,
le Père Makarios, plus jeune que lui; c’est lui qui faisait la vaisselle et
balayait l’ermitage; s’il arrivait que le supérieur admonestait un moine en sa
présence, ou bien qu’il l’a averti lui-même pour une chose, même s’il n’était
pas fautif, il s’agenouillait selon la coutume monacale, sollicitant le pardon
comme un coupable et ne se relevait qu’à l’ordre du supérieur".
4- Ce que le chat a
laissé
"Je vais vous raconter un fait que j’ai vu de mes propres yeux et dont
je fus très ému; une scène dont je me rappelle toujours avec beaucoup d’émotion,
de respect et d’émerveillement: Père Charbel mangeait avec son compagnon en ma
présence; leur plat était formé du blé concassé cuisiné avec du pissenlit, pris
dans la nature; après avoir fini, Père Makarios essuya la sauteuse avec un
morceau de pain qu’il jeta au chat; ce dernier n’ayant pas faim, lécha le reste
du met sans manger le pain; entre temps, Père Charbel qui lavait les assiettes
retourna pour trouver le pain sur un passage où on peut bien le pietiner; il le
ramassa, le passa sur sa tête et après l’avoir secoué de la poussière, il fit le
signe de la croix et le mangea, sans remarquer ma présence, car il ne levait
jamais son regard; à ce moment-là, je me suis assuré qu’il ne regardait
personne; d’autant plus, il me demandait assez souvent: "qui es-tu?" J’ai
eu beau essayer lui rappeler mon nom, il y revenait le deuxième jour parce qu’il
ne levait pas les yeux pour me voir".
5- A quoi bon ces
choses?
"Il cherchait à être méprisé de tous, tout au long de sa vie, il a gardé
son regard baissé; il ne regardait ni ses confrères, ni les paysages naturels.
Un jour j’étais en compagnie du Père Nehemtallah de Mechmech,
tenant en main des jumelles, fixées sur Beyrouth; Père Charbel nous côtoya,
portant une corde pour nouer un fardeau de bois; je luis dis: "Gardez avec vous
ces jumelles qui vous permettront de voir Beyrouth très proche de vous". il
répondit: "Non, non à quoi bon ces choses?" Puis il partit pour
continuer son travail".
6- A ne pas lui causer des
épreuves
"J’ai entendu Père Élias de Mechmech avertir le public du couvent à ne
pas causer des épreuves à Père Charbel, soit en parole ou en autre chose,
disant: "c’est un homme de Dieu, il cache en lui l’esprit de Dieu,
respectez-le". Père Élias l’aimait bien et l’estimait pour ses vertus
rarissimes. Une fois, il a dit devant moi: "j’ai beaucoup essayé détourner Père
Charbel de la pratique du travail pénible qu’il effectue au champ pour lui
confier un boulot moins fort au couvent, pour le reposer; mais dès qu’il finit
le travail que je lui confie au couvent, il se dirige aussitôt au champ".
7- Des insultes
- Bienheureux si l’on vous insulte et vous
persécute (Mt
5,11)
"Une fois, il était en
train de réciter
son office de prière,
lorsque Père Ighnatios de Mechmech
l’appela et lui dit avec rigueur: "laisse la prière et viens ici". Il obéit
dévotement",
"supportant les insultes et les railleries des autres, tantôt humblement, tantôt
avec patience et joie":
"celui qui s’abaisse sera relevé et l’humble de cœur trouvera le repos de son
âme; celui de qui on dit tout mal, sa récompense sera grande au ciel, c’est
pourquoi il se réjouissait et il était content".
- Réjouissez vous et exultez, car votre récompense
sera grandissime au ciel (Mt 5,11)
"Tandis que nous ramassions les raisins de la vigne de l’ermitage, le
supérieur me demanda d’aller remplir la gargoulette au puits de l’ermitage; une
fois arrivé, j’attachai la corde à la manette de la gargoulette rapidement et la
jetai négligemment dans le puits, sans me rendre compte que Père Charbel était
derrière moi à m’observer et il me dit: "mon frère, Saint Antoine a choisi le discernement.
Tandis que toi tu
risques de la casser en la descendant en vitesse dans le puits, et alors ce sera
contre la pauvreté". Je répliquai énergiquement: "va dans
ton église! Tu résides à l’ermitage et tu fais semblant d’être Saint !" Il me
répondit gentiment et docilement, tête penchée: "Pardonnez–moi, mon frère, par
amour du Christ". Chacun de nous partit de son côté, lui vers l’église et moi
vers la vigne", "et chaque fois qu’un propos
aboutissait aux protestations, précédait son confrère disant
"pardonne-moi".
- Ainsi ont-ils presécuté
les prophètes avant vous (Mt 5,11)
"Un jour, tandis que je labourais la vigne de l’ermitage avec quelques
domestiques du couvent, j’ai vu
Père Charbel en train de hausser les ceps de vigne du passage des vaches; or il
arriva qu’une d’elles en a piétiné un et le cassa; là, Père Makarios intervint
et dit au Père Charbel:"voici un cep
cassé à cause de ta négligence"
"que fais-tu!? Pourquoi tu l'as laissé aux pieds des vaches".
"Immédiatement, il s’agenouilla, bras croisés, en disant:"
"pardonez-moi pour l’amour du Christ",
"silencieux, priant et demandant pardon pour son méfait"
"Aussi Père Makarios m’a-t-il rapporté, disant: "Père Charbel m’a dit
une fois: si je suis un âne, sois patient avec moi, et supporte-moi, pour
l’amour du Christ".
M: On n’entend pas sa voix
(Mt
12,19)
I- Présentation
"Le moine doit garder, discernement, le
silence", d’où "il parlait très rarement. Il ne
faisait entendre sa voix qu’en lisant l’Église, les paroles de
consécration", "en chœur"; il ne s’adressait ni aux hommes ni
aux femmes ni aux moines", "il incarnait la règle, on ne le
voyait qu’à l’église ou bien au travail, sans faire entendre sa voix; il ne
cherchait pas la diversion avec un visiteur ou un muletier; au travail, il ne
conversait avec personne", "ne se distrayait pas à guetter les
nouvelles des gens ou celle d’une personne bien déterminée et si l’on
interrogeait, il répondit gentiment, tranquillement et brièvement".
"Il passait la veillée silencieux par
mortification; mais il était disponible à la parole quand on l’interrogeait sur
une question spirituelle ou théologique; alors là, il abondait volontairement
dans ses réponses"; "sinon sa vie ressemblait à celle des
cloîtrés silencieux". "Sa langue n’était vouée qu’aux
confidences avec Dieu et la méditation en lui". "Il était un moine de travail, de
prière et du silence contemplatif". "Ses paroles marquaient une humilité
profonde", "tellement pris par le ciel à croire
qu’il était d’un autre monde"; "à part ses conversations avec ses
supérieurs", "il ne se permettait pas de parler
avec les autres que des sujets spirituels".
"A l’église comme à l’ermitage, il
était comme un ange, il ne se faisait pas entendre", "sinon pendant la messe", "silencieux dans son
travail", "d’un mutisme étonnant"; "je m’étonnais comment il pouvait
vivre ainsi, dans le silence, l’ascétisme, la prière et le travail. Je ne
comprenais pas le sens et les détails de tout cela comme je le réalise
aujourd’hui. J’ai fini par comprendre qu’il était Saint ; ce mot que répète tous
ceux qui l’ont connu"; "l’abstenance à la parole pour nous
était un phénomène étrange, que serait-ce chez Père Charbel qui a vécu cinquante
ans au couvent et à l’ermitage, silencieux à travailler et à prier, ascète dans
son habit et son manger, sans connaître le repos et la joie des
humains".
II- Récits et événements
1- Le cas nécessaire
"Notre règle implique obligatoirement le silence après complies, au
réfectoire et à l’église. Durant ces heures, il ne répondait aux moines que
quand il était nécessaire de le faire. Les confrères l’imitaient et le
présentaient comme un idéal aux novices, sa vie durant et après sa mort. Parmi
tous les moines, aucun ne l’égalait dans son observance à la règle".
2- Une mèche, jamais éteinte (Mt 12, 19-20)
Si l’un des novices transgressait la règle, il ne l’accusait pas auprès
du supérieur, se faisant le sourd-muet qui ne se mêlait à rien, sensible
seulement aux ordres qu’on lui donnait".
3- Je me suis égaré du
chemin
"Une fois, il est allé à Mechmech pour participer aux funérailles et
n’est rentré que le soir. Je lui ai demandé pourquoi il avait tardé; il me
répondit: "je me suis égaré du chemin, le brouillard était très épais et me
trouvai à Houjoula, je repris mon chemin en me repérant petit à petit jusqu’au
couvent. Je répliquai: "n’as-tu rencontré personne?" Il me répliqua: "si
plusieurs" je rétorquai: "pourquoi ne t’informas-tu pas du chemin auprès
d’eux?" Il se tut, en effet, il n’interrogeait personne ni ne s’adressait à
personne, même en s’égarant par les chemins. Singulier est son cas! Ni
anachorètes ni ermites n’ont vécu comme lui. Je n’ai jamais vu un pareil, ni
avant ni après lui, parmi les moines, les laïcs, les prêtres et les
évêques.
Dieu est merveilleux dans ses Saints! Le cas de ce moine est extrêmement
étonnant!"
4- Très, très parcimonieux en
parole
"Je l’ai connu très, très parcimonieux en parole. Une fois il m’a
demandé: "d’où viens-tu?" Une autre fois: "où tu fais tes
études?" Je répondis: "À Kfifane"; il continua: "il est dit dans
l’évangile: vous êtes vraiment mes disciples. Quelle est la fonction
grammaticale de vraiment?" J’ai répondu autant que je savais; puis, à mon
tour je lui ai posé une question
gramaticale, il m’a répondu: "mon frère je ne sais pas".
5- Il n’a prononcé aucun
mot
"Je connus personnellement Père Charbel entre 1893 et 1895, alors que
j’effectuais une tournée chez les ermites de mon ordre, en compagnie de quatre
moines, entre autres: Père Ibrahim Harfouche, Père Youssef, Père Youssef Ghébalé; quant aux deux autres, je ne me
rappelle plus de leurs noms. Nous avons été reçus par Père Makarios à qui nous
avons demandé de nous appeler Père Charbel qui arriva; nous le saluames, baisant
sa main, et demandant sa bénédiction. Il me demanda: "D’où venez-vous, mes
frères?" Nous répondîmes à sa question et chacun de nous se présenta, citant
son nom, son couvent et son village natal. Il répondit: "vous avez entendu
parler du décés de
quelqu’un de nos confrères dans les couvents que vous avez visités pour dire une
messe pour le repos de son âme?" Nous avons répondu par
la négation; il se retira dans sa cellule, nous laissant avec son compagnon qui
nous dit: "permettez-moi de préparer le mets, c’est l’heure du repas et vous
mangerez avec nous". Il apporta un plat en poterie où il a mis des morceaux de
pain sec avec quelques légumes, y ajoutant un peu de vinaigre, des oignons et de
l’ail; puis il a appelé Père Charbel au repas, nous invitant de partager avec
eux le mets. Nous l’avons remercié sans manger; pendant qu’ils prenaient leur
repas, Père Charbel n’a prononcé aucun mot"
"pour garder le silence à table",
"tandis que Père Makarios a continué sa conversation avec nous".
6- Est-ce que tu pratiques tes obligations
spirituelles?
"Une fois, son frère est venu de Bqaakafra pour lui rendre visite; il
sonna; Père Charbel arriva pour voir qui sonnait sans ouvrir la porte; le
visiteur répondit: "je suis le frère de l’ermite, Charbel", l’ermite
répondit: "patience pour dire à mon compagnon s’il veut que je t’ouvre la
porte". Il alla chez son compagnon et lui dit: "mon frère est à la porte,
veux-tu que je lui ouvre?" Il lui répliqua: "bien sûr, reçois-le". Durant
leur rencontre, il n’a fait que répéter la même chose: "comment
vas-tu? Est-ce que tout va bien? Est ce que tu pratiques tes
obligations spirituelles, ainsi que ta famille?" Puis il le congédia
peu après".
7- Comme Saint Nester
"Il faisait comme Saint Nester qui, au moment où il est entré au
couvent trouva un âne près du portail, se dit en lui-même: "Nester, Nester, toi
et cet âne vous êtes similaires; si ce dernier peut parler, alors, tu pourras
parler au couvent". D’après mon expérience personnelle avec Père Charbel,
je le trouvais intelligent, connaisseur en théologie spirituelle, passionné pour
l’étude; toutefois, il se comportait comme Saint Nester: un âne dans son silence, un
philosophe dans sa prière et son train de vie, anachorète au couvent. Je ne l’ai
jamais entendu dire: "je suis si fatigué; j’ai faim ou bien j’ai soif".
8- A l’écoute du bien-aimé (Lc 10, 39)
"Malgré que Père Charbel n’eut été ni imbécile ni atrabilaire et de
tempérament morose, défauts de ceux qui haïssent la fréquentation des gens, il
faut dire qu’il aurait décidé que sa langue ne prononçât que des louanges à
Dieu, l’obéissance aux ordres des supérieurs et la disponibilité de s’acquitter
d’une mission bénéfique au prochain au niveau spirituel. C’est pourquoi, il ne
parlait que très peu, ne prenant l’initiative de la parole que très rarement;
plutôt il ne le faisait que pour répondre à une question; ainsi, s’est-il
distingué parmi les ermites, non seulement dans son observance pour le règlement
de l’ermitage, mais aussi par son silence perpétuel et son travail continuel; sa
vie était une chaîne ininterrompue, comprenant trois anneaux; l’observance de la
règle, la prière et le travail, s’y
ajoute le silence; il ressemblait aux moines contemplatifs silencieux plutôt
qu’aux moines Libanais. Tous les autres ermites s’étonnaient de son grand
silence perpétuel".
9- Il ne me répondait
pas
"Lorsque je l’aidais à arracher les arbrissaux épineux et les troncs
d’arbre, il n’ouvrait pas la bouche ni ne m’adressait la parole; quand je
m’ennuyais du silence au champ, je lui parlais, mais il ne me répondait pas".
10- Il ne se distrayait à
rien
"J’ai fréquenté des moines et des ermites, tous vénérables, mais
personne ne ressemblait au Père Charbel. Les autres ermites, qui sont morts
parlaient avec nous et les vivants ne cessent de dialoguer avec nous quand nous
leur rendons visite, cherchent à avoir des nouvelles, nous regardent et
reçoivent bien leurs parents; tandis que Père Charbel ne conversait avec
personne, ne se distrayait à rien et ne dévisageait aucun interlocuteur".
11- Les gens le prenaient pour
muet
"Père Charbel était un ange en corps humain, un philosophe sans
philosophie, un idéal de sainteté et de perfection; il avait une langue, et les
gens le prenaient pour muet", "comme un petit enfant dans les bras de
sa mère, avec la seule différence: on n’entendait pas sa voix".
12- Il parlait rarement
"Durant la période que j’ai passé à Saint Maron, du vivant de Père
Charbel, je n’ai pu voir en lui que l’homme silencieux, isolé, non seulement des
gens, mais aussi des moines; il ne se mouvait que par ordre de l’obéissance,
comme s’il était une machine. Il ne parlait pas devant moi, pour vous raconter
des anecdotes sur sa vie; il ne se mêlait à rien pour vous décrire son train de
vie avec les gens";
"il travaillait quatre ou cinq heures avec les novices qui parlaient autour de
lui, alors qu’il était silencieux, et il ne parlait que rarement".
13- Il ne conversait pas avec
moi
"Il n’a jamais conversé avec moi, contrairement aux deux autres ermites
qui me parlaient. Je ne l’ai jamais vu se mêler aux visiteurs ou aux autres; et
au cas où l’un d’eux lui demandait de lui bénir l’eau, il le faisait et lui en
versait le premier".
N: je m’égayais dans mes
souffrances (Col 1,24)
I- Présentation
"Le moine doit rendre grâce à Dieu pour la maladie plus que pour la
bonne santé, confiant que c’est une épreuve du Seigneur pour son bien"; "Père Charbel endurait des souffrances
stomacales astroces sans suivre un traitement, sans même un calmant lorsque la
douleur devenait insupportable, répétant toujours: "que la volonté de Dieu
soit faite".
"Il a supporté la colique chronique qui s’aggravait durant la saison de
la neige sans plainte ni traitement; il n’a jamais parlé à personne de son état
de santé, ni n’a réclamé la visite d’un médecin",
"n’exprimant aucun goût à un rafraîchissant en été ou à un chaud en hiver,
malgré le froid mordant à l’ermitage";
"il n’a jamais dit qu’il était malade",
"portant l’habit d’été en hiver, ne s’approchant pas du feu comme les autres
ermites, passant son temps à prier à l’église, agenouillé assez souvent à terre
nue".
"Il portait en permanence le cilice",
"directement sur sa chair et non pas au-dessus d’une flanelle (selon le terme
moderne)".
"Je me demandais comment il pouvait supporter cela; en particulier durant
l’été",
"il mettait une ceinture en fer épineux,
appliquée sur sa chair";
"au témoignage de ses compagnons, il se donnait la discipline".
"Ne m’abandonnez pas aux séductions de la terre, laissez-moi atteindre la
lumière pure; c’est alors que je deviendrai un vrai humain; laissez moi imiter
les souffrances de mon Seigneur".
II- Récits et événements
1- Un chômage contre la pauvreté sur ma
conscience
"Ce qui lui arrivait soit de Dieu soit des hommes, il l’acceptait avec
patience et sérénité, comme la colique
chronique dont il était atteint; il ne s’est jamais appliqué un traitement,
supportant ses afflictions avec une patience étonnante, cachant ses peines aux
autres avec discrétion".
"Or, il arriva une fois, pendant que nous labourions la vigne de l’ermitage,
moi, Fr. Élias Al-Mahrini, responsable du champ, et le domestique, Sleiman
Al-Manzili; aussi Père Charbel et son compagnon à l’ermitage, Père Makarios, qui
nous assistaient au travail, que Père Charbel commença à se cramponner, à
pencher son dos, ses mains serrant sa hanche, laissant échapper des plaintes à
cause de sa souffrance; je demandai à Père Makarios: "qu’est-ce qui arrive à
l’ermite? Je le vois souffrir! Il me répondit: "il a une crise de colique
rénale". Je répliquai: "qu’il aille se reposer, et nous demandons un ouvrier
pour le remplacer". Père Makarios me répondit: "il veut opprimer lui-même"
tandis que nous continuions le travail et qu’un autre laboureur nous dépassait
de sillon, voilà que Père Charbel se dirigea vers un cep pour le dégager du
passage des bœufs, poussant des plaintes plus aigues qu’avant, ce qui signifiait
que le mal s’aggravait. Je lui dis: "vas-y doucement, mon maître je peux arrêter
les bœufs". il me répondit d’une voix faible et intermittente: "mon maître,
ce sera un chômage contre la pauvreté sur ma conscience", poursuivant son
travail toute la journée malgré sa douleur. Le soir, nous avons mangé des
lentilles avec une salade au pourpier;
j’ai vu Père Charbel ramasser les tiges du pourpier, les couper et les
manger";
"à l’aube, j’ai remarqué qu’il se démenait, à cause d’une douleur insoutenable;
à ma question, Père Makarios me répondit: "c’est le retour de la colique" alors
j’ai eu pitié de lui et le priai de cesser le travail, il refusa de nous
laisser, persistant toute la journée à travailler avec assiduité, comme s’il
était en bonne santé".
2- J’ai eu les yeux
mouillés
"Sur ce, vous avez pu remarquer que toute sa vie fut une suite de
mortifications, au point que son corps s’y est adapté et son âme y a trouvé son
repos, tellement qu’il a soumis complètement ses sens à la domination de son
esprit; l’oppression de lui-même est devenue une chose naturelle plutôt une
échappatoire où il trouvait satisfaction après de longues années de pratique
d’ascétisme. Je me rappelle qu’en mai 1897, nous étions en train de labourer la
vigne de l’ermitage; l’heure du petit déjeuner arriva, mais Père Charbel
continuait à reconstruire les murs qui entouraient la vigne; j’ai prié son
compagnon, Père Makarios de l’appeler pour le petit déjeuner; il m’a répondu:
"lui, il mange l’après-midi". A l’heure du déjeuner, il est allé poursuivre
son travail aux murs; aussi ai-je demandé à Père Makarios de l’ordonner de venir
manger avec nous, par pitié pour sa fragilité; mais son compagnon m’a répondu,
en disant: "il mangera après". Le soir, nous avons amené le bétail pour le faire
paître dans le bois; un moment après, je suis retourné à l’ermitage pour boire;
alors j’ai vu Père Charbel en train de manger les tiges du pourpier qu’il avait
ramassées et hachées; devant cette scène, j’ai eu les yeux mouillés, rejetant la
responsabilité sur Père Makarios en lui disant: "ayez pitié de l’ermite; vous le
laissez manger les tiges du pourpier après son travail pénible, sa maladie et
ses douleurs"; il me répondit: "il est content de manger ce qu’il mange, laisse
le". Puis, je me dis: "où sommes-nous des vertus de ce Père? Il a vraiment incarné toutes celles des
anachorètes de Scète (la Haute-Égypte); il a dépassé de loin ce
que nous lisons dans le livre (Jardin des moines) et celui de (la perfection
chrétienne)".
3- J’ai été secoué de
pitié
"Je l’ai vu, une fois, transporter les bûches sur son dos du fond du
bois jusqu’à la vigne; puis il en faisait de lourds fardeaux qu’il montait à
l’ermitage; là, j’ai été secoué de pitié pour un vieillard qui a dépassé les
soixante-cinq ans. J’ai rejeté la responsabilité sur son compagnon, Père
Makarios qui s’en est desculpé, en disant: "il veut ainsi dompter lui-même".
4- Du
riz au beurre à l’ermitage?
"Une fois Père Makarios lui dit: "tu endures des douleurs aux
reins, laisse-moi te préparer une soupe de riz au beurre", il répondit d’une
voix très basse: "du riz au beurre à l’ermitage?! Non".
5- Pour les souffrances de
Jésus
"Lorsque je lui demandais pourquoi il avait noué une branchette de
vigne autour de sa tête et
un poil de chèvre autour de son poignet, parfois il me répondait: "j’ai mal à
la tête, qu’il soit associé aux souffrances de Jésus".
6-
Personne ne se rendait compte de ses souffrances
"J’ai ouï dire que les ermites ont préparé du végétal sauvage, dont une
espèce était nuisible; Père Charbel en a mangé et il est tombé malade sans se
plaindre, toutefois on n’a pas remarqué son dérangement, c’est que personne ne
se rendait compte de ses douleurs et ses maladies".
7- Il piétinait les arbrisseaux épineux pieds
nus
"Lorsqu’il était à l’ermitage, je le voyais en habit déchiré, portant un
fardeau d’arbrisseaux épineux, qu’il nouait avec une corde, les piétinant, pieds
nu qui saignaient à cause des épines".
8- Des bas en laine
"Une fois, le supérieur l’ordonna de porter des bas, fabriqués
localement avec de gros fils de laine, pour protéger ses pieds de l’humidité,
car il souffrait des troubles estomacales; il les a portés une seule fois par
obéissance pour ne plus les remettre de toute sa vie".
9- Il se réchauffait pour un bref
moment
"Quand il faisait très froid, en hiver, Père Makarios l’appelait dans la
cuisine pour se réchauffer; par obéissance, il allait pour un bref moment puis
il se retirait pour aller dormir dans sa cellule, tandis que son compagnon
dormait à côté du feu, vu le froid mordant à l’intérieur de l’ermitage".
10- Je me suis moqué de
lui
"Une fois, il arrachait les arbrisseaux épineux du champ pour en
entourer la vigne d’une haie. Je l’ai vu choisir un endroit isolé, croyant que
personne ne pouvait l’y voir; puis, il enleva son habit pour le nettoyer des
puces et des poux; ma curiosité me poussa à le contempler sans l’habit et
j’observais qu’il portait le cilice sans une flanelle en dessous, je commençai à
me moquer de lui; je n’ai pu réaliser la portée de son ascétisme qu’après sa
mort et l’apparition de ses miracles".
11-Je n’ai plus le droit de me régaler des
sucreries
"Une fois, Père Makarios lui proposa de lui faire un chaud avec des
herbes amères, comme un calmant contre les douleurs qu’il endurait; il
consentit à la condition de ne pas lui ajouter du sucre; son compagnon lui
dit: "mais les herbes sont très amères, et il est impossible d’en boire!" Père
Charbel répliqua: " je n’ai pas le droit de me régaler des sucreries!
Puis mon Seigneur, Jésus, a bu du vinaigre et de la myrrhe sur la croix, alors
qu’il était au culminant de sa soif et de ses souffrances";
"en pleurant, je souris quand je contemple ta passion, Ô Jésus!» (cf texte
originel).
12- L’Hémiplégie
"J’ai entendu, ma tante, Wardé, raconta que quatre ans avant la mort du
Père Charbel, il fut atteint d’une hémiplégie dont il fut guéri".
O: En paix
continuelle
I- Présentation
1- Avec les souffrances
"Son courage était exceptionnel, car il provenait du ciel et non pas de
la terre; dans tous les cas, on le voyait serein et aimable, comme si le tout
allait bon train".
"Je ne l’ai jamais entendu rouspéter contre quelqu’un, discuter ou se plaindre
d’un travail en été ou en hiver".
"Lorsque les foudres s’abattaient sur le paratonnerre de l’ermitage, il ne
bougeait même pas à l’église où il priait".
"Il a supporté toutes les difficultés malgré toutes les tribulations qu’il
assumait… mettant le cap sur sa finalité surnaturelle; il s’est assujetti à des
mortifications qui n’étaient pas obligatoires, comme: le jeun continuel, les
longues veillées, la vie sans feu, malgré le froid mordant"
"et la colique qui l’attaquait parfois pendant les heures du travail manuel. Son
compagnon, Père Makarios lui disait: "va te reposer et prier devant le Saint
Sacrement; il lui obéissait; mais il ne s’ennuyait ni ne se plaignait de ses
souffrances";
"il accomplissait son travail manuel sous l’effet de la douleur dans le
silence";
"sans chercher les moyens pour l’atténuer",
"répétant: "Ô Jésus! Ô Marie!".
2- Devant les agacements
"Quand on l’appelait, il se présentait et saluait, selon son habitude,
employant l’expression: "gloire à Dieu". Puis, bras croisés, il ne
s’asseyait qu’après l’y avoir ordonné, sinon il restait debout. Si quelqu’un le
saluait en disant: "gloire à Dieu"
"il lui répondait "que Dieu te
bénisse", "il était serein, sérieux, doux de
caractère, docile comme une colombe",
"plutôt la docilité même, la gentillesse et l’amabilité. Celui qui le regardait,
l’aimait spontanément";
"si quelqu’un venait l’agacier, il le supportait avec magnanimité et affabilité
aussi".
"A le voir en train de prier, en dialogue intime avec la puissance
divine, on était ému devant cette attitude recueillie, édifiante en bon exemple,
exhalant la dévotion et la pitié sur ses traits en tout temps, et en particulier
quand il priait et sur son visage resplendissait la lumière céleste".
"A l’ermitage, quand il se rencontrait avec quelqu’un dans le long
couloir étroit, il se collait contre le mur ne laissait pas son habit toucher
celui du passant".
3- En toute chose
"Il vivait en présence de Dieu; ses apparences et son intérieur
témoignaient qu’il ne se souciait que de Dieu; dans ses prières, sa messe et son
travail manuel, il était avec Dieu… que les gens le louassent ou l’insultassent,
que les moines fussent satisfaits ou non de lui, peu lui importait; il était
sobre dans son état, abstinent vis-à-vis des séduisances du monde et ses
vanités, juste dans son comportement";
"il ne s’intérressait qu’à l’accomplissement de ses devoirs sans aucune
intention d’attirer la louange des autres, ne se permettant pas de flatter
personne; s’il témoignait de l’intérêt à l’un de ses confrères, c’était
seulement par conservation du commandement da la charité. Il s’appliquait à la
simplicité monastique dans ses paroles, ses travaux et son habillement; il
n’accusait personne de ses confrères ou des domestiques auprès des supérieurs,
ne se mêlant à personne".
II- Récits et événements
1- Dieu arrange les
choses
"Il ne se laissait pas entraîner par ses émotions, comme la tristesse
par exemple. Quoiqu’il arrivât au couvent: des tribulations à l’un des confrères
ou bien des choses réjouissantes, il gardait toujours le même humeur devant
toutes les situations, confiant en Dieu, répétant l’expression suivante:
"Dieu arrange les choses; c’est la volonté de Dieu".
2- Pèlerin vers
l’éternité
"Je sais qu’il avait pleine espérance en Dieu pour qui il a abandonné le
monde et s’est consacré à son
service; toute sa vie était pleine d’œuvres exemptes de toutes artifices
mondaines et de toutes vanités, ayant pour seul objectif, l’éternité; il ne
tirait aucune satisfaction des choses mondaines ni ne s’attristait des choses
terrestres, disant: "que la volonté de Dieu soit faite; qu’avons-nous dans ce
monde? Nous y sommes des pélerins
vers l’éternité".
3- Son cœur et sa pensée au
ciel
"Il ne parlait pas des choses terrestres, plutôt du ciel qu’il
entretenait des propos. Il ne désirait rien sur la terre ni ne souhaitait plus
de richesse au couvent, comme la possession en terrains; il ne manifestait pas
de la joie devant une bonne récolte ou sa bonne santé ou tout autre événement
égayant; tout comme devant la mauvaise récolte, il ne s’affligeait pas. Ni
joyeux ni mélancolique, son visage portait toujours l’allure de l’abandon à la
providence; il ne parlait ni de la famille ni des parents, ne s’appropriant
aucun travail digne de remerciement, ne s’attendant à aucune aide de personne.
Il n’a jamais été en quête de la satisfaction d’un supérieur en s’acquittant
d’un service qu’il lui avait demandé. En un mot, son cœur et ses pensées étaient
orientés vers le ciel; pour lui, tout ce qui relevait de la physique était
considéré comme rebut".
4- Priez pour lui
"Il témoignait une puissante confiance en Dieu; c’est pourquoi, quand
les parents d’un malade venaient le supplier, lui demandant de prier pour la
guérison de leur malade, il leur répondait parfois: "votre malade est en
bonne santé, priez pour lui". Comme, si la vonlonté de
Dieu lui avait inspiré cela
pour le leur communiquer. Pour d’autres, il répliquait: "implorez, priez
pour lui" en disant cela, il partageait leur prière et leur recommandait
de se fier à Dieu. Dans d’autres occasions, il les consolait en les
conseillant de s’armer de la patience et de l’abandon à sa Sainte volonté.
Ce que je viens de relater, je l’ai ajouté à sa précision dans
l’accomplissement de ses devoirs, de son observance à la règle et à son
ascétisme exceptionnel, pour vous montrer la vertu de son espérance dans ses
plus belles manifestations. Il ne se réjouissait pas à l’accession de l’un des
Pères à un poste ni ne s’attristait pour la mort de l’un de ses confrères, ni ne
se souciait de l’appauvrissement ou de la richesse de ses parents; en un mot, il
gardait son unité intérieure dans la joie, dans la tristesse, dans la
tribulation et dans le confort".
5- Que sa volonté soit
faite
"Il ne se confiait à personne, sinon à Dieu; pour lui, la vie ne valait
rien, il ne s’attachait ni à l’argent ni aux propriétés ni aux parents. Devant
les désastres il ne s’alarmait pas, répétant son expression habituelle: "que
sa volonté soit faite". il ne s’est jamais mêlé aux autres; avec ses
supérieurs, il se comportait ave concision: on l’ordonnait, il obéissait sans
aucune hésitation; j’ai appris qu’une fois ses parents sont venus le voir, il ne
les a pas regardés".
6- L’éparpillement des braises
"J’ai entendu Père Semaan de Ehmej, ermite, ayant vécu un certain temps
avec Père Charbel à l’ermitage Saint Maron
que Père Charbel dans ses mortifications, ses prières, sa pauvreté, son
obéissance et ses vertus monastiques, était un moine exemplaire. Selon Père
Semaan, les ermites devaient dire leurs messes séparément; Père Charbel servait
les messes de ses
compagnons, Père Makarios de Mechmech et Père Semaan de Ehmej, en revanche
chacun d’eux se chargeait de lui servir sa messe à tour de rôle; ce qui
dispensait chacun d’eux du froid de l’hiver. Une fois, alors qu’il faisait très
froid et la neige s’accumulait très épaisse, Père Charbel a servi les deux
messes de ses deux compagnons qui sont allés juste après se réchauffer au près
du feu tandis que Père Charbel se préparait pour dire sa messe; or les deux
ermites, bien à chaud, se sont livrés au sommeil, et subitement le poêle se
heurta contre le mur, laissant ainsi les braises et la cendre s’éparpiller sur
eux; ils se réveillèrent épouvantés, se dirigèrent vers l’église et trouvèrent
Père Charbel en habit de messe, dressé devant l’autel en entendant que quelqu’un
vint lui servir la messe; à leur arrivée, il ne manifesta aucun déboire, ne
prononçant aucun mot. Ils ont considéré que
l’incident des braises fut un avertissement pour eux qui les réveilla pour lui
servir la messe".
7- Il œuvrait pour le repos des
moines
"Il ne se souciait pas de plaire aux moines et à ceux qui le
connaissaient pour s’attirer leur éloge et quêter leurs compliments; dans ce
qu’il faisait, il ne souhaitait que le repos des moines et le bien du couvent,
croyant qu’en cela, il glorifiait Dieu et œuvrait au salut de son âme. Quand il
sentait qu’un confrère que l’on aurait ordonné de s’acquitter d’un travail comme
la panification était fatigué et il avait besoin de se reposer ou bien, il
devait accomplir un autre devoir, Père Charbel demandait l’autorisation de son
compagnon de le remplacer et allait faire le travail jusqu’à minuit, ne se
permettant de laisser l’équipe que quand la mission aurait été réalisée
entièrement, alors qu’il était à jeune".
"A quiconque qui lui demandait un service, il répondait: "je suis à votre
service, mon frère"
P: personne n’a pu lui
ôter la joie (Jn 16,22)
I- Présentation
1- Allègre
"Il était toujours docile et allègre",
"heureux en Dieu",
"affable",
"content dans son état; il ne rouspétait ni contre le froid ni contre la
chaleur",
"ne se plaignant de rien",
"sobre",
"patient, joyeux, exempt d’ennui, de tristesse, de troubles, d’affliction",
"il a pratiqué spontanément, facilement et joyeusement l’ascétisme jusqu’au
dernier jour de sa vie",
"avec assiduité et exultation de l’âme",
"allègre dans tous les travaux qu’il effectuait"
"sans interruption, d’une cadence à laquelle peu nombreux sont ceux qui y sont
parvenus; toujours égayé et épanoui",
"en progrès continuel, rapidement et aisément";
"il n’hésitait ni ne maugréait";
"il menait son train de vie avec stabilité et joie".
2- Il servait avec joie
"Il se considérait serviteur des autres, exécutant joyeusement non
seulement ce qu’on le lui ordonnait, mais aussi ce que les autres le lui
demandaient, y compris les novices et les domestiques; il se comportait avec eux
comme le fait une ânesse avec son
propriétaire";
"il obéissait avec joie et vivacité au servant du couvent et au domestique"
"aimable et respectant tout le monde. Il manifestait de la satisfaction dans
tous les services qu’on lui demandait, même de la part des subalternes comme les
domestiques",
"et les ouvriers qui travaillaient au champs du couvent ou bien dans la vigne de
l’ermitage";
"services dont il s’acquittait à la perfection, avec bonheur et égayement",
"ainsi que tous les services et travaux".
"Il trouvait satisfaction quand on l’ordonnait d’effectuer un travail pénible, à
la place d’un autre confrère; il s’en acquittait avec affabilité".
"Lorsque le supérieur l’ordonnait de visiter des malades, prier pour eux
et les bénir, il exécutait avec disponibilité et joie. Il avait du zèle pour le
salut des gens, recevant gentiment ceux qui voulaient se confesser parmi les
hommes, faisant de son mieux pour les ramener à la conversion".
3- Les jouissances de
l’âme
"Quand on lui parlait d’un événement formidable ou d’un fait risible, il
y répondait brièvement d’un sourire aimable",
"car très rarement qu’on le voyait rire; par contre lorsqu’il se trouvait
contraint par l’obéissance à tenir un propos théologique, il le faisait d’un air
affable",
"qu’il s’adresse à chaque personne avec affabilité".
"Il ne s’attardait pas à l’intérêt qu’on lui accordait pour qu’il ne soit pas
entravé dans
son amour à Dieu, accomplissant joyeusement toutes ses obligations";
"il ne s’ennuyait jamais des choses spirituelles, plutôt, il y trouvait toute
satisfaction";
"devant le Saint Sacrement, il poussait de puissants soupirs qui exprimaient son
amour intense à Dieu, caché dans le Saint Sacrement" ;
"quand il buvait au Sang du Christ et mangeait à son Corps, il paraissait qu’il
participait au banquet le plus suave dans le monde, et buvait à la coupe
céleste".
"Il ne sentait ni jouissance ni repos ni joie qu’à l’église, que devant le Saint
Sacrement",
"que dans la messe et la prière".
4- Une joie contagieuse
"Je sentais une grande jouissance quand je lui servais la messe sans
savoir pourquoi! Que Dieu soit loué!".
"Quelques fois après minuit, je participais avec lui à la récitation du
chapelet; à genoux, il le disait avec toute jouissance et chaleur qui
circulaient de lui et pénétraient en moi. Je souhaitais de tout mon cœur, qu’il
m’appelât à partager avec lui la récitation du rosaire",
"car près de lui, une ardeur inhabituelle envahissait mon âme";
"silencieux qu’il fut, il engageait tout le monde dans le silence, imposant la
décence dans le discours; et tous étaient heureux de travailler avec lui".
II- Récits et événements
1- Plus délicieux que toute
suavité
"Après mon arrivée à
l’ermitage, j’ai montré au Père Charbel l’autorisation du Supérieur Général,
adressée à son intention pour me prêcher la retraite spirituelle qui devait
précéder mon ordination sacerdotale; Père Charbel me dit: "tu es maître
d’Israël
et tu as besoin de quelqu’un comme Père Charbel pour t’accompagner dans ta
retraite spirituelle?! Pourtant, je suis à ta disposition dans ce que tu
veux". J’ai souhaité que cette retraite durât plus d’une semaine. A
l’ouï de ses
paroles, j’avais l’impression que je dégustais à la manne
et au miel, parce que ses paroles perçaient les rochers; pour son auditeur,
il était plus délicieux que la suavité même! C’est pourquoi je me suis
résolu à passer tous mes congés scolaires chez lui, à l’ermitage tant qu’il
vivra; à la
suite de cette résolution, j’ai passé avec lui mes vacances pendant quatre ans
successifs; et à chaque fois, il me recevait avec affabilité angélique".
2- Il répondit souriant
"Assez souvent, il nous accompagnait pour semer avec nous le blé, à la
demande du responsable du travail et l’approbation du supérieur du couvent. Un
jour, tous, novices et laboureurs, après avoir fini de semer un champ au–dessus
de la fontaine, nous devions passer dans un autre, et par la suite nous avions à
transporter tout le matériel et les objets nécessaires; moi et les laboureurs,
nous nous sommes chargés des bœufs et de la charrue tandis que les autres
novices, Père Charbel et le reste des ouvriers avaient à transporter tout ce
dont on aurait besoin";
"nous connaissions à quel point Père Charbel était voué pour l’obéissance; et
par curiosité, nous nous sommes décidés à mettre à l’épreuve cette vertu";
"comme de juste je dois dire que le fait suivant s’est déroulé devant moi";
"nous avons réuni les pioches, la jarre d’eau, la cruche, la couffe de semence
et le seau du mets";
"par plaisanterie, je lui ai demandé de porter ces objets, il répondit: "à vos
ordres". "On
commença à le charger de ces objets, pièce par pièce qu’il acceptait volontiers;
il mit les pioches sur une épaule, suspendit la couffe à l’autre, la jarre dans
une main, le seau au coude";
"on lui dit: "porte la cruche aussi". il répondit: "comment la
porter?" On répliqua: prends-la par le petit doigt"; il obéit";
"quelques objets restèrent par terre qu’il n’a pas pu porter; en nous voyant
rire, il nous regarda et dit en souriant: "malheur à ceux qui surchargent les
gens de lourds fardeaux alors qu’il ne daignent, même pas, y toucher du bout du
doigt". puis il partit avec sa charge satisfait et content, et nous avons
pris les autres objets".
3- Avec joie et gaieté
"Père Charbel n’a pas seulement abdiqué les biens et les honneurs de ce
monde, mais aussi, il a sacrifié sa volonté qui est la plus chère et la plus
coûteuse pour l’homme; il l’a reniée avec mépris en application au commandement
du Christ qui dit: "celui qui ne délaisse pas tout, même soi-même; c.à.d sa
volonté propre, ne peut pas être mon disciple", ce qui signifie: d’une véritable
obéissance; d’où sa soumission à son supérieur fut aveugle, celle d’un petit
enfant à ses parents. Il se soumettait à ses confrères, même au plus jeune parmi
eux, non seulement dans ce qui est pour le bien et l’utile, mais dans ce qui
contrarie son opinion; il se pressait à exécuter l’ordre sans interrogation ni
refus, plutôt avec joie et gaieté. Tout le monde savait que lorsqu’il a fini le
travail dont il a été ordonné par son compagnon ou son servant à l’ermitage, il
se mettait debout, bras croisés et disait: "mon Père, ou mon frère, je
me suis acquitté du travail, que voulez vous que je fasse maintenant?".
Q: Un amour
étonnant (Jn 1,13)
I- Présentation
1- Son cœur à Dieu
"Au jugement dernier, le pécheur ne s’inquiétera pas de la gravité du
jugement mais de la désolation devant la grandeur de l’amour divin;
quiconque comparaîtra devant le Seigneur vide d’amour, il mourra de honte";
c’est pourquoi, "il exprimait ce qu’il avait dans le cœur, en disant: "mon
Dieu, à vous
mon cœur". Il le lui a offert entièrement sans
être touché un jour par un amour terrestre";
"son âme s’enflammait du feu de son amour pour Dieu… Le temps qu’il passait
devant le Saint Sacrement le tenait trop à cœur; il n’y a pas de quoi
s’étonner, car l’amant se passionne à être l’ombre de son bien-aimé et chérit sa
fréquentation; le cœur de l’homme est là où se trouve son trésor";
"c’est ce que dit le livre des Proverbes. Père Charbel passait la plupart de son
temps, mais dès qu’il avait un petit moment de libre, devant le Saint Sacrement
à genoux et en extase; comme ce qui lui arriva lors de l’abattement de la foudre
sur l’ermitage".
"Il préféra son amour pour Dieu à son cœur qu’il mortifia lui; il ne
s’attachait à rien, ni aux habits ni aux mets ni au repos, sacrifiant le tout
par amour au très Haut. Cet amour le poussa à un point où il aimait à être
méprisé et considéré comme s’il n’était rien",
"car durant toute sa vie, il ne s’est jamais intéressé à acquérir la
satisfaction d’un supérieur ou l’amitié d’un confrère",
"ni à avoir des nouvelles de ses parents, des autres et des moines",
"il ne s’est jamais laissé entraîner par une conversation avec ceux qui
l’entouraient",
"n’a jamais fait un travail pour satisfaire quelqu’un ou se satisfaire, mais il
s’y appliquait par obéissance";
"il n’était en rien pour lui-même, mais entièrement pour Dieu";
dans son amour à Dieu,
il a atteint un degré de sublimation qu’il nous sera difficile de comprendre,
n’ayant de volonté que d’être toujours en présence de Dieu à l’église ,
satisfait du temps que l’autorité le lui accordait pour être en méditation avec
Jésus, son bien-aimé".
2- Son cœur à tous
"Il rendait service au prochain par sa prière… sans jamais viser
s’assurer sa louange";
"il n’avait pas d’amitié particulière"
"ni ne préférait l’un à l’autre de ses confrères; mais il les considérait tous
des frères à lui dans le Christ",
"bien qu’il penchât plus aux plus vertueux; il ne prouvait aucun sentiment
purement humain".
"Il remplaçait ses confrères dans le travail pénible pour leur procurer le repos
physique",
"assurant les emplois les plus subalternes";
"il transportait les raisins sur son dos ainsi que le bois sans qu’il soit
chargé de la part du supérieur, mais poussé par la charité pour eux",
"parce qu’il était là pour aimer Dieu et le prochain et non pas pour les
haïr; il
est venu pour peiner et être méprisé et non pas pour être loué et aisé, il est
venu pour servir non pour être servi".
"Il priait pour la conversion des pêcheurs et le retour au bon chemin
des égarés; personne ne s’est déclaré être son ennemi";
"parfois il retardait sa messe pour que les bergers qui viennent de loin
puissent venir participer à l’Eucharistie, en particulier, les dimanches et les
fêtes".
"Il manifestait de la tendresse et de la pitié envers les pauvres et les
souffrants parmi lesquels, il permettait aux hommes d’entrer pour se réchauffer et dessécher leurs
habits trempés de la pluie; quand aux femmes, elles ne venaient pas par un temps
froid et pluvieux, car elles savaient que Père Charbel ne les laisserait pas
entrer à l’ermitage".
"Il était charitable envers tout le monde, pauvres et riches",
"et bien que Père Charbel traitât avec
ses visiteurs le côté spirituel, laissant à ses compagnons la charge de
l’accueil et de la nourriture, toutefois quand des visiteurs se présentaient à
l’ermitage pendant leur absence",
"il offrait",
"à un pauvre ou à un affamé"
"son mets, si frégal, et lui, il restait à jeun";
"ceci j’en fus témoin plusieurs fois",
à l’exemple du Christ de qui il est dit: "Ô menuisier libre dont le dévouement était votre trésor;
généreux, tu donnais ton pain aux besogneux".
II- Récits et événements
1- La famille de Charbel (Mt 12,46-50)
"Une fois, son frère et sa sœur sont venus lui rendre visite à
l’ermitage; son compagnon, Père Makarios, lui fit part de leur arrivée, il
répondit: "tu es mon frère et ma sœur, offre-leur la nourriture et la
boisson; puis congédie les pour retourner au village et dis-leur que je prie
pour eux pour qu’ils soient délivrés des pièges de ce monde". Il ne
s’est pas entretenu avec eux; d’ailleurs, depuis son entrée au couvent et
jusqu’à sa mort à l’ermitage il n’est plus retourné au village chez ses
parents".
2- Voulez-vous déjeuner?
"Le révérend Père Moubarak Massaad de Achqout m’a raconté qu’une fois
est venu à l’ermitage au moment du déjeuner des ermites. Les deux lui ont
demandé: "voulez-vous déjeuner?" Il acquiesa, toutefois, le mets
suffisait seulement à deux personnes, discrètement Père Charbel se retira
laissant sa part au visiteur, pour manger après seulement le gratin de la
marmite, à savoir que les ermites ne mangeaient qu’une seule fois par jour".
3- Œuvrez pour la nourriture durable
(Jn 6,
27)
"Père Charbel priait beaucoup pour les malades et la conversion des
pêcheurs, donnant des conseils salvifiques, spécifiques aux circonstances. Je ne
cesse de me rappeler des paroles qu’il me dit une fois: "ne te soucies pas du
tout de ce monde, mais de l’au-delà et du jugement, car celui qui nous jugera
connait tout et il n’a besoin de personne pour le lui dire", il s’apitoyait
pour les âmes du purgatoire, en particulier, celles
qui n’ont personne dans la vie; il priait et invitait les autres à prier pour
eux".
4- Par pitié pour
elle
"Une fois pendant mon enfance, j’ai accompagné ma mère, en novembre pour
participer à sa messe à l’ermitage. En route, une averse tomba tellement que
nous avons été tout trempés d’eau; j’entrai à l’église et je préparai l’autel et
prêt pour servir la messe au Père
Charbel qui me vit trempé d’eau de la tête aux pieds; il me demanda d’aller à
la cuisine pour sécher mes habits; n’ayant pas accepté, il a eu pitié de
moi, m’apporta une paire de ses souliers qui fut trop grande. Au début de la
messe il se retourna pour encenser et vit ma mère debout devant la porte dehors
et participait à la messe, baignée de l’eau de la pluie; il a eu pitié d’elle,
me demanda de l’amener à l’intérieur pour qu’elle poursuive la messe au fond
de l’église; chose étrange, car il ne permettait pas aux femmes d’entrer à
l’église; mais le froid glacial et le vent impétueux l’ont apitoyé sur son état
et lui permit d’entrer".
5- Sa charité envers ses
confrères
"L’une de ses plus singulières vertus fut sa charité pour ses confrères;
il ne dénigrait personne, accomplissant ses obligations dévotement; il
s’imposait la sévérité alors qu’il était clément avec les autres; il a passé une
longue période de sa vie monastique au couvent Saint Maron, à Annaya, aimé de
toutes les parties, hétérogènes qu’elles fussent, remarquable par son
impartialité et sa discrétion avec les uns et les autres; il s’adonnait à tout
travail inaccompli au couvent. Le supérieur du couvent à cette époque–là, le
Père Antonios de Mechmech a dit: "j’ai au couvent deux excellents moines, non
seulement les meilleurs dans notre Ordre, mais aussi dans tous les Ordres
existant dans l’Église, et qui sont: Père Charbel et frère Élias Al-Mahrini".
6- Sa charité envers le
prochain
"Sa charité se manifestait dans les conseils salvifiques qu’il confiait
à ceux qui les demandaient et à ceux qui venaient chez lui de très loin pour se
confesser, il était très tendre envers les malades et les souffrants; bénissant
l’eau à ceux qui le voulaient pour obtenir la guérison des maladies ou pour
asperger les champs; quand le supérieur lui confiait des missions, il s’y
mettait même hors du couvent ou de l’ermitage; quelque fois, il sortait la nuit
pour prier au chevet des malades et les guérir par son intercession; il était
aimable envers tout le monde, donnant des conseils et des directives à ses
confrères et domestiques et aux fermiers-associés, les aidant dans leurs
besognes".
7- Comme la mère qui s’occupe de son petit
enfant
"Dans le passé, il était d’usage que quand un moine vieillissait ou
tombait malade et qu’il avait au couvent un moine parent à lui ou de son
village, ce dernier se chargeait de le servir; Père Charbel se limitait
seulement à les visiter comme les autres moines; tandis qu’il se vouait, jour et
nuit au service des malades ou des vieillards n’ayant pas de confrères parents
ou de leur village, comme la mère qui s’occupe de son petit enfant; je me
rappelle qu’il y avait au couvent Saint Maron un moine appelé Moussa de Ehmej
qui était malade et un vieux handicapé, et comme il n’y avait de son village que
Père Alichaa,
déjà vieux et radoteur, c’est Père Charbel qui s’est chargé de son service pour
ne plus le quitter; la nuit il se couchait par terre à côté de lui; il arriva un
jour qu’il sortit de la cellule de son malade pour aller à l’église prier et
dire sa messe; j’ai remarqué que son habit était couvert de crachats sur le
dos; je l’appelai et en lui disant:
"il est indigne de dire la messe alors que vous portez cet habit sale, il le
changea; en effet, le malade crachait toute la nuit pendant que Père Charbel
dormait par terre près de lui".
8- Charbel "l'amant
passionné"
"Ton amour est ma seule
souffrance; plus je le ressens en moi, plus mon âme te désire ardemment. Ô mon
Jésus, laisse moi mourir par amour pour toi" (cf le texte originel) "Le cœur du
Père Charbel était épris de Jésus, et n’éprouvait pas d’attrait à vivre sans
lui; c’est pourquoi, il répétait toujours: "Dieu est mon amour, et cela me
suffit". "Tout
ce qu’il a fait, il le réalisait par amour à Dieu; l’amant s’adonne; d’où il a
sacrifié son corps, sa volonté, sa raison et ses sentiments à l’amour divin;
pour lui, il a purifié son cœur de l’amour des parents et de proches parents, il
a abdiqué les gloires du monde et s’est privé de ses délices; il ne ressentait
ni jouissance ni repos ni joie qu’à l’église, devant le Saint Sacrement. Pendant
les jours où il neigeait et faisait froid, et étant donné que le travail
devenait impossible à l’extérieur et qu’il n’y avait rien à faire à l’intérieur,
il passait son temps avec Dieu dans des longues visites au Saint Sacrement.
Celui qui aime, pense toujours à son bien-aimé et prolonge sa présence avec
lui; toute la vie du Père Charbel était remplie de Dieu; quand quelqu’un lui
adressait la parole, c’était comme s’il se réveillait d’un profond sommeil,
c’est que durant son travail manuel, il était toujours plongé dans sa méditation
en Dieu. Je ne pense pas qu’il se fût attaché à quelque chose dans ce monde ou
bien qu’il eût dit: "ceci est le
mien, je désire posséder cela", son cœur n’a jamais penché vers une personne;
quand l’amour de Dieu atteint son paroxysme, le corps dépérit et fond de passion
pour l’être aimé; aussi, Père Charbel était–il devenu frêle et cadavérique".
9- Laisse-moi faire à ta
place
"Son amour pour le prochain n’avait aucun attrait humain; quand il
voyait un domestique ou un confrère effectuer un travail épuisant, il accourait
et lui disait: "laisse-moi faire à ta place". Puis il se penchait sur le
travail pénible pour l’accomplir, bien qu’il ne fût pas
obligé de faire un certain nombre de boulots, comme la panification et
autres, pourtant il demandait l’autorisation du supérieur et venait nous aider,
sans avoir de préférence, l’un à l’autre; il manifestait de l’estime à tous,
comme si chacun était son supérieur; quant aux visiteurs, il ne se mêlait pas
avec eux, se satisfaisant de prier à leur intention; aux ordres du supérieur, il
allait visiter les malades et priait pour eux".
10- Pour l’amour de
Dieu
"Il s’est sacrifié pour l’amour de Dieu avec réjouissance et joie,
donnant des preuves de cet amour
vital quand il supportait les travaux esquintants à la place des confrères et
des domestiques pour les soulager de leur fatigue; par revanche, rien que par
amour à Dieu et au prochain; il les aimait tous d’égal, sans distinction entre
supérieur, sujet, domestique ou confrère, évitant de troubler autrui; plutôt il
s’empressait à remplacer un prochain pour le soulager, d’un travail épuisant et
lui accorder le repos; aussi priait-il pour lui pour qu’il obtienne les grâces
célestes et le salut de son âme; il n’a jamais affusqué
quelqu’un de ceux qui venaient chez lui demandant un soutien spirituel".
11- Un amour illimité
"Il ne nous montrait, à moi et aux novices qui sommes dans son village
aucune affection particulière et s’abstenait à communiquer avec nous; une fois,
le supérieur du couvent, Père Élias de Mechmech lui dit: "Père Charbel est-ce
que tu ne penches pas, en particulier, aux novices qui sont de ton village natal
plus que les autres? Car, c’est un penchant naturellement intérieur en l’homme".
Il lui répliqua tout bas comme d’habitude: "non, je ne penche ni
intérieurement, ni extérieurement envers eux, car tous les confrères sont égaux
à mon égard".
"Surtout il était miséricordieux envers les ouvriers du couvent à qui il n’a
jamais adressé des ordres, plutôt il leur obéissait quand ils l’ordonnaient de
faire un travail".
12- Il ne nous
regardait pas
"Moi
et Père Éphrem, tous les deux de Bqaakafrah, nous sommes allés au couvent de
Annaya pour y faire notre entrée dans l’Ordre, croyant que nous y serons
contents et chanceux d’avoir la présence du Père Charbel qui nous soignera et
nous soulagera; or, c’est tout à fait le contraire qui s’est passé: il ne nous
regardait ni ne communiquait avec nous, ne nous laissant sentir la moindre
affection envers nous qui sommes de son village natal".
13- Il a pleuré un
Chiite (Lc
19,41)
"Père Charbel s’intéressait beaucoup aux âmes, et souffrait à cause de
leur égarement loin de Dieu; or voilà que Père Youssef Beyrouthi, du village de
Qartaba actuellement curé d’une paroisse sans la localité de Baalbek, me raconta
qu’une fois il entra à l’ermitage pour y trouver Père Charbel en train de
pleurer amèrement, se frappant la tête de ses mains avec beaucoup de regret; il
lui posa la question sur la raison de sa lamentation; n’ayant pas répondu, il
fut interrogé, une deuxième, puis une troisième fois; devant cette insistance,
il dit: "ce que je vais vous raconter doit rester confidentiel, vous ne le direz
à personne qu’après ma mort, aujourd’hui un homme de Ilmat (Chiite) est décédé,
son âme est à l’enfer". "Un
moment après, ils entendirent des coups de fusil venus de Ilmat; et la nouvelle
de la mort d’un homme riche qui était en Amérique, se répandit".
14- Même les animaux
-Ils prennent en main les serpents
(Mc
16,18)
"Pendant la période où on laboure et taille les vignes, je suis monté à
la vigne de l’ermitage pour y travailler avec tout le personnel du couvent,
moines et domestiques. Nous vîmes un épouvantable serpent tacheté; tous nous
nous précipitâmes pour le tuer; malgré les efforts déployés, nous n’y
réussîmes
pas; et la vipère serpentait surtout dans un lopin; poussant ses sifflements
effroyables et abhorrés; tantôt elle levait sa tête, tantôt sa queue, incapable
d’y trouver une issue et terrassée d’épouvante, je criai: "où est
Père Charbel? Appelez-le" on ne le voyait pas, car il travaillait dans le
versant d’un lopin; dès qu’il entendit, il arriva juste devant le serpent qui se
figea; il nous dit: "ne l’approchez pas". Chacun de nous tenait à la
main: l’un une pierre, l’autre une pioche, un troisième un aiguillon… il se
tourna vers la vipère et lui dit en tendant la main: "va-t-en d’ici";
elle serpenta devant lui et n’eut de cesse de faire signe de la main que
lorsqu’elle disparut; puis, il se retourna au travail. Nous avons rendu grâce à
Dieu de nous avoir sauvé de ce danger; selon sa coutume, Père Charbel ne tuait
ni animaux ni insectes venimeux, ni fourmis, ni scorpions; c’est qu’il était
très sensible. J’ai lu dans des livres autobiographiques des Saints que quelques
uns d’entre eux s’interdisaient de nuire aux insectes ou aux animaux, convaincu
que Dieu qui les a créés, en dispose".
-L’enfant joue avec la
vipère
"Une fois, on était en train de labourer une vigne proche de l’ermitage;
à l’heure du manger, on appela Père Charbel de déjeuner avec les ermites; une
grande vipère apparut et s’introduit dans le mur; nous nous précipitâmes, prêts
à démolir le mur pour le tuer; il s’opposa à nous en disant: "je ne vous
permets pas de la tuer";
toutes les créations venimeuses ou non, ne furent crées par Dieu que pour une
fin utile; donc il ne faut pas le tuer".
"Puis, il l’interpella en lui disant: "va! Ô béni!" Elle réapparut du
mur, passa parmi nous et sortit par la porte de la vigne, nous étions environ
huit ouvriers, assistés par les ermites au travail de la vigne".
- Le loup cohabite avec l’agneau (Is 11,16)
"Du temps où j’étais étudiant, j’ai estivé une fois au couvent N.D de
Maïfouq où
j’avais à partager la chambre du frère Bartholomé de Aïto,
j’ai vu sur la paillasse et le lit des punaises, maigres et minces, elles
marchaient sur mon visage et mes mains sans toutefois me piquer; j’ai été étonné
et j’ai interrogé frère Batholomé sur ce phénomène étrange; il me répondit: «ne
vois-tu pas l’eau dans la bouteille que Père Charbel avait bénie? Depuis que
j’ai aspergé ma chambre avec cette eau, les punaises ont maigri et sont devenues
incapables de piquer!".
- La pauvre
"Il y avait une ruche d’abeilles près de l’ermitage; trois en sont
tombées dans une cuvette, destinée à leur abreuvage; Père Charbel arriva et
commença à les retirer de l’eau, une à une au bout de son doigt, et les mettait
au soleil pour qu’elles sèchent. L’une d’elles le piqua; il retira le dard
d’abeille de son doigt, puis remit l’abeille au soleil pour sécher ses ailes et
s’envoler; je lui dis: "mon maître, l’abeille mourra sans son dard". il
répliqua: "c’est vrai, la pauvre!" puis il entra à l’église".
R: La liberté et l’audace
de Charbel
I- Présentation
"Si vous en tenez à ma parole, vous connaîtrez la
vérité, et elle vous libérera… quiconque commet le pêché, en sera
esclave!" (Jn 8,32-33). Partant de cet
enseignement, "il ne s’intéressait à rien dans ce monde",
"ni aux intimités avec les autres; il s’appliquait avec soin à accomplir ses
obligations, ne cherchant jamais à gagner la complaisance d’autrui";
"en particulier, il jouissait d’une audace absolue dans son observance de la
vérité divine",
"sans crainte ni préférence, vis-à-vis des autres; il ne reconnaissait aucune
valeur à la dignité, se réjouissant des insultes, indifférent devant la
louange ou le mépris des gens; là, ce qu’il disait était devenu célèbre: "le
gratifié n’est pas celui qui se loue ou celui qui est loué par les gens mais
plutôt c’est celui que le Seigneur gratifie";
"il ne s’empressait pas à recevoir les évêques et les dignitaires quand ils
venaient en visite; en somme, il vivait sur la terre, mais ses pensées et son
cœur étaient au ciel, inattentif à ce qui se déroulait autour de lui, comme s’il
vivait seul l’exil sur la terre, sûr qu’il appartenait à la
patrie céleste".
II- Récits et événements
1- Il ne s’attachait à
rien
"Son cœur ne s’attachait à rien, même pas à ses dévotions personnelles
ni à ses obligations spirituelles; aux ordres de l’obéissance, il abandonnait
ses offices de prière ou bien n’importe quel exercice spirituel auquel il
s’appliquait, peut-être joyeusement; je me rappelle, à titre d’exemple, qu’une
nuit, il priait avec son compagnon l’office de minuit à l’église, quand un
messager, vint lui dire: "le supérieur
vous demande". Il n’hésita pas du tout; il arrêta sa prière en chœur, se
dirigeant sur le champ vers le supérieur qui lui demanda de bénir l’eau et d’en
asperger les chèvres atteintes d’une maladie dans la vésicule biliaire".
"Une fois le troupeau aspergé d’eau bénite, les chèvres ont guéri";
"et malgré l’insistance du supérieur qui lui demandait de passer la nuit au
couvent, Père Charbel prit congé et retourna à l’ermitage".
2- Par où le péché peut-il pénétrer votre
âme?
"Père Charbel était un homme qui conservait bien la règle, travaillant
en silence au four pendant que les autres plaisantaient. Parfois malgré son
mutisme permanent, il ne laissait pas les occasions adéquates passer sans donner
une leçon spirituelle, scellée d’une profonde sagesse, pour ne pas blesser le
prochain";
"ses réponses sont rares mais perspicaces dans la connaissance des situations
qui prévalent dans l’Ordre et ailleurs. Bien des moines racontaient qu’une fois
en hiver, pendant qu’il aidait au four, vint le curé Youhanna Chéhadé du village
de Mechmech, vicaire patriarcal de la région de Jbeil (Byblos), honorable dans sa
position, d’une famille dignitaire, riche, célèbre dans ses liaisons avec les
grandes personnalités du pays, fier de lui-même, corpulent, menant une vie très
aisée, incompatible avec son état sacerdotal et la pauvreté des gens, portant
au-dessus de sa soutane un manteau en fourrure épaisse que portaient seulement
les princes et les notables. Il entra au four pour voir ce qu’on y faisait; puis
une conversation eut lieu entre lui et les moines, au cours de laquelle ils
traitèrent le thème du pêché"
"et ses causes; le curé félicitant les moines d’être loin de ces motifs";
"entre temps, Père Charbel gardait toujours son silence habituel, attentif au
dialogue, et dont les mains parlaient du travail et son mutisme prononçait les
conseils et les prédications les plus éloquents; subitement tout le monde se
tourna vers Père Charbel qui prit parole, contrairement à sa coutume, jetant un
regard fugitif sur le curé Youhanna, lui disant d’un léger sourire":
"et vous, par où le péché peut-il pénétrer votre âme?"
"Il ne doit pas vous atteindre avec cette fourrure épaisse que vous
portez! Tous rirent en échangeant des clins d’œil, saisissant en filigrane
la leçon que Père Charbel communiqua à l’abbé sus-mentionné; d’autre part cette
rencontre fut une preuve que Père Charbel, dans son isolement du monde, son
silence et son abstention à tout
propos hors de l’Ordre, comprenait à la volée, à partir d’un mot qu’il
entendait, ce qui se passait parmi ses contemporains et ce qu’ils combinaient;
s’y ajoute son mécontentement du confort de l’abbé".
3- Là où on chôme, qu’on annonce la
fête!
"Une fois, le supérieur, Père Roukoz de Mechmech, dit au Père Charbel
avant la messe: "célèbre la messe solennelle, et annonce que la fête de
l’ascension pour la semaine prochaine sera une fête fériée". Il obéit
immédiatement. Or, voilà qu’il termina sa messe sans annoncer le jour férié; le
supérieur lui dit: "tu n’as pas annoncé l’ascension pour jeudi prochain! Ne
sais-tu pas que c’est un jour ferié? Fais le demain si les
fermiers-associés viennent à la messe"; Père Charbel répondit aimablement et
humblement: "Mon maître, c’est une fête chômée ailleurs; or
pour ceux qui ne chôment ni les dimanches ni les fêtes solennelles,
inutile de leur annoncer; que cela se fasse là où le jour est férié".
En disant cela, il fit allusion à la décision du supérieur qui faisait
travailler les novices, les dimanches et les jours fériés pour suffire aux
multiples travaux du couvent et remédier à ses
besoins, vu la chéreté de la vie qui sévissait
cette année-là.
"Bien entendu, Père Charbel ne s’est pas appliqué aux mesures prises par
le supérieur; pourtant personne n’osait l’appeler au travail, pendant ces jours
sacrés, par respect à sa vertu et à sa sainteté; ce qu’il a dit c’était pour
défendre le droit et la loi divine qu’il faut conserver, sans avoir peur de
personne; de sa part, le supérieur a bien saisi l’intention du Père Charbel et
s’est rendu compte de son erreur, signalée par l’ermite d’une manière très douce
et qu’il a considérée comme une prédication foncièrement honnête, suite à
laquelle, il arrêta ses mesures prises de faire travailler les novices et les
domestiques, les dimanches et les jours fériés; tout le personnel considéra cet
avis comme porteur de la voix de Dieu et s’en est réjoui".
4- Le ciel est sa patrie (Ph 3,20)
"Professé depuis peu de temps, j’ai mis à l’épreuve sa vertu, en lui
disant: "suis-moi sur la terrasse". Il obéit, je luis ai tendu une paire
de jumelles l’ordonnant de regarder Beyrouth; il me répondit: "regarde
seul". Puis il partit".
S: Un adorateur
juste
I- Présentation
1- Tourné vers son
Seigneur
"Ainsi était-il qualifié parce qu’il pratiquait à la perfection les
rites d’adoration, adressés d’une créature envers le créateur";
"lié à ses lois et ses commandements",
"avec un cœur toujours levé et mains tendues vers lui, témoignant la vénération
qui lui est due"
"avec persévérance jusqu’à la mort".
2- Envers le prochain
"Il n’a porté atteinte à personne",
"n’a transgressé le droit de personne, n’a gênée personne; plutôt, il se
considérait serviteur à tous et à son fidèle Seigneur".
"Il observait minutieusement ses vœux, imposant par cela son respect à tous ses
confrères, respect qu’ils manifestaient à son égard quand il venait au couvent
et s’empressaient autour de lui pour le saluer et baiser la main, de sa part",
"il les traitait de la façon la meilleure",
"les vénérait avec amabilité extrême".
"Il ne faisait de mal à personne, ni de face à face ni de loin, ni dans ses
biens ni dans sa réputation".
II- Récits et événements
1- À l’Église jusqu’à la sortie de
tous
"Après complies, il entrait dans sa cellule, et je ne sais pas s’il se
couchait ou il passait le temps dans la prière; minuit sonnant, il se hâtait le
pas, avant tous les moines pour
aller à l’église";
"après l’office, les moines se recouchaient, jusqu’à ce que la cloche sonnât
pour Laudes, tandis que Père Charbel, prolongeait sa veille avec la veilleuse à
l’église, plongé dans sa raison mentale jusqu’à l’aube et l’arrivée des moines
pour Laudes, pour en sortir le dernier".
2- Agenouillement et
veille
"Père Charbel feignait dormir, quand les moines se couchaient, et se
réveillait en même temps qu’eux; mais en réalité, il dormait très peu, passant
ses nuits dans la prière; je vous le dit parce qu’assez souvent vous le voyez la
nuit à l’église pendant que tous les moines se couchaient; puis la plupart du
temps, il était chargé d’être
sonneur à minuit",
"du fait qu’il ne se couchait pas la nuit; chaque fois que je me réveillais la
nuit, je voyais sa chambre illuminée alors qu’il était assis ou bien à genoux à
prier dans ses livres";
"il ne se couchait jamais après l’office de minuit, agenouillé sur un plateau en
osier pour plus de mortification le reste de la nuit".
3- Prier pour les
novices
"Je me rappelle qu’en 1888, le supérieur du couvent des novices à Naamé
se rendit chez les ermites parmi lesquels figurait Père Charbel qui était assis
avec ses compagnons à manger une salade, de tiges de pourpier. De retour à
Naamé, le supérieur nous dit qu’il aurait demandé aux ermites de prier pour les
novices; ils le lui promirent".
4- "Il prie aussi pour les âmes du
purgatoire"
"Père Charbel multipliait les signes de la sainte croix… je lui
demandai: "mon maître, Père Charbel, pourquoi multipliez-vous aujourd’hui les
signes de la croix, contrairement à votre habitude? Est ce qu’on tire un grand
profit en le faisant?" D’un visage rempli de joie, il lui répondit:
"aujourd’hui, c’est le vendredi des défunts: "le signe de la croix y
est un grand trésor d’indulgences que le gagnant peut offrir en soutien aux
pauvres âmes en souffrance au purgatoire, de qui personne ne se souvient;
chaque fois que tu fais le signe de la croix avec foi et que tu es en état de
grâce, tu
gagnes 50 jours d’indulgence, si tu entres à l’église, tu en sors, aspergeant la
tête d’eau bénite et faisant le signe de la croix et que tu es en état de grâce,
tu gagnes 100 jours d’indulgence, parfois; chaque
fois que tu dis "Ō Marie!" tu gagnes 25 jours d’indulgence; si,
par exemple, tu fais le signe de la croix 20 fois, le jour, tu gagnes mille
indulgence; en offrant toutes ses indulgences pour le repos d’une ou plusieurs
âmes souffrant au purgatoire, combien tu auras soulagé leurs souffrances! Mais
combien tu auras gagné en revanche, des compensations multiples pour ce faire!
Est-ce que cela te coûtera de la fatigue? – non.
L’homme qui peine dans le travail de sa propriété, l’irrigant de la
sueur de son front, puis attend un an ou presque pour en tirer un peu de
récolte; malgré cela si sa récolte est abondante, il en sera au comble de sa
joie; mieux vaut pour lui invoquer la Vierge par son nom, en l’appelant avec
vénération: "Ō Marie!" cent fois par jour, et voilà qu’il gagnera 2500 jours d’indulgence sans se
fatiguer, sans se gêner; et puis il peut continuer normalement son travail, sans
rien interrompre; ainsi en sera-t-il bénéficiaire, et assurera le repos aux âmes
du purgatoire et raccourcira le temps de leur souffrance; aussi, se
retranche-t-il derrière ce grand nom contre toute tentation satanique; si
l’homme finit par s’habituer au signe de la croix et à l’invocation de la
Vierge, il aura diminué toute sorte de tentation; c’est que le signe de la croix
est un moyen pour chasser les démons, le nom de la Vierge les subjugue et les
repousse dans l’abîme de la ruine. Si tu veux m’écouter, pratique toujours une
dévotion pour aider les âmes du purgatoire; car en cela tu prêtes à Dieu, et
l’Écriture Sainte dit: "Qui donne au pauvre, prête à Dieu". Qui ne laisse pas
tomber la récompense pour un verre d’eau fraîche, offert en son nom; que
serait-ce pour la récompense d’un grand bienfaiteur à l’âme la plus chère pour
lui et qui souffre, en cela son salut est sûr et elle est dans le besoin de
raccourcir le temps de son purgatoire".
T: Par fidélité au
bien-aimé
I- Présentation
"Quiconque regarde une femme pour la désirer, il aurait commis
l’adultère avec elle dans son cœur" (Mt 5,28). "Les gens
tiennent à chercher le bonheur dans le péché (l’adultère); or le péché ne leur
procure que l’inquiétude, la tristesse, la misère et le vide… seul Jésus Christ
est capable de vous donner le vrai bonheur";
en cela "Père Charbel a observé une chasteté angélique qu’il a pratiquée dans
ses mortifications, son désintéressement à l’égard du manger, du boire et de
l’habillement; son habit élimé en est le témoignage éclatant qui parlait de sa
chasteté",
"de son mépris pour la vie confortable";
"à ma connaissance, il ne se lavait jamais les pieds,
son capuchon lui descendait jusqu’aux yeux; il exerçait tellement l’ascétisme
qu’il est devenu comme une ombre, faible et frêle; avec tant d’autres personnes,
nous disions: "ce n’est plus la vie d’un humain, plutôt celle d’un ange
terrestre; tellement, il a mortifié sa nature
humaine".
"Qui que soit la personne, il ne la regardait pas",
"il tenait toujours son regard baissé vers la terre, évitant la fréquentation
des gens pour se consacrer entièrement au créateur";
"s’il avait à parler avec les hommes, c’était seulement pour quelques minutes",
"sans rien regarder, baissant les yeux en attitude de méditation dans et hors de
l’église",
"il ne regardait pas du tout les femmes";
"le moine doit absolument supprimer ses sens".
"On ne voyait jamais les femmes, ni à l’ermitage ni à ses alentours; il
les fuyait malgré la décence et la simplicité des habits des femmes de cette
localité, en particulier, à cette époque-là";
"assez souvent, il rencontrait des femmes sur la route principale ou bien en
chemin vers le champ ou la vigne, soit qu’il allait puiser de l’eau potable à la
fontaine, alors il changeait tout de suite son chemin; en revanche, elles-mêmes,
elles faisaient la même chose par respect pour lui";
"nous tous, nous savions qu’un ermite se trouvait là, nommé Père Charbel, se
dérobait quand il rencontrait une femme, quelle qu’elle soit";
"de ma part, à ce que je me rappelle bien, il n’a jamais reçu une de ces femmes
qui se rendaient à l’ermitage";
obstruant ainsi toute cause susceptible de nuire à la chasteté".
II- Récits et événements
1- La messe de dimanche
"Il ne permettait jamais aux femmes d’entrer à l’église de l’ermitage; à
la rigueur, quand il apprenait qu’elles n’avaient pas pu participer à la messe
de Dimanche, nulle part, il n’asquiessait à les entrer dans le couloir adjacent
à la porte de l’église; d’autre part, quand des visiteurs arrivaient en
compagnie des femmes, il se retirait dans sa cellule pour n’en sortir qu’après
leur départ".
2- Emploi du genre
masculin
"Je sais que lorsque des femmes se présentaient à l’ermitage pour
demander de l’eau bénite, ou d’autres services, il leur répondait de la lucarne
de sa cellule par l’emploi du genre masculin: "Que veux-tu? ";
après avoir appris la raison de la visite, il leur envoyait son compagnon".
"Une fois je suis monté à l’ermitage où j’ai vu une femme debout dehors
de la clôture, je lui demandai: "Qui es-tu?" Elle me répondit: "La sœur du
Père Charbel, dis-lui de venir me voir". Je suis entré et lui ai fait part
de la visite de sa sœur, il répliqua: "Va le dire au Père Makarios", qui
l’ordonna de la recevoir; il se mit derrière la porte fermée y tournant le dos
et lui dit: "Comment vas-tu?"
"Puis il se retira à l’église; mais je n’ai pas compris pourquoi il a prononcé
au masculin".
3-Soulève la panière avec
moi
"Une fois, pendant les vendanges, Père Charbel transportait sur son dos
les panières de
raisin de la vigne de l’ermitage au
pressoir, pendant que des hommes, des femmes et des enfants cueillaient
le raisin; Père Charbel retourna près d’une panière pleine de raisin placée loin
du mur; et il n’y avait pas d’hommes pour l’aider à le mettre sur son dos;
debout, les yeux baissés, à attendre l’arrivée d’un homme pour l’aider; ayant
longtemps attendu, il tourna le dos, sa corde à la main, dit d’une voix,
suffisamment audible: "soulève
la panière avec moi"; une femme s’approcha et l’aida; moi et mes
camarades, nous nous sommes étonnés que Père Charbel s’adressait aux femmes au
genre masculin, comme si elles étaient des hommes".
4- Où est la fille de Mr
(Beik)
"Ma mère, dont le père, Mr Rachid (Beik) Al-Khoury, était préfet de la
région, me raconta qu’elle était allée une fois, avec ses amies, des parentes à
nous, en visite à l’ermitage; après la visite, elles sont sorties sur la place
devant l’ermitage pour se reposer et déjeuner; peu après elles entendirent
quelqu’un frapper de l’intérieur à la porte fermée et en appelant: "où est la
fille de Mr (Beik)?" Ma mère répondit: "c’est moi, que voulez-vous?" Alors
il ouvrit une lucarne pratiquée au milieu de la porte, tendit sa main à
l’extérieur, sans la voir et lui donna une assiette de miel. Pour maman, ce fut
la seule fois où elle entendit la voix du Père Charbel, malgré ses visites
fréquentes à l’ermitage".
5-Il les bénit
"Une fois, j’étais à l’ermitage où un groupe d’hommes et de femmes
étaient à l’église, Père Makarios arriva et demanda aux femmes de sortir parce
que Père Charbel devait entrer pour célébrer l’Eucharistie. En sortant, les
dames demandèrent la bénédiction de Père Charbel; elles se misent sous la
fenêtre, tête baissée, toute couverte d’un drap, l’ermite sortit sa main de la
fenêtre et les bénit".
6-Le corps ressemble à un
âne
"Les moines l’entendaient toujours répéter devant eux: "ce corps
ressemble à un âne, si on le rassasie, il regimbe; si on l’affame, il
s’humilie".
7-Posez la bouteille par terre et
éloignez-vous
"Lorsque des femmes venaient pour bénir leurs bouteilles, et qu’il se
trouvait seul à l’ermitage, il leur répondait de l’intérieur: "posez la
bouteille par terre et éloignez-vous". Puis, il prenait la bouteille et la
remplissait de l’eau bénite, la remettait à sa place et disparaissait. En route,
quand une femme le surprenait, il sursautait, changeait de chemin, courant parmi
les épines; il ne regardait personne".
8- Restez dehors
"Lorsque des femmes menaient leurs enfants pour que Père Charbel les
bénisse, il demandait à son compagnon de lui tenir compagnie, disant aux
mamans: "restez dehors"; puis, il priait et bénissait les petits;
quand un petit enfant, refusait de s’éloigner de sa mère, il l’envoyait à son
compagnon, demandant à la maman de s’éloigner".
9- Jusqu’à ce qu’il soit
parti
"Les femmes estimaient grandement Père Charbel, tellement que
lorsqu’elles savaient, par avance, qu’il allait passer par l’endroit où elles
étaient, elles disparaissaient jusqu’à ce qu’il soit parti",
"spectacle que j’ai vu de mes propres yeux".
"Et je me rappelle qu’une fois, je labourais le champ avec le responsable du
travail, frère Élias Al-Mahriny et le domestique, Sleiman Al-Manzili, au
Sud-Ouest du couvent, quand nous vîmes les femmes qui revenaient du couvent
après la messe, en train de courir, cherchant à se cacher derrière les rochers
et les arbres; je demandai à frère Élias de la raison pour laquelle elles
couraient, il me répondit: "peut être Père Charbel arrive-t-il de l’ermitage au
couvent"; et comme ces dames savent que l’ermite évite de voir les femmes, elles
se cachèrent par respect à lui. En effet, un instant après, voilà que Père
Charbel s’approchait du couvent; après qu’il eut disparu, elles reprirent le
chemin pour rentrer chez elles".
10-Une tentation me
harcela
"Père Charbel se trouva, une fois, dans les propriétés situés entre le
couvent de Annaya et Laqlouq, pour dire la messe, au responsable des travaux
champêtre, frère Boulos de Mechmech, qui labourait le champ avec le Père. Tandis
que le frère labourait la terre, il entendit le Père Charbel, qui travaillait un
peu plus loin, crier et demander secours comme un petit enfant; alors, il laissa
son travail et accourut pour voir ce qui lui arriva; il le trouva sain et sauf;
il lui dit: qu’avez-vous?" Il répliqua: "rien"; puis à peine le frère
reprit-il son travail, il l’entendit crier de nouveau, il s’approcha de lui en
disant: "es-tu fou?" Pourquoi ces cris? Dis-le moi".
"Puis-je t'aider!? Que se passe-t-il!?"
"Il répondit calmement à voix basse: "une tentation me harcela",
"pardonnez-moi et priez pour moi".
11- Pourquoi cette
manie?
"Son amour pour Dieu a anéanti tout autre amour terrestre dans son cœur,
y compris celui des parents. Il est au Très Haut pour s’occuper entièrement de
son amour; il a purifié son cœur de celui de ses proches. Comme je passais l’été
au couvent Saint Maron à Annaya, je me suis rendu en visite aux ermites. Arrivé
près de l’ermitage, j’ai trouvé un certain nombre de femmes qui attendaient;
elles me saluèrent et me dirent: "nous sommes là à attendre depuis longtemps;
venues de Bqaakafra, à un jour de marche d’ici pour voir Père Charbel qui refuse
de nous rencontrer". Je leur répondis: "qui êtes-vous?" Elles répliquèrent:
"voilà sa sœur, et nous, nous l’accompagnons; nous vous prions de le persuader
afin de permettre à sa sœur de lui baiser la main; il lui manque beaucoup, car
depuis bien longtemps elle ne l’a pas revu". J’ai été très touché, me hâtant le
pas vers Père Charbel qui était à l’église, le priant de s’attendrir pour sa
pauvre sœur, venue de très loin, pour assouvir sa tendresse, même d’un clin
d’œil. Il répondit: "non, je ne sors pas". Puis je reviens en lui
disant: "ta sœur te prie de lui tendre ta main de la fenêtre pour la baiser
et retourner chez elle, comme elle me l’a promis", il rétorqua: "je ne
tendrai pas ma main de la fenêtre". Puis une troisième fois, je lui
dis: "ta sœur te prie de pendre ton mouchoir dans ta main et le passer sur
l’image de Saints Pierre et Paul". il répondit: "fais le toi-même et rends
lui son mouchoir", j’enchaînai:
"Et pourquoi cette manie? (originalité)" Il ne répondit pas. Alors j’ai mis le
mouchoir sur le bout d’un long bâton, le passant sur l’image accrochée très haut
et je le remis à sa sœur qui repartit triste, les larmes aux yeux. De ma part,
j’ai été stupéfié de ce comportement dur, incapable d’en saisir un sens; après
sa sortie de l’église, je disputai avec lui en disant: "tu n’aurais pas
dû
renvoyer cette pauvre sœur désolée. Où est la tendresse? Où est la pitié?" Il
n’a rien répondu; c’est alors que j’ai compris de son silence qu’il n’y avait
plus de place pour un amour terrestre dans son cœur qui ne bat que pour Dieu".
12-Sa nièce aussi
"Une fois, à l’âge de dix ans, et malgré ma maladie, j’ai accompagné ma
mère en visite à l’ermitage; il me prit par la main et m’introduit à
l’intérieur; quant à ma mère et sa compagne malade venue pour demander la
guérison, il ne les a pas reçues, se satisfaisant de leur parler par derrière le
portail".
"Une autre fois ma mère s’est rendue à l’ermitage pour voir son oncle,
l’ermite; il lui a parlé
brièvement de l’intérieur sans la voir; quand elle a insisté à participer à la
messe, il lui a permis de suivre à travers la lucarne de la porte de l’église;
quand il a pris la coupe pour bénir, il leva les yeux vers le haut de peur que
son regard ne tombe sur elle"".
U: Prisonnier de son bien-aimé
I- Présentation
"Il ne faisait rien à sa propre initiative, mais par obéissance à
l’autorité qui lui représentait Dieu, et pour mériter la récompense destinée à
l’obéissant"
"le moine doit considérer son supérieur comme étant le Christ",
d’où "son obéissance fut étrangement étonnante, prenant pour habitude de ne
commencer un travail qu’après avoir reçu un ordre";
"une obéissance aveugle, passée pour proverbe; quand le supérieur l’appelait
pour n’importe affaire, il abandonnait sur le coup, son travail pour obéir"
"sans y tarder un petit moment. Je ne me rappelle jamais avoir vu Père Charbel
effarouché ou angoissé quand il recevait un ordre, qui contrarie son naturel,
plutôt il était toujours égal à lui-même… sans volonté ni un penchant
particulier, semblable à un instrument muet entre les mains de ses supérieurs".
"Dans la prière, il restait orant jusqu’à ce que son compagnon
l’ordonnât d’un travail, ou bien il continuait, en attendant qu’il vienne lui
dire: "cela suffit"; il ne mangeait pas si on ne lui disait pas: "Mange",
"il obéissait au plus jeune que lui et au domestique";
"bref, toute sa vie peut être résumée en cette expression: "on l’ordonnait,
il obéissait".
"Au couvent, il se soumettait au supérieur; au champ, au responsable du travail
quel qu’il soit, même au domestique, à l’ermitage à son compagnon ou à son
remplaçant, même si le domestique lui disait: "fais ceci" il l’exécutait;
personne ne savait ce qui pouvait l’égayer ou l’attrister. Quand on l’ordonnait
d’abandonner la prière ou d’accomplir une mission hors de l’ermitage, il s’y
résignait de la même manière que si l’on venait de lui demander de prier ou
d’effectuer des activités spirituelles dont il se réjouissait; il n’a jamais
rien fait à sa propre initiative".
"Il ne se soumettait pas par idiotie ou par habitude, mais par dévotion
et vertu";
"comme il aurait souhaité à soumettre ses pulsations artérielles à
l’obéissance"
II- Récits et événements
1- Tu auras bien fait
"Une fois, il porta la dalmatique et commença la messe; et comme tous
les Pères avaient déjà célébré leurs messes, le supérieur vint l’arrêter, lui
disant: "attendez, car il y a des gens qui vont arriver pour participer à
l’Eucharistie". Il a obtempéré, debout près de l’autel une heure environ: puis,
il m’appela pour lui servir la messe, en me demandant si les gens qui
devaient participer à l’Eucharistie sont déjà arrivés, je lui répondis:
"permettez-moi d’aviser le supérieur et lui demander l’autorisation". Il
répliqua: "tu auras bien fait". Il demeura ainsi en attente jusqu’à
l’arrivée du supérieur qui lui dit: "continue la messe". Il n’a rien fait à sa
propre initiative, même pour le déjeuner, il attendait l’ordre de l’ancien
ermite ou bien du frère chargé de la gérance de l’ermitage".
2- Chez Père Makarios
"Quand on lui demandait du mets, il nous répondait: "je ne sais pas;
allez manger chez Père Makarios". si nous voulions manger du raisin, il nous
envoyait aussi chez son compagnon";
"si un ouvrier lui demandait une grappe de raisin, il lui répondait: "je ne
sais pas; va la demander à Père Makarios". Il ne donnait même pas une
feuille de vigne de lui-même et n’a jamais demandé l’autorisation à son
supérieur de donner quelque chose à quelqu’un".
3- Il garda sa pioche
levée
"Je faisais ma retraite spirituelle pré-sacerdotale au couvent Saint
Maron à Annaya; et tandis que j’étais debout aux extrémités de l’ermitage, je
vis Père Charbel piocher dans la vigne. J’eu pitié de lui et demandai à Père
Makarios, qui préparait le déjeuner près de moi, de l’appeler à se reposer et
manger; une fois le mets prêt, son compagnon l’appela: "Père Charbel" qui ne
réagit pas; alors, il le réappela plus fort; l’ayant entendu, il garda sa pioche
levée, attendant l’ordre; quand son compagnon lui demanda de venir pour le
déjeuner, du coup, il jeta la pioche et arriva".
4- Personne ne me l’a
demandé
"Je me rappelle d’avoir entendu de ceux qui travaillaient avec lui que
les moines et les ouvriers ont arrêté le travail pour manger sans l’appeler au
déjeuner, il a poursuivi sa besogne; par hasard, le supérieur du couvent passa
par là et demanda au Père Charbel s’il avait déjà mangé, alors que les autres
étaient près d’eux; il lui répondit: "non je n’ai pas encore déjeuné" -
"Et pourquoi?" Il répliqua "personne ne me l’a demandé". Alors le
supérieur s’adressa à ses compagnons: "pourquoi ne l’avez-vous pas appelé à
manger?" Ils répondirent: "nous l’avons oublié".
5- Il obéit aux novices
"Une fois, les novices étaient en train de travailler quand la cloche
sonna pour la prière; ils s’arrêtèrent et prièrent sans appeler Père Charbel qui
a poursuivi son travail. Quand ils lui demandèrent pourquoi il n’a pas prié avec
eux, il répondit: "vous ne me l’avez pas ordonné". Ils crurent qu’il
se moquait d’eux et se fâchèrent. Le deuxième jour, ils ne l’ont pas appelé à la
prière; il continua son travail, c’est alors qu’ils comprirent que Père Charbel
ne fait rien sans ordre; en effet, le troisième jour, dès qu’ils
l’ordonnèrent de
participer à la prière, il a tout abandonné et obéit".
6- A titre de
plaisanterie
"Un jour, Père Charbel dit à son compagnon Père Makarios: "au
couvent, ils ont besoin des bûches, et il n’y en a pas par ici"
"d’où est-ce que vous voulez que j’en coupe?" Il lui répondit avec
emportement (vivacité)",
"à titre de plaisanterie: "va au bois d’Al-Mihal", (qui est à trois heures de
marche de l’ermitage); Père Charbel est allé à la
montagne sus-indiquée, en a coupé des bûches et
les transporta à l’ermitage dans l’après midi",
"le soir",
"fatigué, tout en sueur",
"avec au dos le fardeau";
"Père Makarios l’interrogea: "D’où est-ce que tu as cherché le bois? Pourquoi
as-tu tardé, rentrant aussi fatigué?" Il lui répondit: "de la montagne
Al-Mihal, comme vous me l’avez ordonné". Père Makarios lui
répondit: "pourquoi es-tu allé jusqu’au là-bas alors que l’ermitage est entouré
de bois?" Il lui répliqua: "ne m’as-tu pas demandé d’aller à Al-Mihal? Toi tu
m’as ordonné et moi j’ai obéi".
"Père Makarios s’étonna de cette peine qu’il supporta".
7- Il ne dit pas "non"
"Mr Rachid Al-Khoury, préfet de la localité, a adressé une sollicitation
au supérieur d’envoyer Père Charbel de venir chez lui bénir l’eau et
asperger les lieux où les sauterelles étaient répandues intensément, en ce
temps là. En effet l’ermite jouissait d’une réputation de chasser les
sauterelles par ses prières. Sur ce, le supérieur l’ordonna d’y aller; sans
l’interroger sur le but de cet ordre, sans objection aucune, il se dirigea sur
Ehmej. Une fois sur le lieu, et en présence de tous les habitants du village, il
bénit l’eau et rebroussa chemin; quant à nous, les moines de l’Ordre, nous
trouvons même parmi les moines vénérables, connus par leur dévotion et leur
observance pour la règle, ceux qui contestent parfois les ordres du supérieur ou
présentent leurs excuses de ne pas s’y soumettre, soit pour des raisons de santé
ou d’ordre morale publique; tandis que Père Charbel n’a jamais refusé sous prétexte de santé ou autre, même quand il était évident pour tout le
monde qu’il devait refuser".
8- Mets-toi d’accord avec Père
Makarios
"Je lui ai demandé,
une fois, de présenter la messe à mon intention, lui offrant une somme d’argent;
il a refusé remettant la question à son compagnon et me dit: "Mets-toi
d’accord avec Père Makarios; s’il m’ordonne de dire la messe à ton intention, je
le ferai".
V: Son espérance est soif
pour le bien-aimé
I- Présentation
"Son espérance en Dieu était ferme; il considérait la vie, dans tout ce
qu’elle comporte, comme rebut pour gagner le Christ; quand on procédait à des
changements dans l’ordre",
"il n’exprimait ni joie ni trouble, sans chercher à savoir si les moines proches
de lui avaient occupé des postes de premier ordre, pour compter sur eux; il ne
s’attristait non plus à cause des mutations dans le rang des responsables et des
fonctionnaires, ou la destitution de ceux qui lui montraient de l’intérêt";
"quel qu’il soit l’événement qui se déroulait dans l’Ordre, il n’influait
aucunement sur sa vie spirituelle ou ses services";
"il ne s’intéressait aux affaires du couvent que dans la mesure où l’obéissance
l’ordonnait de s’occuper; là où il voyait une lacune dans une affaire dont il
n’a pas été chargé par l’autorité, il n’y intervenait pas; il ne manifestait pas
la joie pour un progrès matériel au couvent, ni la tristesse pour une perte",
"il ne parlait pas des achats de terrain, ni des propos politiques qui
intéressaient l’Ordre; à l’ermitage et au couvent, il y vivait comme s’il n’y
existait pas":
"toutes ses pensées étaient dirigées vers Dieu, personne ne l’a entendu parler
des choses de la vie, ou de celles qu’il désirait, ou de l’un de ses confrères,
ni des gens ni de ses parents, d’une joie devant la réalisation d’une affaire
mondaine; il ne s’arrêtait à aucun fait terrestre, dans le meilleur ou dans le
pire".
"Il conjuguait tous ses efforts pour le salut de son âme et celui des autres;
son seul souci tendait vers la complaisance de Dieu. Pour cette fin
eschatologique, il a supporté les tribulations, les peines, et la rigueur
extrême qu’il s’imposait".
II- Récits et événements
1- Plus compétents que
moi
"Il n’a jamais compté sur les hommes; je me rappelle qu’on lui a dit une
fois, que le conseiller
veut te désigner supérieur, il répondit étonné: "Dans l’Ordre, nombreux sont
ceux qui sont plus compétents et plus aptes que moi, c’est généreux de la part
de l’Ordre qui reçoit un fainéant comme moi".
2- Travailler pour la gloire de
Dieu
"Il accomplissait ses travaux pour glorifier Dieu et obtenir le bonheur
éternel. Il nous répétait: «travaillez pour la gloire de Dieu, et votre
récompense sera le bonheur éternel.» Cette espérance en lui, le poussait à
mépriser les choses de cette vie
périssable et à pratiquer les mortifications et l’ascétisme",
"il me répétait toujours cette phrase: "cette vie est périssable; elle
ne peut rien donner".
3- Les lumières du ciel sont plus
belles
"Père Charbel possédait la vertu de l’espérance, jusqu’à l’héroïcité,
car il a tout abandonné pour se cloîtrer au couvent, puis à l’ermitage où il a
mené une vie rigoureuse pleine d’ascétisme, de veille et de mortifications
perpétuelles, dans une ambiance très rigoureuse sur le sommet d’une montagne,
sans faiblir ou négliger quelque chose au fil des années; plutôt il allait
toujours plus loin, au point où personne ne pouvait l’égaler, sauf celui qui
jouissait d’une espérance illimitée en Dieu. J’ai ouï dire, qu’un moine
s’adressait à lui un soir: "regarde la ville de Beyrouth, comment elle brille de
lumière". Sans se tourner, il lui répondit: "les lumières du ciel sont
meilleures et plus belles". Puis il rentra dans sa cellule".
4- Un devoir que
j’ignore
"Il se désintéressait d’une réussite réalisée par ses parents ou d’une
perte qu’ils subissaient; une fois son compagnon, Père Makarios, me raconta que
son frère lui avait rendu visite et qu’il avait voulu lui parler de nouvelles de
leur maison et de leurs récoltes, Père Charbel répondit: "c’est un devoir que
j’ignore, et je ne veux pas en entendre parler". Ceci dit, il prit sa pioche
et se dirigea vers la vigne. C’était un homme qui existait dans cette vie
seulement par sa physique, mais son cœur et sa raison vivaient au ciel; il ne
s’émouvait ni devant une joie ni devant une tristesse".
5- Dieu dispose
"Il avait toujours les yeux fermés, comme s’il avait détourné son
regard, sa raison et son cœur des choses de la vie; il vivait dans une oraison
continuelle au ciel seulement; lorsque les foudres s’abattaient sur l’ermitage,
situé sur
une haute cime ou bien un malheur frappait le couvent, il réagissait par
l’abandon à Dieu en disant: "Dieu dispose, c’est sa volonté". Chaque
fois qu’on lui parlait d’un malade, de quelqu’un dans l’impasse ou besogneux, il
disait: "Dieu dispose, fions nous à lui". Quand
quelqu’un lui demandait quelque chose, il le persuadait de se réfugier à Dieu
et la lui solliciter".
W: Refuge des fidèles et
des pauvres
I- Présentation
"Je l’ai connu ermite, mais avant de le rencontrer, j’avais déjà entendu
parler de sa réputation par le biais des moines et des laïcs, et même des
Chiites"
"qui affluaient vers lui nombreux, conduisant leurs enfants, pour prier pour
eux, bouteilles d’eau à la main pour les bénir",
"l’accompagner chez eux pour guérir leurs malades, éloigner d’eux tous les
désastres, conserver leurs bestiaux et leurs propriétés"
"des maladies et des épidémies, en augmenter la fertilité et les récoltes"
"et en asperger les maisons".
"Il ne faisait rien sans être ordonné par son compagnon";
"et alors, par obéissance, il recevait les gens ave tendresse et charité et
intimité, s’attendrissait pour leurs situations et priait pour eux",
"leur bénissait l’eau"
"dont émanait une force prodigieuse";
"après quoi Charbel retournait à lui-même; quant aux visiteurs, c’était son
compagnon qui les accueillait et leur offrait l’eau bénite".
"Mon Père nous apportait l’eau de sa main".
"Les malades, les handicapés, les affligés, les souffrants des malheurs
affluaient chez lui de toutes parts pour solliciter auprès de lui les grâces de
Dieu parce qu’ils croyaient à sa bonté et que Dieu les exauçaient par son
intercession";
"il ne se mêlait pas avec les visiteurs, mais il priait pour eux".
"Sa dévotion influait beaucoup les laïcs qui le convoquaient à visiter
leurs malades et prier à leur chevet pour leur guérison";
"lorsque le supérieur l’ordonnait de visiter un malade et prier pour lui",
"il obtempérait sans se cacher derrière son état d’ermite, exécutant l’ordre
avec silence"
"comme de coutume, visitant les malades pour solliciter leur guérison physique
et en particulier, accordant de l’importance à leurs âmes; il refusait en
l’occurrence, tout offre pécuniaire ou des présents; il s’acquittait de ses
services par amour de Dieu";
"le plus grand service qu’il présentait au prochain, c’était sa prière
perpétuelle pour lui obtenir les grâces et le salut de son âme; il ne renvoyait
personne de ceux qui venaient lui demander un soutien spirituel";
"le visiteur qui entrait chez lui à l’ermitage, il en sortait pour témoigner la
sainteté de l’ermite, consolé par sa rencontre et heureux de sa visite".
II- Récits et événements
1- En silence
"Nous croyons tous, qu’il est Saint à qui nous nous réfugions en cas de
maladie et de malheur; nombreux sont ceux qui portent son nom pour obtenir sa
bénédiction; personnellement je crois que Charbel est un grand Saint au ciel; il intercède pour nous en
silence, sans nous rendre compte du bien qu’il nous fait, comme il le faisait de
son vivant".
2- Tous, à
l’image du Christ
"Père Charbel ne se mêlait pas aux autres; mais il était
charitable envers tout le monde; dans ses prières pour les malades, pour les
voyageurs et les besogneux; il s’attendrissait et intercédait avec ferveur pour
que le Seigneur ait pitié de ses serviteurs malades. Quand à ses rapports avec
ses confrères au couvent, ceux de l’ermitage et ceux avec qui il a établi des
relations, personne d’entre eux n’ignorait que son cœur les embrassait tous
d’égal, sans discrimination dans sa charité pour eux; il les considérait tous
comme des frères, à
l’image du Christ, vénérant les uns et les autres".
3- Il offrait son
déjeuner
"Il avait pitié des pauvres, mais dans les limites de ses possibilités;
lorsqu’il recevait un pauvre à l’ermitage, il demandait à son compagnon de
lui offrir son déjeuner. En hiver quand il faisait froid, il entrait les
hommes à l’ermitage pour se réchauffer près du feu".
4- Je suis pêcheur
"Il répondait aux gens qui demandaient sa prière, disant: "Je suis
pêcheur. Que la prière des Saints comblent vos demandes". "Quand
quelqu’un lui demandait de prier pour lui ou de lui solliciter une grâce
spirituelle, il répliquait: "Je suis le plus vil, un pêcheur".
5- Tu peux être saint
"Quand quelqu’un lui demandait de prier pour lui, il lui répondait:
"Toi aussi prie; quelle est la différence entre toi et moi? Dieu t’écoute
aussi bien que moi". A celui qui lui disait qu’il était Saint, il lui
répliquait: "nous sommes semblables; qu’est-ce qui t’empêche d’être saint
?".
6- Fiez-vous à Dieu
"Quand on lui demandait une prière, il disait tranquillement: "que la
prière des Saints soit avec vous";
"réfugiez-vous à Dieu, et il disposera de vos affaires", puis il
s’éloignait d’eux";
"aux visiteurs qui sollicitaient sa bénédiction et sa prière, il le réalisait
sans les regarder, en disant: "Demandez au Seigneur de vous donner selon
votre foi".
7- Sa prière guérissait les
malades
"Chaque fois que monsieur Rachid Al-Khoury, préfet de Ehmej, tombait
malade, il appelait Père Charbel afin de prier pour sa guérison, car il croyait
en sa sainteté; aussi les habitants de la localité"
"qui sollicitaient sa prière, en cas de maladie et des adversités. Sa dévotion
exerçait une grande influence"
"sur tout le monde, car il guérissait les malades par sa prière";
"d’habitude, quand quelqu’un de Ehmej tombait malade, les habitants se
dépêchaient auprès de Père Charbel pour prendre de l’eau bénite";
"beaucoup d’entre eux lui demandaient sa prière dont l’effet remédiait aux
maladies et aux malheurs. Les malades qui ne pouvaient aller à l’ermitage, ils
se procuraient d’eau bénite par lui, et obtenaient la guérison de leurs
maladies";
"quiconque s’aspergeait ou buvait de cette eau, il guérissait".
X: Sa passion pour la
prière
I- Présentation
1- En conversation confidentielle avec le
bien-aimé
"Il faut qu’il dépasse les confrères à l’église pour en sortir, après
tout le monde";
c’est pourquoi "quand il se réveillait, il se dirigeait immédiatement vers
l’église où il demeurait environ 5 heures",
"agenouillé jusqu’au durcissement de ses genoux",
"tout droit, infatigable, sans s’appuyer",
"sans regarder ni à droite ni à gauche";
"je ne l’ai jamais vu assis à l’église",
"il participait à la prière comme autour du pupitre, partageant toutes les
prières"
"et les génuflexions répétées";
"je ne me rappelle jamais qu’il avait manqué une fois la prière communautaire
autour du pupitre, sauf au cas où l’obéissance l’ordonnait d’effectuer un
travail quelconque";
"il s’adonnait à la méditation mentale, en plus des offices de prière"
"qu’il accomplissait à temps; ses oraisons jaculatoires qu’il récitait pendant
trois heures par jour dont une partie diurne, l’autre nocturne";
"il récitait ses offices de prière mot à mot";
"quant à la prière en chœur, il l’accomplissait dans le bréviaire complet, aux
ordres de son compagnon, méticuleusement, comme s’il était en
présence
d’un roi",
"et en pleine extase";
"le jour, je ne l’ai jamais vu réciter ses offices assis, mais agenouillé",
"priant avec beaucoup de soin";
"quand il travaillait au champ, il priait à genoux"
"s’appuyant sur ses talons, bréviaire posé devant lui par terre et bras
croisés".
"Il ne manquait jamais l’office de minuit qu’il accomplissait avec son
compagnon; il prolongeait ses veilles dans la prière";
"car quand j’étais servant des messes et puis moine, je le voyais maintes fois,
à genoux, tout droit à prier à l’église",
"occupant la majeure partie de la nuit orant",
"selon le règlement de l’ermitage; après quoi il allait parfois se reposer une
heure, pour reprendre après la méditation, la prière et la lecture";
"il s’est tellement sublimé qu’il est devenu l’intime de Dieu et le
confident des anges, passant la
majeure partie de la nuit dans la prière";
"selon l’usage, les moines devaient se lever pour l’office de minuit après
lequel certains retournaient pour redormir, tandis que d’autres, comme Père
Nehemtallah de Hardine et Père Charbel ne se recouchaient pas, occupant leur
temps à prier jusqu’à la célébration des messes, après lesquelles ils
s’occupaient du reste des obligations; puis ils s’en allaient au travail".
"Il a passé sa vie dans la méditation, la prière et la pratique des cultes"
"avec assiduité et non
pas d’une manière
occasionelle, plutôt c’était un culte basé sur un amour intense pour
Dieu, le liant à lui par la pensée et le cœur, tellement que Dieu demeurait
présent dans sa raison, soit dans sa prière, soit dans son travail, soit dans
son manger, ou son sommeil; bref il ne vivait plus pour lui-même mais pour
Dieu",
"ne parlant plus des choses de la terre, ne se permettant d’entrer que dans des
propos spirituels";
"il vivait tout entier au couvent comme s’il était en retraite spirituelle";
"il avait l’air d’un humain, alors qu’il planait dans le ciel".
2- Il chérissait le mystère de
l’amour
"Celui qui aime une chose ou une personne, y pense, parle beaucoup de
lui et de ses actes, la cherche toujours pour la rencontre en permanence, il en
était ainsi de Père Charbel, toujours silencieux, ses pensées toujours
tournées vers Dieu, son bien-aimé; rares étaient les phrases qu’il
prononçait et qui ne contenaient pas le nom de Dieu; il profitait de tout petit
moment pour le passer à l’église, en communiant avec le mystère de l’amour. Dans
son cœur, il n’y avait place que pour Dieu",
"dépassant les autres ermites par ses visites nocturnes au Saint Sacrement, je
le voyais, assez souvent, humble et recueillit devant le Saint Sacrement",
"méditant",
regard fixé sur le tabernacle, pendant des heures, sans bouger, comme une
statue";
"la majeure partie de ses veilles, les passait à l’église";
"en visite au Saint Sacrement";
"chaque fois qu’on perdait Père Charbel, on le trouvait à l’église",
"devant le Saint Sacrement en attitude d’extase".
"Dès que la cloche sonnait minuit, il se réveillait et précédait tout le
monde à l’église pour en sortir le dernier",
"y demeurant jusqu’au matin, agenouillé devant le Saint Sacrement; on entendait
sans cesse, ses soupirs, sa nostalgie",
"le fredonnement de son oraison, d’un visage aux traits qui attendrissent les
rochers, et imprègnent les regardants de recueillement et de respect";
"devant le Saint Sacrement on ranime le cœur par l’amour divin et nous nous
repantons pleinement de nos fautes… Nous n’avons que ta volonté, Ō jésus";
"mon ciel est caché dans une petite hostie où Jésus est caché par amour. C’est
là où mon
Sauveur docile m’écoute jour et nuit" (cf le texte originel).
3- Il chérissait le
rosaire
"Depuis son enfance, Youssef récitait son rosaire";
"une fois dans l’ordre, dans ses va et vient au travail dans les champs, il
continua à le réciter";
"regard baissé";
"tout le monde savait que Père Charbel ne se passionnait que pour ses offices de
prière, son église";
"son assiduité à réciter son rosaire après minuit";
"Quelquefois, à sa
demande, je participais à la récitation de son rosaire et à ses visites au Saint
Sacrement, il s’agenouillait tout droit, immobile, ses mains croisées sur sa
poitrine, mettant sous ses genoux un plateau en osier qu’il avait
confectionné de ses
propres mains; il restait dans la même attitude tout au long de la durée du
Saint rosaire, suivi, sans pause, par la visite au Saint Sacrement; il était
foncièrement voué au culte du Saint Sacrement et à la Vierge Marie";
"je lui partageais la récitation du rosaire".
II- Récits et événements
1- L’habit de N.D de
Carmes
"Une fois, Père Charbel m’a signalé son souhait de lui envoyer une
amulette triangulaire représentant l’habit de N.D, celui de l’immaculée
conception et la passion;
pour la suspendre au cou; je la lui ai confectionnée et la lui ai envoyée avec
un homme de (Aarabat Kozhaya) qui devait passer par le couvent Saint Maron
Annaya, après lui avoir recommandé de
demander au Père Charbel de lui citer trois noms de ses parents à Bqaakafra et
me les citer quand il serait de retour, pour m’assurer que l’amulette a été
livrée au destinataire; j’ai exprimé au messager mon souhait de me ramener du
Père Charbel une bénédiction ou bien une réplique. De retour, l’homme m’a donné
un petit papier plié en enveloppe, et m’a dit: "outre ce papier, l’ermite ne
vous a rien envoyé". J’ai ouvert le papier dans lequel j’ai vu quelques mots,
écrits de sa main: "Père Charbel ermite Saint Maron Annaya moine de
Kozhaya;
à celle qui demande une bénédiction ou bien une relique; que la bénédiction des
Saints Pierre et Paul descende sur vous". C’était cela qu’il m’a
envoyé; j’ai été extrêmement contente de ce papier qui portait l’écriture de la
main de l’ermite; les mots ont été écrits en arabe et dont l’écriture n’étais
pas belle; ma supérieure, en ce temps-là, la mère (Zéarah de Ghosta) m’a
conseillé de bien conserver ce papier, en me disant: "ce papier qui porte
l’écriture de l’ermite, est une relique; garde là avec toi. "j’ai enroulé le
papier dans une petite étoffe et je l’ai cousue et suspendue dans le cou; plus
tard, avant le voyage de ma sœur en Amérique, je le lui ai offert pour la
sauvegarder du danger de la mer.
"Une autre fois j’ai envoyé au Père Charbel avec un habitant du village
sus-mentionné et qui devait passer par le couvent d’Annaya, environ dix
amulettes qui représentent les habits de N.D et d’autres de Kozhaya, qu’on
suspend au cou; ce geste fut à ma propre initiative; puis j’ai demandé à l’homme
de m’apporter une bouteille d’eau bénite par l’ermite. De retour, l’homme me
dit: "je lui ai livré les amulettes; et voilà la bouteille d’eau bénite de sa
part". je la pris, j’entrai dans ma chambre et je la débouchai pour m’en
asperger, parce que j’étais atteinte de rhumatisme; avant de m’en asperger, une
idée me vint à la tête, et je me dis: "le messager n’a pas livré les amulettes à
l’ermite, non plus cette bouteille ne me provient pas de lui"; comme si le doute
me fut inspiré.
"Un jour la mère du messager vint au couvent d’Al-Qarn, je lui dis avec
astuce: "ton fils n’a pas donné les amulettes à l’ermite, mais il les a gardées
pour lui, puis il a rempli la bouteille de la fontaine d’Al-Fouskaïn à Al Aaraba" elle me répondit: "C’est vrai, il les a prises avec lui
en Amérique, il vous en enverra le prix, et celui de la bouteille". Alors
je me suis dit: "c’est Père Charbel qui m’a inspiré ce que cet homme a fait,
sans que personne ne l’ait rapporté d’avance".
2- C’est moi (Mc 6,50)
"Avant
de devenir moine dans ce couvent, j’étais servant des messes et sacristain; une
nuit, j’entrai à l’église vers minuit pour vérifier si la veilleuse était
toujours allumée, je la trouvai éteinte; je commençai à tâtonner dans
l’obscurité pour la rallumer, je me heurtai à quelqu’un et j’eus peur, il me
dit: "N’aie pas peur, c’est moi!" je le reconnus à sa voix, c’était Père
Charbel agenouillé à l’église pour méditer à minuit".
3- Qu’est-ce qui se passe autour de
lui?!
"Il était toujours pris par ses méditations mentales, pensif, plongé
dans les cieux, spécialement pendant la célébration Eucharistique; quiconque le
voyait, se rendait compte que tous ses sentiments, tout son corps, toutes ses
conceptions étaient en Dieu, négligeant tout ce qui était terrestre; à force de
centrer ses pensées sur Dieu, il s’oubliait comme s’il n’existait plus dans ce
monde; toujours dans un silence et tranquillité superflus, tellement qu’il
ignorait ce qui se passait autour de lui; la question qu’il m’adressa pendant
que nous travaillions dans la vigne, témoigne de son cas, en me demandant:
"combien de paires de bœufs labourent dans la vigne?" Je lui répondis:
"trois; pourtant tu travailles avec nous toute la journée et tu ne sais pas le
nombre de bœufs qui labourent?" Il garda le silence".
4- Il s’adressait à Dieu avec les
Anges
"Je le voyais pendant la prière, comme hors de ses sens, extasié en
Dieu, insensible à tout ce qui l’entoure, des personnes et des choses, tellement
qu’il ne voulait pas réaliser qu’il y avait quelqu’un qui l’accompagnait dans sa
prière; quand c’était mon tour de répondre et que je continuais à voix basse, il
poursuivait la prière seul… je l’imaginais déjà au ciel à s’entretenir avec Dieu
de face à face, de bouche à oreille et de cœur à cœur, comme si son corps
n’était pas sur cette terre; mais son âme, j’avais l’impression qu’elle
était
fusionnée aux Anges, présentant avec eux la louange et la glorification à
Dieu".
5- Semaine Sainte
"Si le supérieur ou le cuisinier l’appelaient pour aider à la
panification, il se hâtait, silencieux pour s’acquitter de son travail; de même
quand on l’ordonnait de participer à l’office de prière en chœur, parce qu’il
avait un bon dicton et une lecture aisée".
6- Soumets-toi à Dieu
"Un jour, mon fils, Gerges était
dans une situation très précaire de sa maladie; je me dirigeai à l’ermitage,
demandant à Père Charbel de me donner de l’eau bénite, il me dit:
"Assieds-toi maintenant que Dieu dispose". Je réitérai ma demande; il répliqua: "calme-toi, soumets-toi à Dieu, il te
compensera"; ceci dit, il ne me donna pas de l’eau bénite; je rebroussai
chemin triste et étonné de son refus de me munir de l’eau bénite, contrairement
à son habitude; en m’approchant du village, j’entendis des cris et des pleurs
qui sortaient de ma maison, c’est alors que j’ai compris que mon fils était déjà
mort; à ce moment-là, je me rappelai de ce que Père Charbel m’a dit:
"assieds-toi maintenant et Dieu te compensera". Et pourquoi il a refusé
de me donner de l’eau bénite, comme s’il avait été inspiré par l’Esprit de la
mort de mon fils et qu’il n’avait pas voulu me le dire".
7- Cela est déjà inutile
"Mon frère, Gerges, était gravement atteint de la thyroïde, et les
medecins suspendirent tout traitement. Mon grand-père Mikhaël, Boutros Ramia,
voulut recourir à la prière de l’ermite, car il croyait en son efficacité; alors
il me donna une piastre ottomane pour la remettre à l’ermite à qui je devais
demander de dire une messe à l’intention de mon frère; je la pris et me dirigea
à l’ermitage où je trouvai Père Charbel agenouillé à l’église en train de prier
et je lui dis: "mon grand-Père m’envois auprès de vous pour vous donner cette
piastre afin de dire une messe pour la guérison de mon frère". Il me répondit:
"cela est déjà inutile; donne l’aumône à mon confrère". Je la lui déposa
par terre devant lui; puis je repartis; arrivé en face du village, j’entendis
les pleurs et les lamentations qui provenaient de la maison; mon frère était
déjà décédé".
8- Que Dieu te
récompense
"Mon fils aîné, Tanios,
tomba subitement malade alors qu’il avait un mois et demi; mon frère Boutros, se
dirigea à l’ermitage pour se procurer de l’eau bénite de
l’ermite; dès qu’il lui en demanda, il répondit: "que Dieu te
récompense". Avant le retour de
mon frère à la maison, le petit était déjà décédé".
Y: La foi de
Charbel
I- Présentation
"La foi de Charbel se reflétait à travers sa messe"
"qu’il disait comme s’il voyait le Christ derrière les formes, s’adressait à lui
de cœur à cœur",
"le faisant avec soin, recueillement et respect extrême, comme si Dieu était
devant lui";
"il versait abondamment ses larmes durant la messe"
"pour laquelle il se préparait longuement par la méditation et la prière,
agenouillé tout droit devant le Saint Sacrement";
"combien étaient longues la préparation et l’action de grâce après!".
"Quand il prononçait les paroles de consécration et l’orémus (Ô Père de
vérité),
il se recueillait profondément et prenait un air foncièrement révérenciel",
"il paraissait propre dans son habit quand il voulait dire la messe, signe
évident de sa croyance en l’incarnation du fils de Dieu et sa descente sur
l’autel; il ne se lavait les mains qu’avant la messe".
"Sa foi se laissait voir dans le soin accordé aux prières, dans le temps
consacré aux méditations, dans sa bonne lecture de son office de prière"
"qu’il disait mot à mot d’une voix basse et tendre";
"il consacrait la majeur partie de son temps dans la prière et la méditation;
chaque fois qu’il n’avait pas de travail manuel, il se trouvait à l’église"
"pour méditer en Dieu et ses perfections, tellement absorbé qu’il lui fallait du
temps pour retourner au réel et entendre son locuteur";
"je me disais: "c’est un ange et non pas un humain"
"quand il s’engageait dans une conversation spirituelle, il s’enflammait du
zèle, parlant de l’abondance de son cœur et la ferveur de sa foi; il n’a
manifesté de toute sa vie un signe d’ennui, de recul et de lassitude, devant les
propos spirituels, mais il s’y
adonnait avec ferveur comme s’il jouissait des choses que son cœur désirait".
"Son obéissance à son supérieur ou à son représentant, nous fournit une
preuve évidente qu’il voyait Dieu en la personne du supérieur, et à travers sa
voix; il entendait la voix divine";
"il respectait infiniment ses supérieurs",
"sans considérer si celui-ci ou celui-là
en était digne ou non".
"Dans son travail, l’esprit de la foi, se montrait dans tout son
comportement, tout comme dans ses prières et sa messe";
"il ne faisait rien de lui-même, car sa foi était ferme que la voix de
l’autorité était la seule qui portait celle de Dieu. Cette obéissance se basait
sur une foi vivante, décelable dans tous ses mouvements: dans la messe, dans la
prière, dans le manger, dans le sommeil".
"Tous ses actes étaient ciselés avec soin et vivacité et témoignait avec
authenticité de sa foi fervente";
"tous ceux qui le connaissaient et le contemplaient en train de dire sa messe ou
de prier ses offices, sortaient émus de son attitude recueillie, car ils
voyaient les traits de la dévotion et de la pitié, dessinée sur son visage
rayonnant de lumières célestes; c’était là le plus grand indice sur la grandeur
de sa foi en Dieu",
"laquelle rayonnait dans ses œuvres, laquelle foi lui imposait sa vénération à
son Dieu devant qui il s’agenouillait sur un plateau en osier pendant de longues
heures à l’église, tout droit inerte comme une pierre".
"Dieu l’a gratifié du don de connaissance de l’au-delà, vu sa foi
vivante, dont bien des événements en témoignent; par conséquent, il était une
flamme ardente de sa foi";
"quiconque a fréquenté Père Charbel a bien saisi qu’il vivait dans la foi plus
que dans le corps; la vie ne l’intéressait plus, tout son être dans ses pensées,
ses sentiments, les battements de son cœur, tout entier était déjà orienté vers
l’au-delà. Il a mortifié son corps par l’austérité; il a privé sa vue de tous
les paysages du monde; le tout en lui était focalisé sur la médition; à le
contempler durant sa messe et ses prières, on lisait sur son visage ce qu’il
avait de foi dans le cœur".
II- Récits et événements
1-Une foudre
"Un jour, Père Charbel était à genoux, tout droit à l’église, absorbé
dans sa prière devant le Saint Sacrement, une violente foudre s’abattit sur
l’ermitage, brûlant une chasuble neuve, brochée d’argent, posée sur l’autel,
elle sillonna le milieu de l’église, passa à côté de lui, mettant le feu au bord de son habit sans le nuire; moi
et les moines du couvent, nous accourûmes à l’ermitage pour voir ce qui s’y
passa; nous trouvâmes que la foudre s’y abattit du côté sud, démolissant des
pierres des murs de soutènement des lopins de la vigne; puis pénétra dans
l’église, mettant le feu dans les nappes de l’autel et les chasubles déposées
au-dessus, jetant la coupe dans un autre endroit, endommageant des images,
ouvrant les portes, répandant une odeur qui causa le vertige aux deux compagnons
de Père Charbel que nous trouvâmes dans la cuisine presque évanouis. Alors
qu’ils se réchauffaient auprès du feu; retournés à eux-mêmes, ils crurent que
Père Charbel trouva la mort; ils se précipitèrent à l’église où il priait, comme
si rien ne s’était passé. Alors le supérieur lui dit: "quand même Père Charbel,
n’as-tu pas pu éteindre les nappes et les chasubles?!" Il lui répondit: "mon
frère, éteindre quoi?! Sitôt commencé, sitôt
terminé". C’est-à-dire que le tout se déroula à la
vitesse de l’éclair; ne pouvant rien faire, il demeura à prier".
2- Les vers à soie épargnés de la
mort
"Du temps de mon mandat sur le couvent Saintserges à Qartaba, la
sécheresse endommageait, huit ans de suite, les vers à soie, lesquels, une fois
ont atteint la quatrième phase, et 9 jours, ils mouraient. J’ai envoyé l’un des
moines auprès de l’ermite, Père Charbel à l’ermitage d’Annaya, pour m’apporter
de l’eau bénite par lui; après son retour, nous avons aspergé les vers qui ont
guéri. Ainsi les récoltes ont été sauvées pendant tout mon triennat et les
années suivantes".
3- Ma récolte fut abondante cette
année-là
"Une fois, l’épidémie attaqua les vers à soie dans ma maison, à cause
des feuilles des muriers malades; les vers jaunirent, se précipitèrent sur les
bords des plateaux et tombèrent par terre; je courus à l’ermitage, en apportai
de l’eau bénite par Père Charbel et en aspergeai les vers à soie qui se
rétablirent immédiatement, retournèrent sur les plateaux et mangèrent;
j’entendis leur bruit comme d’habitude. Cette année-là ma récolte abonda
largement, grâce au Père Charbel".
4- N’en parle pas du tout (Mc 1,44)
"Saba Ghostine Obeid de Ehmej me raconta qu’en une année, les souris se
multiplièrent dans sa maison et attaquèrent les vers à soie chez lui, au point
d’en finir; il apporta de l’eau bénite par Père Charbel et en aspergea les vers
à soie;
le lendemain, il vint voir les plateaux, pour y trouver les souris mortes;
quelqu’un est allé raconter cet événement à Père Charbel qui lui dit: "n’en
parle plus".
5- Comme s’il s’adressait à une personne
importante
"Je le voyais agenouillé en train de prier son office qu’il disait assez
souvent en chœur avec la communauté autour du lutrin; quand il se trouvait seul
à l’église, il se mettait devant le lutrin et récitait l’office à haute voix,
prononçant soigneusement et clairement les paroles, comme s’il s’adressait à une
personne très importante, visible à l’œil nu, allant lentement, sans regarder ni
à droite ni à gauche; on l’entendait fredonner avec recueillement et respect
révérenciel",
"récitant son office de prière dans le bréviaire, lorsque son compagnon
l’ordonnait de le faire en chœur; il récitait méticuleusement comme en
présence
d’un roi d’une importance extrême; la foi, le recueillement et la piété étaient incarnés dans l’acte qu’il accomplissait".
6- La mule du couvent
"Une fois, la mule du couvent a eu la colique; elle tomba par terre, ses
yeux grand ouverts, sur le point de mourir; les moines et le muletier ont essayé
maints traitements pour la sauver, sans résultat; enfin, ils appelèrent Père
Charbel qui se tint à côté de sa tête et pria; à peine a-t-il terminé sa prière
qu’elle sursauta et se remit debout".
7- Il éloigne les
sauterelles
"Je me rappelle bien qu’à l’âge de douze ans,
les sauterelles envahirent le pays, entre autres mon village Ehmej. Le préfet de
la région,
en ce temps-là Mr Rachid Al-Khoury est allé chez le supérieur du couvent Saint
Maron à Annaya lui demandant d’envoyer Père Charbel à Ehmej pour en chasser les
sauterelles par sa bénédiction; l’ermite obtempéra; les habitants avaient déjà
rempli d’eau les jarres; et en ma présence, il a béni l’eau que les habitants
apportèrent et
en ont aspergé leurs vignes et leurs champs; les sauterelles cessèrent
d’endommager ces terrains-là; c’est ce que j’ai vu de mes propres yeux".
8- Suis Dieu pour empêcher la
mort?
"Un homme de ma famille, Chmouty de Batroun, possédait un troupeau de
moutons qui fut atteint d’une maladie épidémique mortelle, la fièvre jaune, à la
suite de laquelle, il en a perdu le plus grand nombre. Ayant entendu parler de
la réputation du Père Charbel, il vint lui demander de l’eau bénite, en lui
expliquant la maladie de ses moutons, l’ermite lui dit: "suis-je Dieu pour
empêcher la mort?' l’homme tourna le dos pour partir; alors il lui dit:
"as-tu un récipient pour le remplir d’eau?" Puis il lui bénit l’eau dont
il les asperga le troupeau qui guérit. Plus tard il a remarqué les vers à soie
chez lui qui diminuaient beaucoup; il retourna chez Père Charbel, prit de l’eau
bénite dont il aspergea; il trouva après des insectes, des souris, des hérissons
et un grand serpent, tous morts près des vers à soie".
9- L’arche de Noé
(Jn
17,15)
"Tous les habitants de mon village,
Ehmej, et les Chiites d’Almat, nos voisins, racontent que les sauterelles,
une année, envahirent en grand nombre la région, faisant partout table rase; le
supérieur du couvent, Père Élias de Mechmech, ordonna Père Charbel d’asperger
les limites des terrains du couvent pour empêcher les sauterelles d’y pénétrer;
Père Charbel obéit, seulement, il a oublié un terrain, situé parmi les
propriétés des Chiites; les sauterelles entrèrent dans la région, et dévorèrent
le vert et le sec, sauf les propriétés du couvent qui furent épargnés, à
l’exception du terrain qui fut rasé bel et bien"; "tout le monde, aussi les Chiites, ne
cessent de répéter ce phénomène, étonnés de voir toutes les plaines, les sommets
et les collines dépouillés de tout, sauf les terrains du couvent qui restèrent
verts, sauvés de l’endommagement, comme l’arche de Noé au milieu d’une
dévastation complète".
10- La vigne qui fait partie des biens de l’église
paroissiale de Ehmej (Jn
15,15)
"Quand les sauterelles envahirent le pays, il y a plus de trente ans,
mon père envoya mon frère Boutros, auprès de Père Charbel, le priant de venir
bénir l’eau et en asperger la vigne de l’église dont il était chargé; et je ne
me rappelle plus les détails, c’est mon frère qui les connaît plus que moi; de
ma part ce que je sais c’est que la vigne et les semences aspergées ont été
épargnés des dommages des sauterelles qui rasèrent tout, cette année-là; les
habitants de Ehmej venaient voir cette vigne, aussi Père Élias de Mechmech, le
supérieur du couvent, de qui j’étais le servant".
11- Les possibilités des
Saints
"Du temps de mon noviciat, lorsque je lisais les biographies des Saints,
en particulier, le livre de la perfection chrétienne du Père Jésuite, Rodrigue,
je mettais en doute quelques faits et vertus qu’on attribuait aux ermites et aux
Saints, croyant que ça n’était qu’amplification; et que ces choses-ci
dépassaient la possibilité humaine. Mais à force de fréquenter Père Charbel et
d’expérimenter personnellement ses vertus de près, j’eus la certitude que la
grâce divine accomplit les prodiges dans les âmes, et que tout ce qui était dit
et écrit dans les biographies des Saints, reste inférieur à ce que j’ai vu de
mes propres yeux dans ce géant, qui est Père Charbel; géant dans l’austérité et
la mortification de lui-même".
Z: Sa messe est le
culminant de son amour
I- Présentation
1- Au
couvent
"Le prêtre, dans la messe, est le vicaire du Christ. L'offrande: c'est
sûrement corps et sang de Jésus Christ. Durant la messe on a 3 adorations:
-contemplation de la passion du Christ, -l'offrande à Dieu le Père, -communion
spirituelle… et pour la communion on a 6 points: -confession pure, -acte de la
foi, -j'espère que tous les péchés du monde s'efface par une goutte de ton sang,
-Je t'aime, -acte de contrition, -Je suis indigne… -remerciement après la
communion spirituelle".
"Après les messes de ses confrères, prêtres, auxquels il participait, il
disait la sienne; je lui ai maintes fois servi ses messes",
"tantôt sur l’autel de Saint Georges, pratiqué dans le mur sud, tantôt sur celui
de N.D, posté dans le mur Nord, et parfois sur le maître-autel, si le supérieur
le lui ordonnait; il disait sa messe avec soin et recueillement, il était muni
de trois mouchoirs noirs qu’il suspendait à un chandelier, posé à droite de
l’autel; il se mouchait avec l’un, surtout en hiver; après l’évangile il usait
du deuxième, du troisième après les paroles de consécrations, le cas
nécessaire";
"sa messe durait une heure, parfois plus, en une intimité
confidentielle avec la Toute Puissance Divine, malgré la longueur de sa messe,
personne ne s’ennuyait, méticuleux qu’il était; on comprenait mot à mot la
lecture de l’évangile, sans trop hausser sa voix";
"toutefois certains dérobaient au service de sa messe, car il prolongeait la
durée, du fait du soin qu’il y mettait";
"après la messe il reprenait sa place, derrière la porte, à genoux, tout droit
pendant deux heures environ, par terre été et hiver; après, il lavait ses
mouchoirs avant d’aller au travail dans les champs".
2- À
l’ermitage
"J’allais à l’ermitage pour participer à sa messe, et parfois à la lui
servir; au couvent, tout comme à l’ermitage, sa messe était la même dans tous
les détails, soit pendant les jours fériés ou ceux du travail",
"accomplie dans le recueillement extrême, en présence
d’un grand nombre de fidèles qui repartaient munis de sa bénédiction"; "je le voyais, après l’office divin,
agenouillé, tout droit près de la porte, en hiver sur un plateau en osier par
protection contre l’humidité et en été à terre nue; je sortais de l’église alors
que lui, il persistait agenouillé, tout droit, absorbé dans l’action de
grâce". "Lorsque je lui servais la messe;
j’observais sa quiétude dans les gestes, sa voix basse, le soin et l’aspect
révérenciels; les dimanches et les jours ferriés, il disait sa messe à dix heures; le
jour du travail, le matin; après la messe je m’en allais au travail et lui,
après l’action de grâce il se rendait à la vigne; je n’ai jamais pu savoir
combien se prolongeait son action de grâce, mais je peux certifier que toute sa
vie était une préparation à la messe et une action de grâce", "absorbé dans la méditation comme
extasié".
3- De face à
face
"Il était toujours dans l’extase
pendant ses activités spirituelles, en particulier, lors de l’invocation de
l’Esprit Saint, la communion et la levée des sacrements; là il pénétrait
profondément dans la méditation et l’oraison, adressées à la miséricorde de
Dieu, insensible à tout mouvement ou bruit qui se produisait auprès de
lui"; "après les paroles de consécration,
il regardait le Saint Sacrement d’un regard touché", "à l’aspect réverentiel, comme s’il
voyait le Dieu de la gloire de face à face" "et regarder à l’œil nu le Dieu
incarné et caché", "s’adressant à une personne
extrêmement puissante qu’il voyait de ses propres yeux", "contemplant Dieu, emporté par
l’esprit"; "comme s’il voyait par le sens de sa
vue le fils de Dieu lui-même"; "quand il levait le Saint Sacrement
récitant: "Père de la vérité". Il paraissait exalté par l’esprit comme s’il
regardait Dieu de face à face".
4- Sa propreté
pour la messe
"Il veillait sur sa propreté pour la
messe"; "à cette fin, il avait un habit et une
paire de chaussures convenables qu’il gardait bien pour la célébration
eucharistique, immédiatement après il les enlevait", "ainsi que pour la serviette et le
savon, il s’interdisant de s’en servir dans d’autres occasions par respect à
l’office divin"; "il ne se lavait que les lèvres;
quant à ses mains, il les lavait avant la messe, d’une manière
étonnante", "à part cela il n’aurait jamais
trempé ses mains dans l’eau"; "il accordait un soin exceptionnel
aux objets de l’église".
II- Récits et événements
1- Comme un aimant
"Quand j’étais jeune fille, je venais d’Ehmej avec mes parents à
l’ermitage pour y participer à la messe tous les dimanches et les jours de fête;
assez souvent nous participions à la messe de Père Charbel, et je ne le voyais
qu’à la messe. Notre famille dit qu’un
frère de notre famille avait fondé cet ermitage pour lequel nous avons un
penchant spécial, plutôt une passion parce qu’il nous rappelle notre oncle; une
raison de plus, c’est que nous estivions à Ouwaïni,
proche de l’ermitage, village où il n’y avait pas d’église; en outre la sainteté
du Père Charbel attirait les âmes comme un aimant; aussi, l’ermitage était-il
toujours fréquenté par de nombreux visiteurs, tous les dimanches et les jours de
fête; tous ceux qui participaient à la messe du Père Charbel, en sortaient
très émus, quittant l’église à contre cœur surtout quand il prononçait les
paroles de consécration, on se sentait attendris par son recueillement et sa
belle voix; le recueillement, le soin et l’air révérenciel, rythmaient tous
ses mouvements; après la messe, il s’agenouillait sur un sol nu; tout droit,
tête baissée comme une statue; lorsqu’il encessait l’assemblée, il ne regardait
personne".
2- Mangez-vous une soupe de
céréales?
"Père Charbel était un prêtre respectueux qui impressionnait les âmes
par son aspect vénérable et recueilli, en particulier, pendant la messe. Son
compagnon, Père Makarios, me raconta que si l’un des prêtres venait à l’ermitage
pour dire sa messe, avec vitesse, il s’approchait de lui en lui disant à la
fin de l’office divin: "pourquoi vous dépêchez-vous ainsi? Mangez-vous une
soupe de céréales?" Il était un ange dans un corps humain. Je n’ai pas
ouï-dire de sa vie religieuse au couvent était moins sainte et moins vertueuse
qu’à l’ermitage".
3- Communie
"La première fois où je me suis rendu à l’ermitage à l’âge de quinze
ans, c’était pour accompagner ma mère, Wardé, qui voulait voir Père Charbel; il
a refusé de la rencontrer; quand elle lui a exprimé son souhait de lui embrasser
les mains, il a répondu de l’intérieur de l’église, porte fermée: "communie à
la messe, et tu auras dans ta bouche et ton cœur le fils de Dieu lui-même et il
te suffira. A quoi bon embrasser ma main quand le fils de Dieu est dans ton
cœur?!" En lui servant la messe, je n’ai pas cessé de
regarder l’ermite au pied de l’autel, pendant une heure et demie, puis nous
sommes repartis le laissant à l’église, sans que ma mère ait pu embrasser sa
main ou le voir de face à face".
4- Ses larmes coulaient
"Son amour brûlant de feu ardent; près de l’autel, sa poitrine
paraissait un poêle enflammé. Ses yeux brûlaient et les larmes en coulaient, ses
joues rougissaient, ses soupirs s’échappaient de sa poitrine comme une vapeur
chaude",
"comme s’il voyait le Christ par ses yeux. J’en fus témoin, car je lui ai servi
la messe plusieurs fois";
"quand il prononçait les paroles de consécration: "ceci est mon corps! ceci
est mon sang!", à deux reprises, j’ai vu ses yeux larmoyer; une fois, une
larme tomba sur le corporal; après avoir consommé le corps et le sang et lavé
ses doigts, il vit la trace de la larme, il se troubla croyant que c’était une
goutte de sang qui tomba; je lui dis: "qu’est-ce que vous avez? C’est une
trace d’une larme tombée de votre œil après les paroles de consécrations";
pourtant il demeura inquiet portant le corporal et le montra au supérieur pour
calmer son âme".
5- Il saisit la coupe avec ses
dents
"A la fin de sa vie, pendant qu’il consommait le sang, il saisit
longtemps la coupe avec ses doigts; ses prières à l’église laissaient voir un
homme épris de la frénésie de l’amour divin; cela paraissait dans la messe à
travers ses larmes, en particulier, il buvait le sang saisissant tellement fort
la coupe avec ses dents qu’elles laissaient les traces s’y imprimer".
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